Le Quai d’Orsay est une des plus anciennes et prestigieuses institutions en France. Mais en tant qu’objet d’étude, le ministère et ses agents constituent un terrain difficile à explorer. Le chercheur est confronté à des pratiques sociales du secret qui deviennent de réels obstacles dans sa démarche. Pour contourner celles-ci, le chercheur peut choisir de travailler avec l’institution pour mener efficacement sa recherche ou bien d’être entièrement autonome au risque de ne rencontrer que très peu de diplomates. L’article se propose ainsi d’analyser ces pratiques sociales du secret en diplomatie, ainsi que de proposer une esquisse de méthodologie pour compenser les handicaps de sa recherche sur ce terrain si particulier.
Mots-clefs : secret, croyances, hauts fonctionnaires, diplomatie, quai d’Orsay.
The reseacher and the senior civil servant : circumvent the secrecy in diplomacy.
The Quai d’Orsay is one of the oldest and prestigious French institutions. But as subjects of study, the Ministry and its officers represent a difficult terrain to observe. The researcher faces social practices of secrecy that may become serious obstacles in his approach. For circumvent them, the researcher may choose to submit to institution control to pursue effectively his research or to be fully autonomous to the risk to meet very few diplomats. In this way, this article suggests to analyse these social practices of secrecy in diplomacy, as well as to propose an outline of methodology to compensate for handicaps of his research on this particular terrain.
Keywords : secret, beliefs, senior civil servants, diplomacy, quai d’orsay.
Mener un travail de recherche sur la vision du terrorisme par les diplomates français peut s’avérer de prime abord aisé, dans la mesure où la diplomatie publique des États dotés de régimes démocratiques devrait en principe être transparente. Que pourrait-on cacher ou ne pas révéler à un jeune chercheur qui sollicite des hauts fonctionnaires d’un ministère ? Les diplomates français sont susceptibles de tenir des propos conformes aux positions officielles édictées par le pouvoir exécutif dans la lutte contre le terrorisme. Ils sont chargés, par définition, de mettre en application les orientations du Président de la République en politique étrangère. De même, ce qu’on appelle le « secret diplomatique » est devenue une pratique liée à l’institutionnalisation de relations et de représentations avec des États étrangers. Historiquement marquée comme le domaine réservé du monarque, la diplomatie entretient une « tradition du secret » (Colson, 2009 : 33), un outil précieux dans le cadre de négociations avec d’autres acteurs, mais aussi pour tenir à distance le public de certaines affaires. Cependant, il apparaît qu’il n’existe pas qu’un secret en diplomatie, mais plusieurs dimensions du secret qui peuvent être liées aux obligations dues au métier de diplomate, mais aussi à la vision de soi des hauts fonctionnaires dans le cadre de leurs relations avec d’autres services, à l’image du travail interministériel dans la lutte contre le terrorisme. Cette vision de soi structurerait aussi le secret en diplomatie vis-à-vis de tierces personnes qui n’appartiennent pas au rang des diplomates ou qui ne partagent pas leur identité, à l’image des chercheurs s’intéressant à la diplomatie comme terrain d’enquête.
En effet, les institutions d’un État comme la France constituent un objet d’étude privilégié au regard de la littérature consacrée aux politiques publiques. Pourtant, les travaux sur la diplomatie française et ses agents apparaissent assez retreints à l’image de travaux sur les ambassadeurs en science politique ou la réalité du métier de diplomate à travers la sociologie du travail [1]. Le Quai d’Orsay constitue l’un des plus anciens et prestigieux ministères depuis l’Ancien Régime ; mais il entretient une relation assez fermée avec la recherche universitaire. En conséquence, les contraintes sont très importantes pour parvenir à mener des entretiens avec des hauts fonctionnaires. Dès lors, quelle démarche le chercheur doit-il adopter au moment d’une sollicitation écrite ? Doit-il être recommandé par des collègues ou par un universitaire connu ? Doit-il accepter d’être chapeauté par un diplomate en fonction au point de faire contrôler son travail et de renoncer à manœuvrer librement dans sa propre recherche ?
Ces questions ont été soulevées dans le cadre de notre travail à propos de la lutte contre le terrorisme vue par les hauts fonctionnaires du Quai d’Orsay. Elles se focalisent aussi sur les aspects relevant du secret entourant l’antiterrorisme, mais aussi du secret des diplomates dans leur conception de soi et à travers leur métier. En effet, à partir d’un échantillon de plus de 300 diplomates en fonction ou ayant été en fonction (ambassadeurs et consuls en fonction à l’étranger, directeurs et sous-directeurs à l’administration centrale à Paris), seulement une trentaine d’entretiens a été réalisée. Les autres sollicitations ont rencontré une fin de non-recevoir. Parfois, nous avons recueilli des réponses négatives accompagnées de propos critiques sur notre démarche, ainsi qu’un face-à-face avec le service de sécurité du Quai d’Orsay suite à une alerte de diplomates gênés par nos sollicitations. Ces répercussions liées à notre travail de terrain a permis, cependant, d’accumuler un ensemble de matériaux et de contacts permettant de déconstruire l’image d’une diplomatie qui se veut transparente avec le public, mais qui est aussi attachée paradoxalement à une fermeture et à un contrôle des individus tentant de l’approcher par des voies de communication simples, directes avec des objectifs à caractère universitaire.
À partir de ces éléments, le postulat de notre article est le suivant : le secret n’est pas qu’une pratique institutionnelle incorporée par les diplomates dès leur entrée au ministère. Bien au contraire, ceux-ci activent des conceptions diverses et des pratiques plurielles du secret à partir de leurs croyances, de leur éducation et de leur construction sociale et intellectuelle. Certes, le secret peut avoir une forme juridique à travers le devoir de réserve propre au statut de tout agent de la fonction publique. Mais comment expliquer que des diplomates acceptent de répondre à certains interlocuteurs publics et pas à d’autres sur un sujet commun ? Comment également expliquer que certains diplomates acceptent plus facilement de répondre à des personnes extérieures au ministère, voire même leur confient des anecdotes et des documents nécessitant leur anonymat ? D’autres diplomates refusent de leur côté tout entretien au prétexte du devoir de réserve ou de n’avoir rien à dire sur ce même sujet. En réalité, il faut considérer que le secret en diplomatie a plusieurs visages et qu’il n’existe pas une conception, ni une pratique unique du secret parmi les hauts fonctionnaires du Ministère des Affaires étrangères. À partir d’éléments empiriques recueillis lors des entretiens et des prises de contact, cet article propose de reprendre l’approche de Georg Simmel sur le secret lié à l’importance du personnage qui l’emploie (Simmel, 1991 : 26-27). Dans notre étude de cas, cette importance peut être symbolisée par l’appartenance catégorielle (énarques, cadres d’Orient), voire à la considération personnelle de chaque diplomate à travers des relations intersubjectives avec le chercheur. L’article propose aussi une esquisse de l’approche des diplomates par le chercheur. Elle peut s’avérer utile pour contourner leur pratique du secret et compenser ainsi des manques en matière d’informations ou d’entretiens.
Dans un premier temps, nous nous interrogeons sur les aspects faisant du Quai d’Orsay un ministère fermé a priori aux sollicitations extérieures, aussi bien du point de vue de l’organisation que de ses agents. Puis dans un second temps, nous proposons l’esquisse d’une méthodologie du chercheur, afin de contourner les obstacles liés aux pratiques du secret en diplomatie.
Le Quai d’Orsay est, par définition, l’institution chargée d’appliquer la politique étrangère du chef de l’État. Ce dernier est seul à décider de l’orientation de cette politique. Mais cette règle inscrite dans le cadre de la Ve République ne doit pas écarter pour autant l’influence des diplomates en poste au ministère ou détachés auprès de la présidence de la République [2]. D’une part, le ministère des Affaires étrangères forme une entité collective forte à travers son histoire, étant un des ministères les plus anciens. D’autre part, cette identité s’est aussi renforcée à partir de la IIIe République par la sélection de hauts fonctionnaires qualifiés par le biais de concours sur la pratique de langues orientales. Sous la Ve République, la sélection des diplomates au sein l’École Normale d’Administration (ENA) a renforcé cette identité collective fait de prestige de l’organisation et d’intellectualisation du métier.
Mais nous devons préciser également qu’il existe un secret « de fonction » parmi les hauts fonctionnaires du Quai d’Orsay. En effet, du point de vue de la sociologie du travail, un secret lié à l’institution qui inculque à ses agents, entre autres, la maîtrise de leurs émotions face à toutes les situations. Dès lors, en plus du « devoir de réserve » imposé à tous les hauts fonctionnaires, l’expression des émotions, et donc de tout signe de subjectivité, serait une faute professionnelle dans l’exercice du métier de diplomate. Par exemple, lors de tensions entre la France et un autre pays, l’usage régulier du terme « nos amis », pour qualifier le pays en question et ses représentants, constitue un marqueur banalisé de ce secret « de fonction » en diplomatie.
Mais si nous reprenons la démarche simmelienne de lier le secret au statut social du diplomate, le secret ne serait pas seulement assimilé à la dissimulation de tout signe de subjectivité dans le cadre de l’activité professionnelle en diplomatie. Il serait aussi revendiqué, car lié au prestige d’être diplomate et représentant d’un acteur étatique. En effet, tout haut fonctionnaire du Quai d’Orsay perçoit son métier comme lié aux dossiers politiques, donc ayant une nature « noble ». En considérant que les identités se forment à travers le parcours professionnel, le sentiment d’« importance et de grandeur » (Piotet, Loriol, Delfolie, 2013 : 85-86) peut accroître l’égo du diplomate. Le contact régulier avec des interlocuteurs étrangers perçus comme aussi importants, ainsi que la conscience d’être issus de familles de grands serviteurs de l’État ne peuvent que renforcer l’estime de soi des diplomates français. Dès lors, cette vision de soi en diplomatie peut comprendre une pratique du silence, une prise de distance et un « double langage pour les initiés » [3]. Un tel comportement serait ainsi activé dans le cadre de négociations bilatérales et multilatérales, mais dériverait également dans le cadre d’interactions avec des personnes extérieures à la diplomatie. Dès lors, notre analyse du secret en diplomatie comprend à la fois la rationalité du diplomate dans la maîtrise permanente de ses émotions, mais aussi et paradoxalement l’expression de sa part de sentiments tels le prestige et l’estime de soi.
Si nous revenons à la démarche d’enquête du chercheur en diplomatie, le Quai d’Orsay mène globalement une pratique assez fermée du silence, associées à des rétentions d’informations et des pressions diverses quand certains éléments semblent gêner des intérêts parfois difficilement identifiables. Rechercher, par exemple, les biographies détaillées des ambassadeurs à l’étranger ou des diplomates en poste à l’administration centrale du ministère à Paris relève de la gageure. En effet, l’Annuaire diplomatique, ouvrage de référence et actualisé chaque année, comporte l’ensemble des données des hauts fonctionnaires du Quai d’Orsay actuellement en poste. Il permet également de suivre l’évolution de leur carrière. Or, à partir de 1994, l’Annuaire diplomatique est retiré de la vente en raison du caractère confidentiel des informations sur les agents du ministère et la structure des postes occupés [4]. Le document ne peut être consulté désormais qu’au sein des administrations et institutions de la République, ce qui renforce la difficulté pour le chercheur d’obtenir des données de terrain relatives aux diplomates.
De même, l’institution peut pratiquer des pressions sur les chercheurs, dès lors que leurs sollicitations auprès d’agents du ministère apparaissent comme gênantes ou menaçantes ou encore que leurs travaux rendus publics aillent à l’encontre d’intérêts nationaux. Dans le premier cas, notre démarche de proposer des entretiens semi-directifs auprès de diplomates nous a conduit à contacter directement par courriel un certain nombre de diplomates, cela dès 2009 en vue de leur poser plusieurs questions sur leur vision de la lutte antiterroriste. Pour des raisons de temps et d’obligation d’obtenir un échantillon étoffé de diplomates, nous avons transmis nos demandes d’entretien par l’adresse type des courriels dont dispose chaque agent du ministère : prénom.nom@diplomatie.gouv.fr. En réponse, très peu de réactions, parfois des refus polis, argumentés sur le devoir de réserve ou bien simplement pour faute de temps à nous accorder. Mais après l’obtention d’un premier entretien avec un haut fonctionnaire du ministère, nous recevons une notification du ministère pour un rendez-vous dont l’objet n’a pas été clairement précisé. Le rendez-vous a lieu dans une annexe parisienne du Quai d’Orsay ; nous rencontrons un agent chargé spécifiquement du contrôle et de la surveillance des structures du ministère. L’agent nous interroge sur nos motivations, les raisons pour solliciter des diplomates par courriel. Il nous a été ainsi préciser que plusieurs diplomates ont fait part de leur inquiétude en recevant nos demandes d’entretien. On nous fait comprendre aussi qu’il serait judicieux de ne pas poursuivre notre travail de terrain. On nous demande enfin quels sont les diplomates que nous aurions déjà rencontrés. Face à ces questions, nous avons dû rappeler les objectifs de notre recherche strictement inscrite dans le cadre universitaire, ainsi que l’anonymat des personnes rencontrées dans le cadre de nos travaux.
Dans le second cas, la publication de travaux peut aussi entraîner pour le chercheur des formes de remontrances de la part des diplomates. Dans son témoignage en tant que chercheur à Hong-Kong dans la première moitié des années 1990, Jean-Philippe Béja décrit la complexité du statut de son centre qui dépend à la fois du ministère des Affaires étrangères et du CNRS (Béja, 2001). Il observe également la difficulté du positionnement du chercheur sur ce terrain, perçu comme un agent du ministère par les diplomates, alors qu’il est autonome vis-à-vis des institutions étatiques. Ainsi, dès lors qu’il propose une biographie critique d’un dignitaire chinois, lors d’un voyage d’État, ou bien une étude sur les travailleurs pauvres en Chine, le chercheur peut recevoir des appels « menaçants », des critiques et des regrets sur ses travaux de la part des diplomates français en poste à Hong-Kong ou à Paris. Béja considère que son autonomie ne saurait se plier au devoir de réserve des hauts fonctionnaires et perçoit ces critiques comme de la mauvaise humeur et non comme une « démarche administrative en bonne et due forme » contre celui-ci.
Ces différents aspects permettent de décrire trois aspects fondamentaux du secret en diplomatie. Tout d’abord, le secret pratiqué en diplomatie à l’égard du chercheur peut prendre des formes variées comme le silence, la surveillance et les remontrances. Mais ces formes du secret renvoient plutôt à la notion de « secret négatif » (Kaiser, 2004) comme marqueur de distinction entre les diplomates et ceux qui n’en sont pas. De même, ces pratiques régulières du « secret négatif » sont proportionnelles à l’importance des diplomates, c’est-à-dire sur leur vision de soi, cela à travers « l’intimidation » (Simmel, 1991 : 46). Il y a très clairement une volonté des diplomates à vouloir contrôler et maîtriser tout ce qui relève de la production scientifique autour de la diplomatie. Ensuite, il apparaît, entre le témoignage de Jean-Philippe Béja en 1994 et le nôtre en 2009, une stabilité temporelle de ces pratiques en diplomatie, ce qui va à l’encontre de certains travaux en sociologie et en psychologie qui nient que le secret puisse avoir une histoire et donc qu’il puisse être lié à la temporalité (Monier, 2000 : 5). Or, les diplomates activent aussi des croyances qui incluent des représentations temporelles. Par exemple, ils croient en une temporalité de l’État que nous qualifions de « très longue durée » et à travers laquelle, ils perçoivent l’État comme un acteur séculaire, ayant pour mission première de contrôler les bouleversements du monde (Germiyanoglu, 2015). De fait, pratiquer le secret sous plusieurs formes, tout comme maîtriser ses émotions et anticiper les crises internationales relèveraient d’une conception temporelle commune de l’État parmi les hauts fonctionnaires du Quai d’Orsay, quelle que soit leur filière d’origine comme l’ENA, le concours d’Orient ou encore la filière généraliste [5]. Enfin, le ministère des Affaires étrangères apparaît plus comme une institution fermée par un « habitus » séculaire que par un réel « secret défense » motivé par l’intérêt de l’État (Bryon-Portet, 2000 : 97). Certes, le Quai d’Orsay peut considérer que la seule voix officielle exprimée est celle de son porte-parolat, en particulier sur des sujets sensibles comme le terrorisme. Cependant, les réponses aux demandes d’entretien avec ces diplomates, voués spécifiquement à l’exercice public, ont été très variables et ne sont pas forcément gage d’une ouverture assurée vis-à-vis du chercheur. De même, analyser le terrorisme comme sujet sensible pouvant fermer des portes au chercheur ne nous semble pas réellement pertinent, dans la mesure où nous avons quand même pu réaliser des entretiens en dehors du cadre officiel que représente le porte-parolat. Si l’on questionne également la « raison d’État », plusieurs travaux ont considéré que ce concept n’aurait plus de sens au sein de nos démocraties, dans la mesure où la transparence serait devenue une norme depuis les années 1970 (Duhamel, 2000 : 79-80). Mais cette transparence, si elle contribue à la transformation de l’État depuis quarante ans, n’a pas pour autant modifié la sociologie ni les pratiques du secret parmi les hauts fonctionnaires, encore moins celles des diplomates français [6]. Dans tous les cas, le Quai d’Orsay et ses agents ne constituent donc pas, au sens simmelien, une « société secrète », fondée sur des réalités nécessitant un devoir de silence et que les non-initiés à l’image des chercheurs ne doivent savoir, ni rendre public (Simmel, 1991 : 87).
Mener un travail de terrain sur les diplomates et le ministère des Affaires étrangères implique pour le chercheur de s’adapter aux récentes ouvertures du Quai d’Orsay à destination du grand public, tout en conservant son autonomie. Il peut aussi faire le choix de solliciter directement une autorisation auprès de l’organisation pour y circuler librement et y rencontrer peut-être plus librement ses agents. Mais dans le second cas, l’autonomie du chercheur est-elle réelle ? Notre interrogation ne veut pas opposer deux approches pour le chercheur. La question essentielle n’est pas non plus le degré de qualité du travail de terrain par rapport à celles-ci, mais avant tout d’interroger la problématique de la capacité du chercheur à s’assurer de son autonomie dans le cadre de sa recherche. Or, nous considérons que cette autonomie est très relative car le Quai d’Orsay, en tant que terrain de recherche, représente un ministère hautement politique et qui se perçoit comme tel, ce qui nous renvoie à sa volonté de contrôler ce qui va se dire à son sujet. De même, un collectif de chercheurs travaillant sur un même terrain est, peut-être, plus susceptible de renforcer son autonomie dans sa recherche face à une organisation, ce qui peut sembler plus difficile, sur un terrain similaire, pour un seul chercheur.
Si l’autonomie totale est choisie par ce dernier sur le terrain de la diplomatie, il risque de faire face à de longues périodes de recherches infructueuses. La quête d’entretiens s’avère particulièrement ardue pour une institution supposée ouverte au dialogue et à l’échange avec le monde entier. Un ancien conseiller des affaires étrangères présente ainsi, à première vue, la représentation que l’on peut se faire d’un diplomate français : « Apte à entrer en contact, y compris informellement, avec des personnes pour lesquelles il n’éprouve peut-être aucune sympathie personnelle (…), à écouter et respecter la position d’autrui tout en la décryptant pour élaborer le compromis acceptable (…). » (Pouzoulet, 2005 : 129). Sur ce point, les présupposés du chercheur ont aussi leur importance : doit-il considérer que la démocratie impose de la transparence à toutes les institutions vis-à-vis de personnes tierces ? Ou bien doit-il se conformer aux règles implicites d’un secret social et institutionnalisé, lui imposant d’accepter le contrôle du ministère ? Si l’on fait un choix rationnel, le rapport coûts/avantages ferait pencher le chercheur pour un contrat avec l’institution. Par exemple, plusieurs chercheurs peuvent mener une enquête sociologique au sein d’un ministère dans des délais raisonnables et rencontrer un grand nombre d’agents, sachant qu’ils disposent d’une autorisation officielle de l’institution. Des travaux de très grande qualité ont pu être menés ainsi au sein du ministère des Affaires étrangères. De même, en 2014, au cours de notre enquête de terrain, nous avons pu rencontrer un haut fonctionnaire nous affirmant, non sans fierté, avoir demandé à plusieurs chercheurs la production des travaux en question [7]. Ce diplomate se présentait lui-même comme faisant le lien entre le ministère et le monde de la recherche. Il affirmait également qu’il aurait pu devenir aussi chercheur s’il n’était pas entré dans une grande école. Le ministère est donc ici demandeur d’un travail sur lui-même et ses agents, cela à l’initiative d’un diplomate personnellement ouvert à la recherche universitaire.
Si le choix est fait pour une totale autonomie du chercheur vis-à-vis de l’institution, l’enquête permet de rencontrer des diplomates qui peuvent donner des informations comme celles décrites précédemment. Pour cela, le chercheur doit envoyer plusieurs centaines de courriels à différents diplomates en poste à Paris et à l’étranger pour obtenir plusieurs dizaines d’entretiens dont l’exploitation du contenu peut s’avérer, à différents niveaux, précieux ou stérile. Si l’on veut être efficace, la prise de contact avec d’anciens hauts fonctionnaires s’avère aussi très intéressante, dans la mesure où ils se sentent relativement plus libres dans leur parole par rapport au ministère et qu’ils disposent d’un carnet d’adresses plus important que celui des jeunes diplomates. Pour autant, l’absence d’immersion du chercheur dans l’organisation, et sous le contrôle de celle-ci, demeure un handicap important pour le recueil de données sur le terrain. Une autre piste est celle de la mise en place d’une politique récente de communication du Quai d’Orsay à l’attention du public. En effet, en 2014, le ministère lance une première manifestation « Portes ouvertes » sur le métier des diplomates. Le public visé sont les étudiants ; mais l’ouverture permet aussi aux chercheurs de rencontrer directement plusieurs diplomates venus témoigner de leurs missions. Ce type d’événement répond à une volonté d’ouverture très récente du ministère, dont la communication tente de « dépoussiérer » l’image de celui-ci [8]. Pourtant, cette politique soudaine d’ouverture au public, qui peut traduire aussi une volonté de plus grande transparence de la diplomatie d’une démocratie vis-à-vis de ses concitoyens, ne remet pas en cause, selon nous, le secret comme objet et comme pratiques. En effet, les discours des ambassadeurs invités à intervenir lors de ces journées publiques ne diffèrent guère de la communication officielle du ministère et de leurs dirigeants politiques. Néanmoins, ce type d’événement nous a permis de compléter nos échanges sur la lutte antiterroriste avec des ambassadeurs. La plupart d’entre eux étaient justement les mêmes qui avaient refusé naguère de répondre à nos demandes de contact envoyées par courriel. De fait, la rencontre dans un cadre officiel et ouvert au public nous a permis de compenser l’handicap lié à notre autonomie totale dans la recherche. Enfin, cet événement, réédité en 2015, se déroule en même temps que la traditionnelle et annuelle « Conférences des Ambassadeurs », c’est-à-dire à la fin du mois d’août et qui réunit à Paris l’ensemble des diplomates en poste dans le monde. La Conférence permet au pouvoir exécutif de faire ainsi l’état de la diplomatie française et de lui fixer ses grandes orientations. Par contre, cette conférence et les autres réunions entre diplomates, durant cette période, sont tenues à huis clos.
Si le chercheur doit donc s’adapter aux évolutions du ministère, mais aussi faire un choix d’approche par rapport à son autonomie, il doit dans tous les cas bâtir une relation également modulable selon le caractère du diplomate qu’il rencontre. À l’inverse d’une homogénéisation stable du corps des diplomates observée ces trente dernières années, chaque haut fonctionnaire active des croyances et manifeste des traits de caractère assez variés. Les diplomates sont, pourtant, régulièrement présentés comme des êtres rationnels, se définissant même comme des « serpents froids » [9] qui ne peuvent en aucun cas manifester des émotions face à une crise internationale ou émettre des avis divergents par rapport à la politique étrangère de leur pays. La maîtrise des émotions serait une des règles de conduite dans le métier de diplomate, même si nous rappelons, conformément à la démarche simmelienne, que le secret en diplomatie est aussi défini comme un marqueur social lié au sentiment de prestige du diplomate de traiter d’activités nobles et de représenter son État à l’étranger. Pratiquée régulièrement, la maîtrise des émotions pourrait aussi expliquer la distanciation que crée le haut fonctionnaire avec des tierces personnes n’ayant pas de lien direct avec son organisation, ni avec la diplomatie en générale. Ne peut-on pas y voir paradoxalement la manifestation d’un autre sentiment, celui du mépris du diplomate pour ce qui ne relève pas de ses activités et pour ceux qui ne font pas partie de son cercle ? Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les énarques, en tant que catégorie à part entière au sein du corps diplomatique, tendent à manifester une forme de mépris envers le travail de renseignement et celui de la police, ainsi que pour les groupes terroristes en tant qu’adversaires de nature non-étatique. Inversement, les énarques du Quai d’Orsay préfèrent travailler avec des militaires dont ils semblent partager une identité sociale plus commune qu’avec leurs homologues issus du concours d’Orient (Germiyanoglu, 2014). Néanmoins, cette distanciation imposée par l’objet d’étude lui-même apparaît comme inédite, dans la mesure où le chercheur serait a priori celui qui manifesterait cette même distance par rapport à son terrain. En effet, selon Céline Bryon-Portet, l’objectivité du chercheur serait en soi « un jugement de valeur » qui l’empêcherait de mieux étudier son terrain, en particulier si celui-ci constitue une société fermée ou semi-fermée (Bryon-Portet, 2011 : 209-212). En effet, une trop grande distance du chercheur vis-à-vis de son objet, ici l’anthropologue, rendrait « stérile » son travail, encore plus en refusant de pénétrer « dans l’univers » de « l’autre ». Selon Bryon-Portet, le chercheur en viendrait ainsi à déformer l’image de la société qu’il étudie, produisant une « caricature sans grande valeur heuristique » en raison de comportement distancié. À notre sens, cette démarche apparaît la plus équilibrée face à des sociétés secrètes et semi-secrètes. Dans notre cas, le ministère des Affaires étrangères et ses hauts fonctionnaires constituent ainsi un ensemble semi-fermé. Mais ici, le problème de l’altérité ne se pose pas forcément au chercheur, mais plutôt à l’objet d’étude. Que ce soit face à un secret « de fonction » ou de prestige comme nous l’avons décrit précédemment ou bien repris à travers le témoignage de Jean-Philippe Béja, le chercheur rencontre maints obstacles pour obtenir des réponses à ses questions. Certes, le Quai d’Orsay et ses agents ne sont pas comparables à des sociétés secrètes au sens de sectes ou de tribus. Mais ils peuvent constituer une forme de « micro-communauté » fonctionnant en partie comme des sociétés secrètes, à l’image également de l’armée (Bryon-Portet, 2011 : 215). Or, nous considérons que les diplomates, en plus d’avoir des caractères et des croyances individuelles, ne forment pas une société secrète, dans la mesure où leurs pratiques du secret tiennent plus d’un « habitus » spécifique que de la « raison d’État ».
À partir de ces observations, le chercheur doit construire une relation de confiance, presque de « réflexivité » proposée encore par Céline Bryon-Portet et à travers laquelle, le chercheur doit trouver un juste équilibre entre distance et proximité avec son objet d’étude (Bryon-Portet, 2011 : 221-223). Dans notre démarche, nous disposions, dès le départ, d’une bonne connaissance des institutions françaises acquise au cours de notre parcours professionnel : intérêt pour les relations internationales, la diplomatie ; un mémoire universitaire sur un ancien ministre des Affaires étrangères ; une demande de stage auprès du Quai d’Orsay qui nous amena à travailler directement pour la présidence de la République, puis au Parlement ; des contacts réguliers avec le monde politique, mais aussi et surtout avec des hauts fonctionnaires. En tant que chercheur, nous avions donc déjà une forme de proximité avec notre futur terrain, une position donc différente de la distanciation de l’anthropologue rejetée par Bryon-Portet, nous autorisant en même temps à choisir une autonomie totale dans notre recherche. À partir de ce premier point d’équilibre, il faut en trouver un second, dès lors que le chercheur parvient à rencontrer des diplomates. Au cours de nos entretiens, il est apparu que la cordialité, l’empathie ou l’hostilité entre le chercheur et le diplomate ne dépendent pas forcément des connaissances du second en matière d’antiterrorisme. En effet, aussi bien des profanes en la matière que des spécialistes ont bien voulu répondre à nos demandes d’entretien. De même, les inclinaisons politiques des uns ou des autres n’ont pas été déterminantes dans la nature des relations avec le chercheur. En réalité, celle-ci dépend de plusieurs facteurs souvent insaisissables. Selon les rencontres, des diplomates font part de critiques envers certains gouvernements pour leurs choix en politique étrangère. D’autres confient des anecdotes assez dures sur certains de leurs collègues. Parfois, certains abrègent l’entretien et raccompagnent poliment le chercheur à la porte de leur bureau, dès lors que les questions ne leur conviennent pas. La relation avec le chercheur est testée en permanence et n’est jamais la même, selon le diplomate rencontré. L’affect du chercheur est ainsi mis à contribution, mais il doit aussi conserver un certain sang-froid face à certaines situations. Par exemple, un diplomate conseille au chercheur de reformuler ses questions, car elles lui semblent incorrectes. Un autre lui demande par téléphone ses origines avant de lui répondre, car celles-ci détermineront le choix de ses réponses. Enfin, un diplomate, invité régulier des médias pour parler du terrorisme, lui refuse un entretien en raison de son « devoir de réserve ».
Dès lors, peut-on lier ces postures aux enjeux de carrière des diplomates ? On peut d’ores et déjà indiquer que ce sont des hommes qui ont accepté de nous répondre ; inversement, toutes les femmes diplomates ont décliné nos demandes. Le sentiment de valorisation personnelle est-il spécifiquement plus masculin ? À défaut d’y répondre, car manquant d’éléments probants, nous estimons que la complexité des situations rencontrées, ainsi que le fait que les entretiens soient anonymes ne permettent pas de déterminer une quelconque tentative de valorisation du diplomate en nous recevant ou en ne répondant pas à certaines de nos questions. Une seule fois, l’entretien est apparu comme une occasion pour un de nos interlocuteurs de critiquer l’institution ministérielle. Cet épisode nous a fait interroger la loyauté fonctionnelle de l’agent, théorisée par Albert O. Hirschman. Cependant, il ne pouvait pas exprimer publiquement un quelconque désaccord avec le fonctionnement de son ministère (Hirschman, 1970). Plusieurs travaux ont souligné la violence symbolique dans la compétition entre hauts fonctionnaires, qu’ils soient au Quai d’Orsay ou dans une autre institution. Cet aspect est particulièrement observable parmi les énarques, dont le rapport à l’Autre peut se fonder notamment sur la croyance d’une domination intellectuelle, voire peut-être par le prestige du poste qu’ils occupent (Germiyanoglu, 2014). La conception de soi du diplomate a donc toute son importance. Pourtant, elle n’est pas forcément spécifique à un type de haut fonctionnaire ou à un type de poste occupé : certains énarques du ministère reçoivent le chercheur avec cordialité, tandis que d’autres issus du concours d’Orient, supposés être plus ouverts à l’Autre, déclinent ses demandes d’entretien. De plus, à un même poste à Paris, un diplomate peut accepter un entretien, tandis que son successeur, deux ans après, ne le fera pas. En conséquence, le chercheur doit s’armer de patience et ne pas se laisser submerger par l’affect, tandis que le diplomate exprime, de manière directe ou indirecte, différentes marques d’empathie ou de mépris. La quête d’équilibre pour le chercheur, ayant opté pour l’autonomie totale dans sa recherche par rapport à ce terrain particulier, est ainsi primordiale.
Se pose enfin la question du traitement des données recueillies auprès des hauts fonctionnaires rencontrés. La difficulté globale face au secret des diplomates implique pour le chercheur de respecter une anonymisation de ses données avant publication de ses travaux. Il ne peut en être autrement, dans la mesure où la judiciarisation des actes dans les sociétés démocratiques devient croissante, au risque de bloquer paradoxalement la recherche universitaire. De même, et dans le cadre de la relation de « confiance distante » établie avec les diplomates, les interlocuteurs les plus empathiques sont également ceux qui ont demandé explicitement à ne pas voir leur identité divulguée. Dans cette relation, les rares rencontres avec des personnalités critiques ou défiantes envers leur organisation permettent également d’obtenir quelques documents privés. Dès lors, il apparaît indispensable de traiter de la même manière l’ensemble des données exploitées dans les entretiens menés, aussi bien dans la publication d’articles que d’ouvrages. La contrepartie est que les données ne permettent pas d’identifier clairement des personnalités, des attitudes, et des parcours, ce qui fait « manquer de chair » au travail accompli, alors que le chercheur s’est efforcé à s’introduire dans un terrain assez fermé et à contourner les pratiques du secret de ses agents. Cet aspect n’est pas spécifique au choix d’autonomie du chercheur. Même les travaux sociologiques soutenus par le ministère pratiquent cette anonymisation des données. Cependant, certains cas de figure méritent d’être rendus publics et ne nécessitent pas un anonymat excessif : d’une part, certains sources bibliographiques relatent explicitement des noms et des propos de diplomates. Les auteurs de ces sources, souvent des journalistes, ont eu des introductions et des autorisations qu’un chercheur n’aurait pas pu obtenir. D’autre part, des diplomates très politisés, ayant travaillé comme conseillers des présidents de la République et ayant également répondu à des entretiens dans les médias, sont également des objets d’étude en soi qui ne nécessitent pas qu’on masque leurs propos. Paradoxalement encore, ce sont eux également qui tendent à refuser des entretiens avec les chercheurs, mais ne rechignent jamais à répondre aux questions des journalistes. Enfin, mais dans une proportion moindre, quelques anciens diplomates ont produit des livres personnels sur leur expérience, leur vision des relations internationales et de la politique étrangère de leur pays. Ces ouvrages, parfois de qualité inégale pour la recherche, restent des sources précieuses, même si elles nécessitent d’être traitées comme des mémoires avec ce que cela implique d’omissions volontaires ou involontaires de la part de leurs auteurs.
Contourner le secret en diplomatie implique pour le chercheur d’avoir une capacité d’adaptation importante, ainsi qu’un postulat d’équilibre dans ses rapports avec les diplomates français. Les secrets pratiqués au cœur de la diplomatie française ne relèvent pas de réalités propres à l’État et à ses intérêts, mais avant tout d’un « habitus » séculaire que les agents ont intégré globalement dans leurs comportements vis-à-vis des personnes tierces à l’image des chercheurs. Silence et indifférence, pressions diverses, contrôle et surveillance, mépris, cette liste non exhaustive des comportements humains au nom du secret ou du « devoir de réserve » ne doit pas faire oublier la richesse d’autres caractères plus empathiques et ouverts. Certes, les pratiques sociales du secret en diplomatie sont largement injustifiées de la part des diplomates et inutilement contraignantes pour les chercheurs. Ces pratiques sont avant tout des obstacles à un travail intellectuel et symbolisent très clairement l’opacité de « micro-communautés » au sein de même d’une démocratie. Mais peut-être conscient que cette « noblesse » d’État doit désormais donner une image plus ouverte et moderne au XXIe siècle, le pouvoir exécutif tend à commencer, ces deux dernières années, à nouer des relations entre les citoyens et les diplomates. Le chercheur doit, en conséquence, saisir toutes les opportunités pour entrer en contact avec ces hauts fonctionnaires.
Mais ce qui constitue aussi un élément important demeure la relation entre le chercheur et le diplomate. Elle est avant tout intersubjective, dans la mesure où l’objectivité et la maîtrise des émotions ne sont que très relatives dans le cadre des entretiens réalisés. De même, si le corps des diplomates apparaît socialement stable ces trente dernières années, il n’en demeure pas moins que les diplomates peuvent se révéler aussi différents les uns des autres dans leurs réactions que dans leurs croyances par rapport à ce qui relèverait du secret ou pas. Sur ce point, la socialisation des diplomates avant même leur entrée en fonction au Quai d’Orsay un rôle primordial, selon nous, dans la constitution de leurs croyances et, en conséquence, dans leur rapport à l’Autre. Leur appartenance catégorielle, comme celui d’être énarque ou du cadre d’Orient, peut aussi avoir une influence sur leurs pratiques du secret, mais elle ne saurait être exclusive et doit être démontrée.
Enfin, l’enjeu pour le chercheur sera essentiellement de produire des données recueillies grâce à son pragmatisme et son adaptation à chaque situation, quitte à se maîtriser à son tour pour ne pas perdre la moindre chance d’obtenir des entretiens supplémentaires. La contrepartie sera toujours de privilégier un traitement totalement anonyme de ses entretiens, à l’exception de sources déjà rendues publiques où de prestations médiatiques de diplomates. Mais c’est un prix à payer très modeste en comparaison de la grande difficulté à recueillir ces données sur un terrain aussi riche et complexe qu’est la diplomatie française.
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[1] Voir l’ensemble des travaux de Marie-Christine Kessler, ainsi que l’ouvrage suivant sur la sociologie du métier de diplomate : Piotet Françoise, Loriol Marc, Delfolie David (2013), Splendeurs et misères du travail des diplomates, Paris, Hermann.
[2] Les hauts fonctionnaires en poste à l’Elysée sont généralement proches du pouvoir politique en place, qu’il soit de gauche ou de droite. Ce fait s’observe également dans les variations des carrières de ces diplomates politisés. Ces derniers peuvent se retrouver en poste à l’étranger ou appelés à Paris, dès lors qu’une alternance politique se produit.
[3] Intervention de Marc Loriol, « Travail des diplomates et contrôle des émotions. Recherche exploratoire autour de la dimension interpersonnelle dans la négociation », lors du colloque « Clinique du travail ». CNAM, 30 mai 2008.
[4] Voir la réponse écrite n°05039 du 5 mai 1994 du gouvernement français, suite à la question écrite d’un sénateur des Français de l’étranger : http://www.senat.fr/questions/base/1994/qSEQ940305039.html (consulté le 30 mai 2016).
[5] Néanmoins, notre précédente étude avait fait apparaître une dualité entre temporalités des diplomates issus de l’ENA et ceux issus du concours d’Orient en matière de visions de soi, de l’ennemi et de l’environnement international. Certes, la temporalité commune à ces filières existe concernant la pratique du secret en diplomatie, mais ne se vérifie pas dans le cadre d’une analyse constructiviste de la lutte contre le terrorisme par les diplomates français. Germiyanoglu Okan (2015), « Temporalité de l’État, temporalité de l’ennemi », Temporalités, n°21, 16 juillet 2015 [en ligne] https://temporalites.revues.org/3104. (consulté le 30 mai 2016).
[6] Nous nous référons au dernier état des lieux sur les recherches de François Denord, et Sylvain Thine, « Des carrières d’énarques. Recomposition de l’Etat et stabilité des profils des hauts fonctionnaires », Séminaire du CESSP-CRPS, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 11 décembre 2015.
[7] Entretien avec un haut fonctionnaire du Quai d’Orsay, Paris, 15 avril 2014.
[8] Le ministère peut répondre aussi aux quelques ouvrages sulfureux de journalistes qui tendent à dénoncer les comportements abusifs de certains diplomates dans leurs missions, ainsi que le coût qu’entraîne le fonctionnement de l’institution. Sans réelle valeur sociologique, ces ouvrages n’ont pas suscité d’intérêt à nos yeux.
[9] Entretien avec un haut fonctionnaire du Quai d’Orsay, Paris, 6 décembre 2009.
Germiyanoglu Okan, « Le chercheur et le haut fonctionnaire : enjeux du secret en diplomatie », dans revue ¿ Interrogations ?, N°22. L’enquêteur face au secret, juin 2016 [en ligne], http://revue-interrogations.org/Le-chercheur-et-le-haut (Consulté le 21 décembre 2024).