Une catégorie sociale est devenue une cible majeure à la fois du discours politique et de l’intervention sociale : les jeunes sans emploi, ni formation. C’est cette catégorie, généralement utilisée sans interroger le fait qu’elle repose sur un intervalle d’âge qui est l’objet de cet article. Son but est précisément de questionner les présupposés des politiques sociales en direction des jeunes. L’article montre que l’âge est un rapport social de domination et que son usage pour constituer la catégorie « jeune sans emploi, ni formation » comme un problème social a des conséquences sur la manière de penser les problèmes sociaux et les solutions pour les résoudre.
Mots-clés : jeunesse ; politiques sociales ; chômage
The problem of young people not in education, employment or training has been frequently raised in the political and social fields. This paper discusses the consequences of the use of age intervals in order to classify people, more precisely it aims at questioning the « taken for granted » of social policies for young people. We show that age is a power relation and we analyze the consequences of the use of age categories on the construction of social problems and on the definition of social policies.
Keyword : youth ; social policy ; unemployment
Comme le relève le Bureau international du travail (BIT) [1], une catégorie sociale est devenue une cible majeure à la fois du discours politique et de l’intervention sociale : les jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en formation. C’est la classificatoire d’âge contenue dans cette catégorie qui fait l’objet de cet article. Pourquoi les ’jeunes’ font-ils aujourd’hui l’objet d’une préoccupation particulière parmi les personnes sans emploi ? Sur quelle représentation normative du parcours de vie repose cette préoccupation ? Quels types de rapports de domination cette classificatoire soutient-elle ?
Notre perspective est similaire à celle que propose Carol Bacchi dans Analysing : what’s the problem represented to be ? (2009). Elle suggère dans ce livre de s’intéresser non pas aux problèmes sociaux mais à la manière dont le politique les constitue en tant que tels. Nous allons donc questionner le « taken for granted » (Rönnblom, 2012 : 128) des politiques sociales en direction des jeunes afin de comprendre d’une part comment cette catégorie a été constituée comme problématique et, d’autre part, les conséquences de cette catégorisation sur la manière de penser les problèmes sociaux et les solutions pour les résoudre.
Pour le faire, nous allons dans un premier temps montrer, à partir de la littérature sociologique, que l’âge n’est pas seulement un outil de classification sociale, mais qu’il sert également à établir le rapport social de domination d’un groupe – les personnes qui occupent un emploi – sur les autres. Nous allons ensuite nous fonder sur un matériau empirique original [2] (un corpus constitué de débats parlementaires helvétiques récents liés à des réformes de l’État social et d’interviews semi-directives) pour examiner le diagnostic social auquel conduit la catégorisation par âge et les solutions qui en découlent. En conclusion, nous montrerons que fonder sur l’âge la manière de penser la transition vers le statut d’adulte en emploi a pour effet de subsumer dans une seule catégorie des univers sociaux très différents.
L’âge est, comme l’ont montré nombre de sociologues, un puissant outil de classification sociale (par exemple Bourdieu, 1984 ; Calasanti & Slevin, 2006 [3]). Une « police des âges » (Percheron & Rémond, 1991 : 111-139), autrement dit un mode de classement des individus en catégories d’ayants droit (ou d’ayants obligation) en raison de leur date de naissance, a ainsi été instituée.
En particulier, l’âge définit les frontières de l’emploi en société : l’emploi est illégal avant un certain âge (en général celui de la fin de la scolarité obligatoire), accessoire si une formation se poursuit, constitue la normalité entre 25 et 64 ans, jusqu’à ce qu’il devienne l’exception à partir de l’âge de la retraite. La statistique des personnes en emploi dans les pays de l’OCDE le confirme [4] : 23 % des personnes âgées de 15 à 19 ans sont en emploi, 55 % des 20 à 24 ans, 71 % des 25 à 64 ans et 12 % des plus de 65 ans (chiffres 2012). La normalité du fait d’être économiquement actif est donc en relation avec l’âge. Avec la série enfance – formation – emploi – retraite, un parcours de vie ’normal’ est constitué, dont le caractère androcentique a été montré, puisque ce modèle est valable en Suisse pour les parcours de vie de trois quarts des hommes, mais d’un cinquième des femmes seulement (Levy, Gauthier et Widmer, 2006) [5]. Il institue des transitions par âge, du monde de l’école/de la formation vers celui de l’emploi et du monde de l’emploi vers celui de la retraite (Kohli, 1987).
Outil reconnu de classification sociale, l’âge n’est en général pas perçu comme un rapport social, malgré les travaux de longue date relevant à quel point les temporalités sont multiples, suivant par exemple les classes sociales, les groupes structurés ou les sociétés (Gurvitch, 1950, 1958), ou comment elles s’imposent aux individus via les institutions (Grossin, 1989, 1996). L’âge est une catégorie naturalisée par l’objectivité de l’incrémentation arithmétique et, dans les sociétés postindustrielles, par le caractère apparemment universel – sauf accident – du passage d’un âge à un autre. L’État, qui fonde différentes législations sur l’âge (Labadie, 2001), participe de manière décisive à cette naturalisation. Il le fait, par exemple, en organisant l’allocation des ressources de manière différenciée tout au long de la vie (Neugarten, 1996). Pour ce qui concerne le chômage, il le fait lorsqu’il instaure des mesures spécifiques pour deux groupes constitués à partir de l’année de naissance, les personnes ’jeunes’ et ’âgées’ [6]. Ce faisant, il constitue des catégories dont la genèse, autrement dit les raisons qui font qu’à un moment donné, le politique a décidé de les constituer, est aussitôt oubliée (Delphy, 2001). L’usage de l’âge pour produire la catégorisation est donc dans les sociétés postindustrielles de l’ordre de la doxa : la relation d’ordre entre les âges est acceptée comme allant de soi, car elle est constituée d’un ensemble de croyances qui ne sont pas considérées comme telles (Bourdieu, 1997). Si des contestations sur les frontières peuvent se faire (sur l’âge de la majorité ou sur l’âge de la retraite), le fait que des obligations et des droits différents existent suivant l’âge ne fait pas débat : le caractère fluctuant et construit de la notion d’âge (Langevin, 1982) est largement occulté.
La catégorie « jeune sans emploi, ni formation » qui nous intéresse particulièrement dans cet article est définie par l’État dans le cadre de la juridiction civile et des obligations découlant de la filiation. Son début commence à l’issue de la formation, soit au plus tôt – en Suisse – à la fin de la scolarité obligatoire (15 ans révolus), l’âge qu’il faut atteindre pour avoir le droit d’occuper un emploi. Sa fin est fixée à 25 ans, un âge qui est non seulement celui de la fin de l’obligation d’entretien par les parents en cas de formation postobligatoire, mais encore qui marque la fin de la rente éventuelle de survivant·e dans l’assurance vieillesse et celle du possible supplément de rente de retraite pour enfant en formation. Selon les normes légales en vigueur, 25 ans représente l’âge à partir duquel une personne est censée ne plus dépendre de ses parents : c’est l’âge de l’emploi.
Mais l’âge n’est pas seulement un outil de classification sociale, c’est également un rapport social (Jenny, 1995) qui justifie des hiérarchies et des relations de pouvoir, autrement dit des différences dans la distribution de l’autorité, du statut et de l’argent (Calasanti, 2003). C’est donc un rapport de domination. La position dominante est occupée par la personne en emploi, principalement définie comme on l’a vu par un intervalle d’âge, les autres positions sociales étant pensées à partir de cette position dominante : c’est le but à atteindre plus tard pour les enfants et les jeunes, c’est le fait de l’avoir occupée qui justifie les prestations de retraite. L’objectif des politiques sociales mises en place en direction des « NEET » est l’accès à cette position.
C’est également à partir de cette position dominante que les expert·e·s réfléchissent à l’avenir des politiques sociales, on en trouve une preuve par exemple dans les rapports du National Transfer Accounts Project qui mesure le « Lifecycle Deficit » dans le monde et inspire les politiques sociales des pays de l’OCDE : ces rapports montrent en effet que seules les personnes d’âge actif rapportent de l’argent à la société, tandis que les autres groupes d’âge profitent pour l’essentiel de réallocations de ressources [7].
Si, dans l’étude des politiques sociales, l’âge n’est la plupart du temps pas pensé en tant que rapport social, c’est sans doute parce qu’il est naturalisé, mais également parce qu’il est consubstantiel (Kergoat, 2009) d’autres rapports sociaux, notamment de sexe, et que l’analyse scientifique s’est surtout concentrée sur d’autres rapports sociaux que les rapports sociaux d’âge. Ainsi, les nombreux travaux qui ont été consacrés à l’analyse du modèle de l’homme gagne-pain, figure normative à partir de laquelle les politiques sociales ont été construites (Fraser, 2000 ; Priestley, 2000), prennent encore trop rarement en compte le fait que cette position dominante est le produit conjoint d’un système de genre et d’un système d’âge (Langevin, 1999).
Dans cet article, nous nous proposons d’avancer dans la réflexion sur cette question en tentant de mettre au jour les conséquences du rapport social d’âge. Nous le faisons à partir d’un matériau empirique original que nous présentons ci-dessous.
Le matériau empirique sur lequel nous nous appuyons est constitué d’une part de débats parlementaires, d’autre part d’interviews semi-directives.
Les débats parlementaires portent sur des lois et ont été menés à des échelons différents du système politique suisse (fédéral et cantonal). Le débat parlementaire est particulièrement intéressant à explorer pour comprendre comment la catégorie « NEET » est constituée en tant que problème public, puisque c’est justement le rôle du politique de légiférer pour répondre aux problèmes qu’il construit en tant que tels (Bacchi, 2009) [8].
Dans le contexte suisse, nous utilisons les derniers débats (de 2008) sur la révision de l’assurance chômage et insolvabilité (LACI). La 4e révision de l’assurance chômage fédérale renforce en effet le principe de droits qui se conjuguent en fonction de l’âge : une personne au chômage âgée de moins de 25 ans n’a désormais droit qu’à environ 9 mois d’indemnités, mais entre 25 et 30 ans elle a droit à 12 mois, entre 30 et 55 ans à 18 mois, à partir de 55 ans à deux ans et même à 6 mois supplémentaires si le chômage survient dans les 4 ans précédant l’âge légal de la retraite [9]. Le droit à des indemnités de l’assurance chômage pour les personnes sortant de formation et n’ayant donc pas cotisé se conjugue également en fonction de l’âge : il est de manière générale très limité dans sa durée (environ 4 mois). Les indemnités (forfaitaires) versées varient en fonction de l’âge et du niveau du diplôme : elles sont très peu élevées pour les personnes âgées de moins de 20 ans, augmentent ensuite entre 20 et 24 ans, et encore une fois à partir de 25 ans.
Au plan cantonal, nous nous sommes concentrés sur le canton le plus actif au plan législatif en matière de mesures d’insertion des jeunes, le canton de Vaud. Nous utilisons d’une part les débats vaudois concernant la loi sur le Revenu d’insertion (RI), une aide financière destinée aux personnes dont le revenu financier se situe au-dessous d’un minimum vital. Ces personnes doivent s’engager à tout mettre en œuvre pour retrouver une indépendance financière par rapport à l’État et l’aide est conditionnelle au fait de s’engager dans une démarche d’insertion et de suivre des mesures dites d’insertion sociale ou professionnelle. D’autre part, nous avons analysé les débats liés à la mise en place d’un programme d’insertion spécifiquement destiné aux jeunes adultes (FORJAD) développé par le gouvernement vaudois pour permettre aux jeunes majeur·e·s de 18 à 25 ans au RI d’acquérir une formation certifiante. Ce programme cible une catégorie citée par les fonctionnaires du BIT, les jeunes qui sont sortis du système scolaire et ne font pas de formation professionnelle.
Ces débats ont été choisis parce qu’ils sont récents et parce qu’ils évoquent explicitement le problème des « NEET ». Si la catégorie ’jeunes’ est évoquée dès les premiers débats sur l’assurance chômage obligatoire en Suisse (introduite en 1982) (Tabin et Togni, 2013), elle l’est de manière moins systématique (et moins scandalisée) que ces dernières années et la panoplie cantonale de mesures d’insertion en direction de cette catégorie a été considérablement étoffée. Une analyse systématique nous a permis de comprendre quelles sont les normes d’âge du législateur et de dégager les raisons qui de son point de vue justifient l’action en direction de catégories spécifiques (Bourdieu, 1986 ; Commaille, 1994). Les débats parlementaires analysés avaient en effet pour but de produire des lois sociales, qui sont désormais en vigueur et qui peuvent être considérées comme des textes organisateurs qui régulent et structurent les pratiques des agent·e·s (Smith, 2001).
Ces pratiques nous intéressent parce que leur analyse nous permet de mieux mettre au jour les conséquences de la catégorisation par l’âge. C’est pour cette raison que nous avons conduit des interviews semi-directives de personnes qui mettent en œuvre ces programmes, des agent·e·s de l’État qui de par leur fonction même participent à concrétiser les politiques sociales, et donc à constituer le problème posé par les « jeunes sans emploi, ni formation » en tant que tel à partir des solutions qu’ils ou elles mettent en œuvre. Nous avons interviewé dans le cadre de cette recherche 34 professionnel·le·s de l’insertion des jeunes.
Nous avons procédé à une analyse de discours sur leur pratique et non à une observation de leur pratique, une méthode classique en sciences sociales (Olivier de Sardan, 2008). Ce choix est le résultat d’une posture inspirée de la sociologie pragmatique de la critique qui met l’attention sur le langage et le travail d’interprétation des agent·e·s et sur leur capacité à produire des critiques et/ou des justifications acceptables en situation (Boltanski, 2009). Nous nous sommes spécifiquement intéressé-e-s à savoir comment les professionnel·le·s interrogé·e·s reliaient, explicitement ou non, l’âge et les problèmes d’insertion.
Le contenu du matériau empirique a été systématiquement analysé. Nous avons procédé de manière classique par transcription, préanalyse, définition de codes et saturation thématique. Nous avons utilisé pour ce faire le logiciel libre TAMS (Text Analysis Markup System) analyser [10].
Nous allons, à partir de notre matériau empirique, montrer deux conséquences de l’utilisation de la catégorie « NEET ». Nous allons d’abord montrer quel diagnostic politique sur la société cet usage produit et ensuite indiquer la conception de l’intervention sociale qui en découle.
Premièrement, l’usage de l’âge pour construire la catégorie dominante participe à produire un diagnostic politique spécifique sur l’ordre social. Dans une société où tout le monde – sauf accident – passe d’un âge à un autre, qu’une proportion significative d’une cohorte ne puisse pas accéder au statut considéré comme conforme à son âge est, comme on va le voir, le signalement d’une anomie, autrement dit d’un problème dans l’ordre social. Rappelons que, comme nous l’avons montré précédemment, le statut conforme entre la fin de la scolarité obligatoire et l’âge de la retraite est l’emploi, une dizaine d’années au maximum pouvant être consacrées en Suisse à la formation postobligatoire.
L’analyse des débats parlementaires fédéraux et dans le canton de Vaud le montre clairement. La préoccupation des parlementaires concernant le chômage des jeunes est unanime, aucune voix discordante ne s’élève contre le fait de considérer l’absence d’emploi ou de formation de cette classe d’âge comme particulièrement problématique. Le fait de qualifier comme problème l’absence d’emploi des jeunes qui ne sont pas en formation signale que leur position sociale n’est pas conforme à celle qui est attendue à leur âge. La norme dominante de l’emploi à partir d’un certain âge est donc partagée par les parlementaires.
Cette unanimité est partiellement masquée dans les débats car les discours portant sur la responsabilité causale de ce problème sont plus contrastés (Gusfield, 2009). Il ressort en effet des discussions dans les parlements deux explications principales du chômage des jeunes, l’une que nous nommons économique et l’autre que nous nommons morale. Selon l’explication économique, cette catégorie définie par un intervalle d’âge serait la première victime du chômage en cas de crise (surtout par manque d’expérience professionnelle). Elle est par exemple soutenue par le gouvernement fédéral qui affirme que « les jeunes en particulier encourent un risque élevé de chômage en période de faible conjoncture : leur taux de chômage augmente de manière disproportionnée » [11] ou par une parlementaire fédérale issue d’un parti bourgeois qui déclare que « ce sont avant tout les jeunes qui sont touchés par le chômage » (Erika Forster-Vannini (parti libéral-radical (PLR)), 8 juin 2009) [12]. Selon l’explication morale, le chômage des jeunes serait avant tout un problème d’attitude. Un parlementaire fédéral d’un autre parti bourgeois déclare ainsi qu’il ne faudrait pas « éduquer les jeunes en leur disant : ’Si tu as un problème, l’État t’aidera !’ Nous avons besoin de gens qui se positionnent, qui se tiennent debout, flexibles et prêts à faire quelque chose d’autre » (Christoffel Brändli, Union démocratique du centre (UDC), 8 juin 2009) [13]. Un parlementaire cantonal socialiste déclare, quant à lui, qu’« il s’agit de donner aux jeunes une formation plutôt que de continuer à les assister dans une oisiveté subventionnée » (Claude Schwab, parti socialiste (PS), 26 mai 2009) [14]. Mais le plus important pour les parlementaires n’est pas de s’accorder sur les raisons du chômage des jeunes, car il leur suffit de s’entendre sur le fait que c’est un problème dans l’ordre social : une catégorie d’âge ne tient pas le type de rôle socialement attendu d’elle, au sens que Merton (1957) donne à ce terme. Cela suffit pour justifier une intervention de l’État, ce qui est fait aussi bien au plan fédéral qu’au plan cantonal vaudois.
Ce jugement politique sur le problème spécifique que pose l’absence d’emploi à cet âge n’est pas contesté par les 34 professionnel·le·s vaudois·e·s en charge des programmes destinés aux personnes âgées de 18 à 25 ans que nous avons rencontré·e·s. La principale raison de la nécessité pour les jeunes non actifs de trouver un emploi est selon ces 34 professionnel·le·s liée à l’acquisition de l’indépendance, aussi bien par rapport à l’État que par rapport aux parents, qui « bientôt en auront assez [et] ne pourront pas toujours [les] garder aussi à la maison, éternellement, à ne rien faire » (Julie [15], conseillère en insertion dans un centre social régional (CSR)). L’emploi doit donc servir à la décohabitation avec les parents, jugée normale à cet âge.
On trouve dans le discours des professionnel·le·s que nous avons interrogé·e·s un écho à l’explication morale du problème avancée par certain·e·s parlementaires. Si les professionnel·le·s indiquent le plus souvent qu’il « y a très peu de profiteurs […], des vrais profiteurs qui consciemment se disent : ’Moi je vais profiter de l’aide sociale’ » (Christiane, conseillère en insertion dans un CSR), affirmant par exemple qu’il est « très rare [de rencontrer] un jeune qui dit : ’Je ne veux rien faire’ » (Pierre, conseiller en insertion dans un CSR), le fait même qu’ils et elles le signalent montre que, de leur point de vue, cette posture est possible. Une conseillère en insertion le dit d’ailleurs clairement : « Je pense vraiment qu’il y a des jeunes… qui ne veulent rien faire » (Alicia, intervenante dans une mesure d’insertion sociale (MIS)).
Selon les personnes rencontrées, un des problèmes potentiels des personnes de cet âge est que, n’étant pas dans l’emploi et plus dans la formation, elles risquent de devenir oisives. Ainsi, une coordinatrice de mesures relève qu’« il y a des jeunes […] qui nous disent clairement : ’Mais moi, je n’ai pas envie de chercher un boulot. Je suis bien moi comme ça, je fais ce que je veux, je me lève quand je veux, je n’ai personne sur le dos’ » (Séverine, intervenante MIS), tandis qu’une conseillère en insertion affirme que certain·e·s jeunes « font ce qu’ils veulent de leur journée » (Léa, conseillère en insertion dans un CSR).
Les raisons invoquées à ces dispositions jugées problématiques en référence à la norme de l’emploi ou de la formation à leur âge sont pour certaines des personnes qui nous avons interrogées liées à des traits de caractère, autrement dit à la non-acquisition de certaines dispositions. Ce serait une question d’absence de modèle, parce que certain·e·s « n’ont jamais vu leurs parents bosser » (Séverine, intervenante MIS), ou encore parce que « leurs propres parents sont à l’aide sociale, les grands-parents sont à l’aide sociale. Il n’y a plus la notion du travail, de génération en génération » (Alicia, intervenante MIS). Pour d’autres, c’est un échec du système scolaire. Une intervenante pense ainsi que les jeunes sortent « du système scolaire complètement cassés pour certains » (Séverine, intervenante MIS), une autre estime que ces jeunes ont « eu une mauvaise expérience à l’école » (Lisa, conseillère en insertion dans un CSR), un troisième juge que, « pour beaucoup, le système scolaire, c’était traumatisant » (Philippe, intervenant MIS). Qu’elle soit liée aux défauts de la parentalité ou du système scolaire, l’attitude est imputée à un échec dans l’exercice d’un rapport de pouvoir lié à l’âge : l’éducation, familiale ou scolaire, réalisée par des adultes sur les enfants. Cet échec justifie qu’un rapport spécifique de pouvoir soit exercé sur cette catégorie par les agent·e·s de l’action sociale.
L’utilisation de l’âge permet donc non seulement de poser la spécificité du problème social des jeunes par rapport à d’autres catégories de sans emploi, pour lesquelles c’est le plus souvent en Europe la sortie du marché de l’emploi qui est mise en œuvre (Guillemard, 2010), mais encore l’âge de justifier une intervention ciblée sur un groupe minoritaire particulier (Bacchi, 2009). L’ambivalence autour du critère d’âge qui existe pour les chômeurs dit ’âgés’ (Lefrançois, 2012 ; Moulaert 2013) n’a pas cours pour les ’jeunes’.
L’usage de la catégorisation par âge pour construire la catégorie dominante permet de ne pas débattre le fait de concentrer l’intervention sociale sur les jeunes, soit sur un intervalle d’âges. Le traitement social des personnes plus âgées qui sont au chômage fait nettement moins débat en Suisse, et se focalise principalement sur le niveau et la durée des indemnités. C’est dans la normalité non discutée de l’accès à une position à un âge donné que l’intervention sociale trouve sa justification, et non dans des données statistiques alarmantes, l’OCDE estimant le taux de NEET en Suisse en 2009 à 9,3 % de la classe d’âge (15 à 24 ans), soit une augmentation de 1,4 % en 10 ans, le pourcentage de personnes ne finissant pas une scolarité postobligatoire (ISCED 3) ayant quant à lui diminué de 1,4 % durant la même période [16].
L’intervention est ciblée sur un sous-groupe spécifique (et non sur la société en général), ce qui a pour effet de placer le groupe visé (les jeunes) dans une position inférieure et, en exerçant un rapport de pouvoir particulier sur cette catégorie au nom du fait qu’elle ne remplit pas les conditions attendues à cet âge (être dans l’emploi), de renforcer les hiérarchies d’âge qui sont en place. L’usage de la catégorisation par âge individualise l’intervention sociale, puisque l’âge n’est pas pensé comme un rapport social mais comme un moment d’un parcours de vie linéaire, naturalisé par la chronologie. C’est donc sur l’individu uniquement que se focalise l’intervention.
À partir du diagnostic politique que nous avons identifié plus haut (les « jeunes sans emploi, ni formation » comme un problème dont l’État doit se saisir), les parlementaires fédéraux s’accordent dans les débats pour justifier une politique sociale, en ce qui concerne les jeunes, faite de baisse de prestations financières et de mesures individuelles, comme des stages professionnels et des mesures de réinsertion. Pour les parlementaires qui soutiennent l’explication économique du problème, cette politique sociale permettra d’améliorer leur employabilité, c’est donc une réponse à leur position de faiblesse sur le marché de l’emploi ; pour les parlementaires soutenant l’explication morale, elle évitera que ne s’installe le désœuvrement. Dans les deux cas, l’intervention se justifie pour remédier à une position de faiblesse (de statut ou de caractère), et elle se justifie par l’âge des personnes concernées. Elle n’est bien sûr compréhensible qu’en regard des positions normatives auxquelles les jeunes doivent vouloir accéder, l’emploi ou la formation.
Le temps de la jeunesse est considéré par les parlementaires comme un moment du parcours de vie dans lequel il vaut la peine que l’État s’investisse au nom du bien social général. Par exemple, le Conseil d’État vaudois déclare que les mesures d’insertion doivent être considérées comme « un investissement conduisant à terme à une diminution des coûts de l’aide sociale » [17], une représentation partagée par plusieurs parlementaires cantonaux, qui déclarent par exemple que « se donner les moyens de soutenir les jeunes pour qu’ils entrent dans le monde du travail, c’est penser à l’avenir et l’assurer » (Tinetta Maystre, Les Verts, 26 mai 2009) ou qu’« il y a un coût […] mais il y a aussi l’espérance d’une économie à moyen terme, sur la réduction de l’aide sociale » (Claude Schwab, PS, 26 mai 2009). L’argument est également utilisé a contrario, l’investissement ne servant pas à faire des économies, mais à éviter des dépenses supplémentaires, « une véritable bombe à retardement pour l’ensemble de la société » (Pierre Zwahlen, PS, 26 mai 2009). C’est encore une fois l’usage de l’âge pour qualifier une étape du parcours de vie qui permet l’accord entre des parlementaires qui, relevons-le, ont pour leur très grande majorité eux-mêmes accédé au statut dominant – l’emploi. Leur terrain de controverses dans les débats est bien délimité, il touche uniquement le fait d’imposer des contre-prestations, ce qui permet de dire que l’accord sur les points de désaccord (Bourdieu, 2012) est total : le débat ne porte pas sur l’intervention en direction de la catégorie « NEET », seulement sur ses modalités.
L’usage de l’âge permet de justifier le fait de mettre en place des mesures particulières et individualisées pour les jeunes au chômage sans que cela ne soit conçu comme une mesure discriminatoire. Cela démontre que l’âge est bien au cœur de relations de pouvoir : c’est la ’jeunesse’ qui en effet justifie le fait de mettre en place des politiques qui ne sont pas appliquées à l’ensemble des personnes sans emploi. Quelle que soit la raison invoquée (la situation économique, le risque de devenir « réfractaires » à l’emploi [18]…), l’usage de l’âge conduit le Parlement à limiter les indemnités de chômage des jeunes et à mettre un accent particulier sur les mesures d’insertion visant cette catégorie. Ces dispositions sont destinées à encourager l’accès à l’emploi. Les indemnités versées aux personnes âgées de moins de 20 ans sont très basses, celles versées au moins de 25 ans un peu moins : elles ne prennent leur valeur standard qu’à partir de cet âge. La faiblesse des indemnités oblige les parents à trouver le moyen de continuer à entretenir leurs enfants. L’augmentation des indemnités en fonction de l’âge rend compte des valeurs sociales concernant l’indépendance financière des jeunes par rapport à leurs parents, un modèle normatif que l’on retrouve également dans d’autres pays d’Europe continentale (Van de Velde, 2008).
Les professionnel·le·s que nous avons interrogé·e·s estiment également justifiée l’intervention sur cette catégorie. Selon leur discours, les mesures servent autant à garder les jeunes en activité, pour leur inculquer des dispositions conformes en regard de l’emploi, qu’à vérifier qu’ils et elles auront bien envie d’entrer dans l’emploi, donc dans le rôle social attendu d’eux à leur âge. Comme le dit une conseillère en insertion, certain·e·s jeunes « ont juste envie qu’on les pousse un petit peu pour que ça démarre » (Catherine, conseillère en insertion dans un CSR). À cause de leur âge, certain·e·s sont perçu·e·s comme « immatures », pas encore « prêt·e·s » à entrer dans l’emploi : l’intervention sociale n’est pensée dans ce contexte qu’en fonction d’une évaluation de ce qu’il faut mettre en place pour permettre au jeune d’avoir le statut attendu. Pour reprendre la formule utilisée par Pierre Bourdieu (2012), il faut amener les jeunes à « entrer dans le jeu ».
Dans la perspective empirique qui est la nôtre et qui porte attention sur la capacité des agent·e·s à produire des critiques, il nous semble important de relever que certain·e·s des professionnel·le·s que nous avons interrogé·e·s signalent un problème que leur pose cette représentation dominante. Ce problème, en relation avec la parentalité, montre bien que d’autres rapports sociaux s’imbriquent avec le rapport social d’âge. Pour l’essentiel, ils ou elles critiquent le fait que les mères avec des enfants en bas âge doivent s’inscrire comme demandeuses d’emploi. Leur discours repose sur une représentation réaliste, mais sexuée, de la responsabilité de la garde des enfants, les hommes étant invités à choisir une formation et un emploi en adéquation avec un rôle de gagne-pain. Comme le relève un conseiller en insertion à propos d’une formation offerte à une fille, « ça aurait été un mec, qui a la charge d’une famille, avec deux enfants, j’aurais dit : ’Réfléchis bien avant de faire cette école de photographie’ ! » (Marc, intervenant MIS). Une assistante sociale va dans le même sens en soulignant l’importance de ce rôle pour les hommes : « J’en ai suivi quand même pas mal des hommes qui travaillaient à 100 % ; avec le salaire qu’ils avaient à 100 %, ils ne couvraient pas le minimum vital de leur famille dès qu’ils avaient un enfant. » (Clara, assistante sociale dans un CSR). Le rapport à l’emploi des hommes et des femmes est donc conçu différemment par certain·e·s des professionnel·le·s que nous avons interrogé·e·s, confronté·e·s aux normes sociales sexuées de l’emploi et de la parentalité [19].
Les 34 professionnel·le·s interrogé·e·s dans le canton de Vaud ne critiquent toutefois pas le classement par âge comme critère de justification d’une intervention individualisée, sauf parfois quand les bornes fixées par le législateur (18 à 25 ans) ne correspondent pas à leurs pratiques. Ainsi, un des conseillers en insertion explique que « même si le jeune a 17,5 ans, on peut quand même commencer » (Pierre, conseiller en insertion dans un CSR), tandis qu’une conseillère déclare qu’il y a un certain nombre de personnes qu’elle suit « qui ont plus de 25 ans, je crois que le plus âgé a 29 ans » (Eva, conseillère en insertion dans un CSR). Une responsable de mesures d’insertion sociale repousse encore plus loin les limites de l’âge, déclarant que les programmes d’insertion ont également été ouverts « au-delà de 25 ans. Ça veut dire, bon, on a eu même une fois, quelqu’un de 40 ans. Donc, mais cette année, il y a 2-3 personnes… qui ont […] 33, 35 ans, quelque chose comme ça. Et une jeune fille […] qui était mineure, c’est ce qu’on a eu. » (Claudia, responsable de MIS). Le dépassement des bornes supérieures d’âge est justifié par le fait que pour faire un ’bon’ travail d’insertion, il faut beaucoup de temps, davantage parfois que ce que la législation autorise. Ainsi, une conseillère en insertion relève, à propos d’une des situations qu’elle nous présente, que c’est « une intervention vraiment très longue, […] on est sur quatre ans, si ce n’est pas cinq » (Catherine, conseillère en insertion dans un CSR). Une autre conseillère en insertion déclare que « c’est une fourchette qui peut être élargie, qui n’est pas […] immuable » (Clara, conseillère en insertion dans un CSR). Ces propos confirment que c’est bien l’écart entre le rôle social attendu et le rôle social joué à un âge donné qui pose problème et qui justifie l’intervention sociale.
Dans le contexte général de naturalisation de l’âge, la conscience de son caractère socialement construit (les frontières d’âge sont souples) n’aboutit pas à relever les effets sociaux de cette construction, notamment en termes de rapports de pouvoir (Calasanti & Slevin, 2006). Pour le dire autrement, la possibilité de la critique s’achoppe à la doxa concernant l’âge.
Après avoir montré que l’âge n’est pas seulement un outil de classification sociale mais un rapport social fondé sur une figure dominante, nous avons pointé dans cet article deux conséquences principales de l’usage de l’âge. Penser avec l’âge comme catégorie explicative d’une situation sociale conduit d’une part à poser un diagnostic spécifique sur l’ordre social et d’autre part justifie une intervention sociale ciblée sur une catégorie d’âge.
Cette intervention touche pour l’essentiel les personnes âgées de 18 à 25 ans et son but central est de les mettre ou de les remettre sur le marché de l’emploi, c’est donc leur marchandisation ou leur remarchandisation qui est visée (Tabin et al., 2013). L’intervalle défini correspond à un moment particulier du parcours de vie, caractérisé par la dissociation des processus d’autonomie et d’indépendance (de Singly, 2000 ; Garrau & Le Goff, 2010) : les enfants dès 18 ans sont devenus majeurs selon la loi, donc censés être autonomes dans leurs décisions, pourtant les parents ont encore des obligations d’entretien en cas de formation. L’intervalle normal de transition vers le statut d’actif depuis la fin de la scolarité est d’une dizaine d’années au maximum. La cible repose donc sur une série de croyances concernant le développement individuel, fondées notamment sur l’hypothèse selon laquelle le caractère – et la relation à l’emploi – se forme durant cette période de la vie (Bacchi, 2009). Ces croyances sont notamment que le fait d’appartenir à la catégorie 18-25 ans et de n’être ni en emploi, ni en formation, justifie un supplément d’attention en raison de l’âge des personnes concernées et c’est la raison pour laquelle cette intervention n’est pas considérée comme discriminante, contrairement à d’autres politiques fondées sur l’âge (Caradec, Lefrançois et Poli, 2009).
Fonder des politiques sociales sur l’âge a pour effet de subsumer dans une seule catégorie des univers sociaux très différents (Bourdieu, 1984) et, dans le cas des NEET, uniquement en fonction de ce qu’ils ou elles ne sont pas (Yates & Payne, 2006). Les chances d’accéder au statut social perçu comme normal à un âge donné sont pourtant réparties de manière très inégale dans la population. Ainsi l’origine sociale, le sexe ou la nationalité ont un impact sur les parcours de formation des personnes. En Suisse, seuls 8 % des enfants dont les parents n’ont aucune formation postobligatoire atteignent le niveau universitaire, contre 39,7 % des enfants dont les parents ont une formation universitaire. Si 10,5 % des élèves ne commencent pas de formation à la suite de leur scolarité obligatoire, les personnes de nationalité étrangère sont 15,5 % à être dans ce cas alors qu’il ne concerne que 9,6 % des personnes de nationalité suisse. Les filles sont 13,7 % à ne pas commencer de formation à la suite de leur scolarité obligatoire, les garçons seulement 7,5 %. À l’autre bout de l’échelle de formation, 26,7 % des élèves entrent dans un cursus menant à des études de type universitaire, mais seulement 22,5 % des garçons (contre 31,3 % des filles) et 21,3 % des personnes de nationalité étrangère (contre 27,9 % des personnes de nationalité suisse) [20]. Ces quelques chiffres indiquent non seulement que la catégorisation par âge rassemble des groupes sociaux très différents, mais encore que le statut normal associé à chaque âge (notamment celui de l’âge actif) n’est pas atteignable de manière universelle.
La catégorisation par l’âge uniquement a pour conséquence que cette impossibilité est pour l’essentiel imputée à l’échec du processus de transition. Elle permet un tri entre personnes intégrées, en processus d’intégration ou exclues, et limite la réflexion sur la norme dominante, celle de l’emploi. Le fait de mettre l’accent sur le seul accès à l’emploi empêche également la remise en question de l’hétérogénéité des positions au sein de la position dominante, en raison de la diversité des formes d’emploi, de la hiérarchie des fonctions et des inégalités salariales.
C’est la raison pour laquelle nous en appelons à renforcer la recherche sociologique dans le domaine de l’accès à l’emploi en prenant explicitement en compte l’imbrication du rapport social d’âge avec d’autres rapports sociaux. Nous avons abordé dans cet article l’incidence de la corrélation entre âge et genre – les femmes étant au même âge considérées comme plus vieilles que les hommes (Martin et Perrin, 2012 ; Twigg, 2004) – sur les normes concernant l’emploi à un âge déterminé, ce sont des recherches qu’il faudrait poursuivre. Différents travaux ont montré que l’intersection entre les rapports sociaux d’âge et de sexe produit des inégalités spécifiques par rapport à l’emploi (Ainsworth, 2003 ; McMullin & Marshall, 2001 ; Ann McMullin & Berger, 2006), mais les conséquences de l’intersection des rapports sociaux d’âge et de sexe avec les rapports sociaux de classe ou de race sont encore trop peu explorées. Il serait par exemple utile de comprendre en quoi les normes de l’emploi à un âge donné sont différentes pour les femmes immigrées, les hommes des classes populaires ou les femmes des classes supérieures.
Contrairement à ce que certains scientifiques ou juristes professent, qui affirment que « chacun d’entre nous, au cours de sa vie, serait amené à faire partie successivement de la catégorie avantagée et de la catégorie désavantagée (ou inversement) » (Gosseries, 2009 : 51), la normativité du passage d’un âge à un autre est donc relative aux groupes sociaux et aux contextes dans lesquels elle s’inscrit, ce n’est pas seulement un « point sur une échelle ». L’âge n’est donc pas une variable indépendante.
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[1] Le propos tenu par les fonctionnaires du BIT peut être considéré comme typique de la représentation actuelle concernant les jeunes et l’emploi, puisqu’il émane d’une institution internationale représentant le patronat, le salariat et l’État. Le même type de discours sur les NEET est tenu par d’autres instances internationales, comme l’OCDE (par exemple : OECD Employment Outlook 2012, www.oecd.org, page consultée le 18 octobre 2013).
[2] Les données empiriques sur lesquelles reposent cet article sont issues d’une enquête menée dans le cadre du Pôle national suisse de recherche LIVES Surmonter la vulnérabilité : perspective du parcours de vie (projet N°5) : www.lives-nccr.ch
[3] Ou également de Singly, 2000 ; Galland, 2009.
[4] http://stats.oecd.org. Chemin : Labour, Labour force statistics, LFS by sex and age – indicators, rapport emploi/population (page consultée le 18 octobre 2013).
[5] L’analyse repose sur les données du Panel suisse des ménages de 2002. Ajoutons que selon l’OCDE, plus de huit hommes sur dix (81%) sont en emploi entre 25 et 64 ans, mais seulement 62 % des femmes. 94% des hommes de 25 à 54 ans travaillent à temps plein, contre 70% des femmes (http://stats.oecd.org. Chemin : Labour, Labour force statistics, Full-time and part-time employment, FTPT employment based on a common definition (page consultée le 18 octobre 2013).
[6] Si l’on se réfère au MISSOC (Mutual Information System on Social Protection), www.missoc.org, la plupart des pays de l’Union européenne et de l’Association européenne de libre-échange ont prévu des mesures spécifiques pour les ’chômeurs âgés’ et pour les ’jeunes chômeurs’ (Tabin et Enescu, 2012).
[7] www.ntaccounts.org. Les calculs sont fondés sur le rapport entre le revenu de l’emploi et la consommation.
[8] Cela ne signifie pas, comme l’explique Carol Bacchi, qu’il y ait manipulation ; c’est simplement le rôle du politique de proposer des solutions à des problèmes, et donc de construire les problèmes en tant que tels.
[9] Article 27 de la Loi fédérale sur l’assurance chômage et insolvabilité.
[10] http://tamsys.sourceforge.net
[11] Conseil fédéral. (3.09.2008). Message relatif à la modification de la loi sur l’assurance chômage. Feuille fédérale, 38, 7029-7077, p. 7054.
[12] Loi sur l’assurance chômage. 4e révision. Bulletin officiel du Conseil des États, p. 569.
[13] Loi sur l’assurance chômage. 4e révision. Bulletin officiel du Conseil des États, p. 570.
[14] Toutes les références au bulletin du Grand Conseil vaudois se trouvent à l’adresse : www.vd.ch/autorites/grand-conseil/bulletin-du-grand-conseil.
[15] Tous les prénoms sont fictifs.
[16] www.oecd.org/els/emp/scoreboard%20EN.xlsx (page téléchargée le 18 octobre 2013).
[17] Canton de Vaud. (mai 2003). Exposé des motifs et projet de loi sur l’action sociale vaudoise (LASV), p. 28.
[18] Commission de la sécurité sociale et de la santé publique. (11.05.2009). Procès-verbal, Loi sur l’assurance chômage. 4e révision, p. 8.
[19] Le politique au plan fédéral est d’ailleurs partiellement sur la même longueur d’onde, puisque les personnes qui ont charge d’enfant(s) sont indemnisées par l’assurance chômage, même si elles sont plus jeunes, comme celles de plus 25 ans. Le fait d’avoir des prestations plus élevées pour les parents est d’ailleurs une tradition de l’assurance chômage helvétique (Tabin et Togni, 2013) : c’est le modèle de l’homme gagne-pain qui les a justifiées.
[20] Source : Office fédéral de la statistique.
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