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Jouhaud Etienne

Erasme, ou les ambiguïtés de l’engagement européen de Stefan Zweig

 




 Résumé

L’Europe de l’entre-deux guerres était tenaillée par l’angoisse de sa propre fin. Alors que le premier conflit mondial l’avait ruinée, la place toujours plus grande que prenaient les dictatures dans le champ diplomatique demandait aux intellectuels de s’engager. Parmi eux, Stefan Zweig a longtemps hésité. De ses doutes est sorti un livre :Erasme, grandeur et décadence d’une idée, qui devait lui permettre d’investir le débat, tout en conservant son intégrité sur le plan idéologique. Car le biographe a découvert chez l’humaniste ce même besoin de liberté qui l’inspire et qui est pour lui le seul moyen raisonnable pour construire l’Europe future, celle en faveur de laquelle il ne cesse de s’opposer à l’obscurantisme.

Mots-clefs : Europe, engagement, intellectuel, totalitarisme, idéologie

 Summary

Erasmus, orthe ambiguity of Stefan Zweig’s european commitment

Between the two world wars, Europe was racked with the anxiety of her own death. While the first world conflict has ruined itself, the still growing place which tyranny took in the diplomatic relations demanded the intellectuals to commit themselves. Among them, Stefan Zweig hesitates for a long time. With hisdoubts he wrote a book entitled :Erasmus, and the right of Heresy, which normally would permit him to enter the debate, keeping his integrity as regards the ideology. Because the biographer found that the humanist needs liberty as much as him, that same necessity that inspire him and which is for him the only reasonable means for constructing future Europe, the one for which he does not stop to fight against obscurantism.

Keywords : Europe, commitment, intellectual, totalitarianism, ideology

 Introduction

En 1919, les militaires et chefs d’Etats qui signèrent le Traité de Versailles se partageaient un continent de ruines. La chute d’Empires pluriséculaires comme celui des Habsbourg ; la faillite des nationalismes, concept jusque là porteur des idéaux politiques ; la perte, en outre, tant au niveau politique, militaire qu’économique, de la situation hégémonique de l’Europe sur le plan mondial, auront fait vaciller une confiance occidentale jusque là jamais ébranlée. Dans le marasme de l’après-guerre, Paul Valéry écrira ainsi avec amertume : « nous autres civilisations, nous savons désormais que nous sommes mortelles » [1]. De fait, ce qui prévaut au cours de ces années n’est autre qu’un sentiment d’irrémédiable décadence de la puissance symbolique européenne. La folie dansante et créatrice des années 1920 elle-même, peut être perçue comme l’exhibition effrénée de l’angoisse existentielle qui étreint alors cette civilisation. Le mythe décliniste se voit même théorisé par Oswald Spengler, dans un ouvrage qui eut un certain retentissement à l’époque :Le Déclin de l’Occident. L’Europe de cette première moitié de siècle est donc plongée dans ce que Husserl appelle une « contradiction existentielle pénible » [2]. Or celle-ci, à mesure que passaient les années qui la séparaient d’un second conflit, n’a fait que s’accentuer. Car l’expansion des nationalismes, qui tâchaient de redorer les blasons patriotiques en faisant appel à des passés mythiques, n’était bien sûr pas à même de canaliser les aspirations de tout un continent. Au contraire, l’Europe poursuivait son irrémédiable morcellement et le développement du discours national, crispé sur les valeurs intemporelles qu’il croit fondatrice du « génie occidental », allait progressivement mener ce continent à sa perte.

Cependant, face à la périlleuse montée des ferveurs nationales, un certain nombre d’intellectuels et d’hommes politiques de tous bords, prenant en compte l’écueil que constituait l’Europe fractionnée des Etats, ont eu l’ambition de penser une structure commune qui aurait permis de pallier les lacunes des politiques précédentes. D’une certaine manière, on pourrait dire qu’ils ont cherché à donner corps à l’utopie qui agite toute la pensée européenne depuis l’humanisme renaissant, à savoir doter l’espace européen d’une cohérence au moyen d’un appel à la paix sans cesse renouvelé. C’est ainsi que, pour répondre à l’impasse des extrémismes nationaux naît peu à peu l’idée qu’il pourrait exister un destin commun à tous les citoyens des Etats européens. Le comte de Coudenhove-Kalergi écrit ainsi dans son essaiPan-Europe paru en 1923 :« l’Europe dans son morcellement politique et économique, peut-elle assurer sa paix et son indépendance face aux puissances mondiales extra-européennes, qui sont en pleine croissance ? Ou bien, sera-t-elle contrainte, pour sauver son existence, de s’organiser enfédération d’Etats ? Poser la question, c’est y répondre » [3].Aristide Briand quand il a prononcé son discours devant la Société des Nations à Genève, en 1929, ne faisait que tenter de donner une assise politique à un tel projet. On a qualifié ces esprits d’« européistes » [4]et certains se sont même investis dans un mouvement « pan-Europe », fondé par Coudenhove-Kalergi en 1923 [5]. C’est ainsi que, par un mouvement inverse à celui de l’histoire immédiate, des intellectuels européens anticipaient les conclusions de la guerre à venir. Benedetto Croce explique ainsi ce paradoxe : « la guerre mondiale [la première] – que les historiens futurs considèreront peut-être comme la réduction à l’absurde de tous les nationalismes –, si elle a aigri certains rapports entre les Etats à cause de l’unique et sot traité de paix qui l’a close, a du moins établi une conscience commune des peuples qui se sont sentis, et qui se reconnaîtront toujours mieux dans les vertus et dans les erreurs, dans les forces et dans les faiblesses, soumis à une même destinée, soupirant après les mêmes amours, tourmentés par les mêmes douleurs, fier du même patrimoine idéal » [6].

Mais, en considérant les écueils que présentait le projet de construction d’une Europe politique, certains écrivains de l’époque vont d’abord chercher un fondement historique à leur action. Se plongeant dans leur passé, ils vont découvrir des figures ou des périodes de l’histoire occidentale durant lesquelles des hommes ont cherché, eux aussi, à fédérer les Etats dispersés. Tentant de construire ce « patrimoine idéal » dont parle Croce, un intellectuel comme Stefan Zweig cherchera ainsi son inspiration auprès des hommes mêmes qui ont conçu le patron de l’homme de lettres européen : les humanistes de la Renaissance. A leur contact, il trouvera les moyens de répondre aux impératifs que réclame le débat de son temps. En effet, en rédigeant sonErasme, grandeur et décadence d’une idée [7],en 1933, alors que le nazisme prend son essor, Zweig se pose en défenseur des valeurs humanistes d’un continent menacé. Plus encore, en associant la figure de l’humaniste à un discours pro-européen, il ancre définitivement dans l’imaginaire politique occidental une dialectique reposant sur une logique binaire selon laquelle : Europe = paix, culture et humanisme ; tandis que Nationalisme (et plus encore totalitarisme) = guerre, abandon du libre arbitre et de la liberté individuelle.

Le projet biographique de Zweig semble donc fortement influencé par le contexte dans lequel il a été pensé. Il ne s’agit pas tant pour l’auteur d’écrire une biographie objective de l’humaniste de Rotterdam, que d’exorciser ses propres peurs et de répondre aux critiques de ses amis écrivains engagés plus frontalement face au Reich naissant. D’ailleurs, son « Erasme » est d’abord une « idée », comme le laisse entendre la traduction française du titre. En ce sens, Stefan Zweig tente moins de peindre avec précision l’univers chaotique des lettrés de laRenaissance qu’il ne s’engage pour une cause, celle de l’humanisme en péril. L’écriture de ce livre répond donc à la fois à un objectif littéraire, mais aussi personnel et politique : le passé de l’Europe érasmienne trouve là des correspondances avec le présent de l’auteur autrichien. Le texte peut ainsi s’inscrire dans le débat idéologique européen des années 1930.

 Erasme, figure européenne ?

Pour montrer en quelle mesure la figure d’Erasme sert le projet de Zweig, il est encore nécessaire d’apporter quelques éléments sur le contexte historique dans lequel l’humaniste se mouvait. Il sera ainsi possible de mettre en lumière les anachronismes, volontaires ou non, du biographe. Ce que l’on peut toutefois dire au préalable, c’est que l’Autrichien aura permis à la figure d’Erasme de Rotterdam, ce « prince de la République des lettres » tel qu’on le nommait à la Renaissance, de sortir un peu de l’anonymat des cabinets universitaires. En effet, avant la parution de l’ouvrage de Zweig, l’humaniste était surtout connu des spécialistes. Pourtant, l’Autrichien ne choisit pas cette personnalité au hasard. Car la figure d’Erasme était volontiers liée à l’idée de cosmopolitisme contre laquelle s’acharnait le discours nationaliste. Par ailleurs, les relations qu’Erasme entretenait avec nombre d’humanistes à travers l’Europe, facilitées par l’usage du latin, ont fait de lui le centre symbolique de l’antiquelatinitasen reconstruction, le centre d’un embryon d’Europe culturelle. Ce que Zweig recherche donc chez l’humaniste, c’est sa position dans le paysage des hommes de lettres de l’Europe renaissante. Car avec lui on assiste à la création d’une république lettrée qui se situe au-dessus des frontières politiques et qui en appelle au rassemblement des peuples face aux guerres intestines qui minent le continent. Zweig revient sur cette période avec une fascination manifeste : « durant une heure merveilleuse l’Europe est unie par un rêve de civilisation commune, qui, grâce à une unité de langue, de religion et de culture, devrait mettre fin à l’antique et funeste discorde. Le souvenir de cette inoubliable tentative restera éternellement lié à la personne et au nom d’Erasme. Car ses idées, ses désirs et ses rêves ont dominé l’Europe pendant un moment de l’Histoire » [8]. L’Autrichien voit donc dans le règne tout spirituel d’Erasme un moment fondateur de l’histoire européenne.On perçoit dès lors que cette quête de l’union humaniste est à même de servir de palliatif à l’angoisse qui monte chez le biographe de voir le continent se fragmenter à nouveau.

Erasme,en outre, est un personnage engagé dans les polémiques de son temps. Il multiplie les publications pacifistes :La Guerre est douce à ceux qui ne l’ont pas faite, L’Institution du prince chrétien, La Complainte de la Paix…Il se fait aussi le conseiller desprinces ou devient une sorte de médiateur (pour un temps seulement), entre l’Eglise et Luther. Et c’est cette figure d’homme investi dans les affaires de son époque que recherche visiblement Stefan Zweig. Il paraît donc aussi bien choisir Erasme parce qu’il est l’instigateur d’une révolution spirituelle européenne que parce qu’il incarne la figure d’un « militant pacifiste » aux pieds de laquelle, à l’évidence, il se ressource.

Seulement le travail de Zweig, à force d’enthousiasme, n’évite guère l’anachronisme. Car l’Europe n’existe pas encore dans l’esprit d’Erasme. Pour lui, l’Europe n’est qu’un lieu géographique qui se confond simplement avec l’idée mystique de la Chrétienté. Il ne reconnaît pas de frontières internes à cet espace parce que, selon lui, tous les peuples d’Europe sont chrétiens et que tous les chrétiens doivent être frères.Ainsi, lorsque Erasme en appelle à la paix entre les Etats, il ne prononce pas le mot « Europe ». Son point de vue est d’abord religieux : ce qu’il vise c’est la refondation utopiste de laChristianitas. Il porte avant tout un regard de moraliste sur la société, même s’il propose, dans saComplainte pour la Paix, un embryon de réflexion politique [9]. De fait, face à la difficulté qui se présente à lui de parvenir à créer un espace uni par la culture et la raison diplomatique, Erasme ne trouve que dans la religion le moyen de solidifier son appel à une concorde européenne : « Que me reste-t-il sinon la religion, qui s’offre à moi comme la seule ancre de salut ? » [10]. Or Zweig, le juif – alors même que le discours d’Erasme avait parfois des relents antisémites – ne se formalise pas d’un tel discours. Au contraire, le propos chrétien s’intègre pour lui à un discours plus général sur les valeurs humaines. Il semble ainsi que les échecs ou les ambiguïtés de la personnalité d’Erasme soient tellement entrés en résonnance, au moment de l’écriture, avec la position qu’occupe Zweig parmi les intellectuels des années 1930, que le biographe n’a retenu de son héros que ce en quoi il pouvait se retrouver, ou ce qui pouvait servir son projet.

 De la biographie romancée à l’autobiographie 

Car l’Europe des lettrés d’Erasme ressemble assez à celle de Zweig, qui aimait, dans son chalet de Salzbourg, réunir tout ce que l’Europe cultivée comptait d’illustre. Et c’est vraisemblablement avec une certaine nostalgie qu’il évoque l’époque de son aîné. La manière dont il a rendu compte de l’existence de l’humaniste n’est d’ailleurs pas sans rappeler son quotidien d’intellectuel raffiné :« En somme, Erasme n’a jamais vécu au milieu des peuples ni des nations, mais au-dessus d’eux, dans une atmosphère subtile, éthérée […] » [11].Ce qui semblecaractériser le mode de vie d’Erasme et de ses amis humanistes, aux yeux de Zweig, c’est une forme de repli sur soi, de confort intellectuel sans conséquence. Or, Zweig lui-même se conçoit comme un esthète, aussi attaché à sa collection d’autographes qu’Erasme pouvait l’être à sa bibliothèque ; appréciant le contact de ses semblables lettrés, comme Erasme répugnait à sortir de ce même cénacle de privilégiés.Plus encore, il semble s’être reconnu une communauté de destin avec l’humaniste. Comme lui, l’humaniste de Rotterdam est apatride : son pays, les Provinces Unies, n’a pas de réelle existence politique depuis la chute du duché de Bourgogne, comme l’Autriche de Zweig n’était, en 1933, plus qu’un souvenir.

En ce sens,Erasmeconstitue un point important dans la carrière biographique de Zweig, puisque celui-ci assimile dans une certaine mesure son propre destin à celui de son héros.Freud lui fit même remarquer que, « pour le biographe comme pour le psychanalyste, il y a en effet des phénomènes que l’on qualifie de “transferts” » [12]. Sa démarche dépendrait donc moins d’une nécessité scientifique, que personnelle.Il ne s’en cache d’ailleurs pas et écrit dans son autobiographie :«  […] je me suis disposé à écrire mon œuvre la plus personnelle, au même degré que mon « Erasme », dans lequel, en 1934, aux jours de Hitler, je luttai pour me relever et surmonter une crise comparable. Dès l’instant que j’essayai de donner forme à la tragédie de mon temps, je n’en souffris plus aussi cruellement  » [13].Compte tenu de la situation historique dans laquelle lui-même se trouve, Zweig a trouvé salutaire d’écrire un essai sur l’humaniste parce que, selon lui, tous deux défendent les mêmes valeurs. Erasme fait ainsi figure d’allié dans la lutte toute spirituelle que l’Autrichien a entamée contre le nazisme. Et même si cette démarche relève plus de lacatharsisque de l’engagement réel, Erasme vient opportunément incarner le combat européen de Zweig, qui recherche visiblement auprès d’une figure tutélaire un réconfort que lui refusent ses amis lettrés. A ce titre, le parallèle que nous pouvons établir entre deux passages, l’un tiré de sa biographie de l’humaniste, l’autre de son autobiographie, est éloquent. Ainsi écrit-il, décrivant la fin du grand humaniste :« l’histoire ne pouvait nous offrir de symbole plus grandiose de l’homme du juste milieu qui ne plaît nulle part parce que nulle part il ne veut prendre parti[…]. L’esprit libre, indépendant, qui ne veut se lier à aucun dogme ni se décider en faveur d’aucun parti, n’a pas de foyer sur terre » [14] ; etdans son autobiographie :« c’est ainsi que je n’ai plus ma place nulle part, étranger partout, hôte en mettant les choses au mieux ; même la vraie patrie que mon cœur s’est choisie l’Europe, est perdue pour moi depuis pour la seconde fois, courant au suicide, elle se déchire dans une guerre fratricide  » [15].On le voit, Freud n’avait pas tort : Zweig se livre, et d’une manière à peine voilée, dans son labeur de biographe. Même solitude absolue, même volonté d’indépendance et, au final, même sort tragique : l’auteur établit de nombreuses passerelles entre lui et sonpersonnage. La biographie préfigure l’autobiographie qui ne sortira qu’en 1942, comme si Zweig, en 1933, hésitait encore à parler de lui ouvertement. Mais son travail lui permet aussi de se positionner comme un héritier spirituel d’Erasme. Ce faisant, il se construit une prestigieuse ascendance qui lui sert autant à donner corps à ses aspirations qu’à légitimer sa position dans le paysage intellectuel de son temps.

Sa situation difficile ressemblait en effet, pensait-il, à celle d’Erasme : lui aussi devait maintenir un équilibre, être l’homme du juste milieu, de l’humanisme, lui aussi devait essayer de comprendre les partis opposés sans perdre son impartialité. Avec sonErasme, il cherchait ainsi à donnerune place à l’intellectuel au sein de la société. Il en faisait le patron et lui attribuait un rôle décisif :« pour Erasme, en face des politiciens, des chefs, et des meneurs au sectarisme passionné, l’attitude de l’artiste, du penseur, ne peut être que celle d’un médiateur intelligent, d’un ami de la mesure et du juste milieu. Son devoir n’est pas de se ranger sous une bannière, mais de lutter seul contre l’ennemi commun de la libre pensée : le fanatisme, sous toutes ses formes, et cela non pas à l’écart des partis, […] mais au-dessus d’eux, au-dessus de la mêlée […] » [16].Ainsi,choisir de relater la vie et les combats d’Erasme, c’est aussi inscrire la figure de l’intellectuel dans l’histoire sous la forme d’un Don Quichotte qui ne peut avoir d’attrait que pour l’humain en son entier et qui se tourne résolument vers l’idéal. Voici donc réactualisée la figure de l’humaniste, forcément grande parce que forcément généreuse, et dont la beauté n’existe que parce qu’elle se rapproche de l’utopie. On comprend que Zweig n’est pas du côté du pragmatisme. Or, cet idéalisme, c’est précisément ce qui a lui valu une égale animosité de toutes parts [17]. En peignant l’artiste sous les traits d’un affranchi qui rejette consciemment toute forme d’idéologie, il s’est volontairement mis en marge du débat politique du début des années 1930. Car Stefan Zweig entendait surtout défendre un concept intemporel qu’il croit hériter d’Erasme –das Erasmische [18]– et qui caractérise l’attitude fière et solitaire de l’intellectuel qui choisit le juste milieu. Mais il a surtout eu une attitude assez ambiguë face à la montée du nazisme, attitude qu’il a eu du mal à expliquer ; et il souffre de la solitude dans laquelle le laissent ses amis et compatriotes germanophones plus engagés. Il est ainsi manifeste que l’écriture de son texte dépend moins d’une pure admiration pour l’esprit renaissant, que des conditions dans lesquelles Zweig se trouve en 1934.

Le biographe chercherait plutôt à expliquer ses atermoiements, en leur donnant naïvement une assise historique : il ne fait, dit-il, que ce que les vrais humanistes avant lui ont fait.Car la posture mélancolique du solitaire, telle que Zweig la perçoit chez son illustre aîné, va devenir un argument qui lui permettra de répondre aux critiques parfois virulentes de sescontemporains, consternés par son manque d’implication devant la montée de l’hitlérisme. Ce stratagème n’a cependant pas vraiment convaincu l’intelligentsiahitlérophobe. Car ses contemporains ont bien vite compris que c’était aussi son propre portrait qu’il esquissait sous les traits de l’humaniste de Rotterdam et ils y ont vu une forme quelque peu dérisoire d’engagement. Joseph Roth ou Klaus Mann l’invectivent même directement. Le premier l’invite ainsi à prendre position vis-à-vis de l’Allemagne nazie [19]. Mais le second témoigne plus ouvertement de son incompréhension et de son opposition au relativisme de Zweig [20]. De ce point de vue, la défense de l’Autrichien semble bien contradictoire lorsqu’il prône, pour lutter efficacement contre l’hitlérisme – et contrairement aux émigrés qui offrent leurs articles à laSammlungdu jeune Mann – une forme d’expression plus élevée et plus subtile susceptible d’être diffusée en Allemagne même, alors qu’il n’estime pas que sonErasmus, qui pourtant répondait à une telle exigence, puisse être publié dans le Reich, au-delà d’un cercle d’amis choisis, en outre déjà convertis [21]. Si bien que Zweig explique que son livre est, à sa manière, un engagement, mais qu’il ne veut pas que ce même ouvrage puisse servir l’ouverture des consciences dans l’Allemagne d’Hitler, c’est-à-dire qu’il puisse passer pour un acte engagé ! En fait, il semble que, en tant qu’auteur, il redoutait les critiques qu’il savait l’attendre.Or, il ne pouvait envisager la mise au ban de l’intégralité de son œuvre.Mais il est manifeste que l’écrivain autrichien a surtout commis des erreurs d’interprétation face à la montée nationale-socialiste. Dans une situation difficile, indécis, Zweig a donc cherché dans le passé les moyens de se justifier, face à des intellectuels qui s’engageaient plus directement et choisissaient l’exil pour mieux s’opposer.

 De l’autobiographie à l’engagement ?

Pour autant, et quoiqu’aient pu en dire ses contemporains, le projet de Stefan Zweig revêt un certain intérêt. Bien sûr, son rejet de l’engagement frontal le met en marge de toute une partie de la société intellectuelle. Mais il n’en prend pas moins parti pour une certaine idée de l’humanisme et de la mission que l’homme de lettres et, par extension, l’Européen, conserve vis-à-vis du reste du monde. Dans cette perspective, la construction d’une Europe politique, telle qu’elle fut suggérée par Briand en 1929, restant encore inconcevable, Stefan Zweig, a l’intuition que l’union passe d’abord par la revendication d’une culture européenne qui dépasserait les frontières nationales. Ainsi entreprend-il lui-même de doter l’Europe d’unehistoire culturelle. Le très grand nombre de ses biographies romancées démontre suffisamment sa volonté de créer une filiation. Au travers de l’œuvre consacrée à ceux qu’il appelait :Die Baumeister der Welt, les bâtisseurs du monde, Zweig ébauche un panthéon personnel des grandes figures de l’histoire européenne. Ces biographies romancées, qui ne servent souvent qu’à faire un éloge de l’humanisme, intègrent ainsi un plan idéologique.

D’ailleurs, sonErasmusest moins un être de chair et d’os qu’une « idée »,c’est-à-dire une construction signifiante à laquelle renvoie un ensemble de valeurs. La figure d’Erasme, telle que Zweig la présente, se trouve ainsi associée à l’image du penseur-censeur de la société dans laquelle il vit. OrErasmus, il est intéressant de le noter, est la figure historiquement la plus éloignée de ses biographies (viennent chronologiquement après Erasme, Marie Stuart, Castellion ou encore Montaigne). Selon lui, l’humaniste de Rotterdam est en effet le premier à prendre conscience du nouvel espace culturel que constitue l’Europe, mais il est également un personnage fondateur d’une certaine idée de l’homo intellectualis. Ce faisant, Erasme a institué un double paradigme – européen/intellectuel – qui perdure encore aux yeux du biographe au XXe siècle. En mêlant de la sorte les valeurs humanistes aux valeurs et devoirs de l’être européen, celui-ci assimile totalement l’humanisme à l’idée européenne. Or pour Zweig, qui voit croître sans cesse le danger nazi, c’est justement à l’humaniste, donc à l’Européen véritable, de souligner ce qui, au-delà des clivages, rapproche les peuples, de proposer un contre-modèle : « au lieu d’écouter les vaines prétentions des roitelets, des sectateurs et des égoïsmes nationaux, la mission de l’Européen est au contraire de toujours insister sur ce qui lie et ce qui unit les peuples, d’affirmer la prépondérance de l’européen sur le national, de l’humanité sur la patrie […] » [22]. Zweig fait ainsi d’Erasme, par-delà le seul portrait du lettré, l’incarnation de l’Européen et de la mission qui lui incombe. Ce faisant, il donne un corps à l’être européen en même temps qu’il le dote d’un rôle : favoriser les projets d’union. Il confère ainsi à l’utopie européiste une généalogie et, par extension, il la légitime.

Zweig ne rejette donc pas l’idée selon laquelle l’homme de lettres doit participer aux affaires du monde. Mais il y a pour lui une autre façon de s’engager que de le faire sous la bannière de l’idéologie. Il n’amoindrit donc pas le rôle que les intellectuels ont vis-à-vis de la société, il suggère simplement une autre voie. A ce titre, il est stimulant de voir que, pour lui, cette république fortement unie des humanistes du XVIe siècle a d’abord ceci d’intéressant qu’elle a les moyens de devenir un contre-pouvoir :« grâce à Erasme, il existe en Europe une puissance nouvelle : celle de la plume » [23]. Ce que Zweig retient d’Erasme et du mouvement qu’il incarne c’est cet esprit de liberté qui fit de l’humanisme le père de l’intellectualisme futur.Avec l’humanisme, la « plume » devient un contrepouvoir en elle-même, parce qu’elle s’oppose à toute limitation de la pensée. Conservant une totale indépendance d’esprit, le rôle de l’intellectuel est de s’élever contre l’iniquité d’un pouvoir aux ambitions bellicistes :« [Erasme] a été en effet, de tous les écrivains et auteurs occidentaux, le premier Européen conscient, le premier “combattant pacifiste” […]. Et s’il a été vaincu dans sa lutte pour une organisation plus équitable, plus rationnelle de notre monde spirituel, ce sort tragique ne fait que resserrer les liens de fraternité qui nous unissent à lui  ». [24]La richesse des hommes de lettres réside dans leur idéalisme, et c’est paradoxalement la défaite des idéaux qui fonde la continuité historique de ce mouvement.Zweig défend donc l’héritage d’Erasme. Mais il voit dans l’inachèvement de son combat pacifiste son legs le plus important. Or cette volonté permanente d’établir des passerelles entre le passé et le présent, de montrer que pacifisme et pensée ne font qu’une seule et même chose sous entend que l’auteur se voit au service d’une cause plus qu’il ne cherche à faire œuvre d’historien.

Zweig, tend en effet à assimiler culture et combat politique : il fait d’ailleurs de l’humaniste un éternel combattant en butte à tous les extrémismes. Mais en laissant entendre que l’intellectuel est un réfractaire par essence, il semble suggérer qu’il n’y a pas de nécessité pour lui de s’investir plus qu’il ne le faudrait dans le champ politique. Car, si le penseur a raison sur le long temps, à court terme, son combat est toujours voué à un sort tragique. Ainsi, en revendiquant cette généalogiea posteriori, Zweig veut démontrer que, depuis que l’Europe spirituelle existe, elle ne se donne pour autre conduite que l’indépendance voire même la solitude. L’Europe, qui, depuis le XVIe siècle, demeure un rêve, ne peut être défendue que par des utopistes. Mais ce qu’il défend là semble être une conception assez ancienne de l’engagement, une conception qui n’est plus celle des hommes de lettres du début du XXe siècle. Si bien que l’on pourrait presque prétendre que, s’il est à ce point rejeté par ses collègues, c’est parce qu’il porte un regard plein d’anachronismes sur la mission de l’intellectuel. Il serait alors plus juste de dire que, pour Zweig, un auteur demeure un « homme de lettres » qui n’aurait jamais fait sa mue d’intellectuel, dans le sens où ce dernier terme demeure indissociablement lié à l’idée d’engagement volontaire. Sur ce point, il est caractéristique que l’Autrichien ait décidé de transcrire avec plus ou moins de légitimité et plus ou moins de bonheur, les combats de son temps dans une époque aussi éloignée que la Renaissance. L’opposition entre le cosmopolitisme humaniste d’Erasme et lenationalisme germaniste et le fanatisme religieux de Luther,qui fait logiquement le fond du livre y trouvait en effet une résonance avec sa propre situation, mais elle lui permettait aussi d’évoquer sonprésent sans s’y impliquer totalement. Il écrit ainsi à propos de Luther : « Luther c’est en quelque sorte l’explosion à travers le monde de tout ce qui est allemand, de tous les instincts de l’Allemagne protestante et révoltée, et en même temps que l’esprit de nation entre dans ses idées, il entre dans l’histoire de sa nation » [25].Car Luther est, pour Zweig, le « grand adversaire » [26]de l’humanisme érasmien. Seulement, par le jeu des correspondances, il est clair que, si Zweig, par maints détails s’identifie à Erasme, la figure de Luther reprend, elle, plusieurs aspects de la personnalité d’Hitler. Là encore, l’identification permet de créer un lien entre les deux périodes. Ce serait donc sa propre conception de l’humanisme que Zweig chercherait ici à défendre, d’une manière emphatique et un peu futile. Pour lui, avec Erasme, c’est l’Europe culturelle qui voit le jour, la vraie Europe, l’Europe spirituelle ; celle, précisément, à laquelle il tente de redonner vie, face à l’obscurantiste montée nazie. Face aux dictatures qui réinventent l’histoire, il fonde, lui, un musée européen censé montrer aux peuples l’incontestable présence d’une culture européenne transnationale. Il s’inscrit alors dans une dialectique périlleuse, entre engagement pour une grande idée et fuite du débat public.

A ce titre, il est symptomatique de voir que Stefan Zweig publia un autre livre censé relayer son combat. AprèsErasme, en 1933, il publie ainsiCastellion contre Calvin, conscience contre violence [27]en 1936. Le second titre montre clairement que le sujet du livre repose sur un conflit entre conscience intellectuelle et dogmatisme politico-religieux.Zweig continue donc sa lutte, mais il durcit, en même temps, sa position. Car, avec Castellion, le symbole est plus fort. A l’inverse d’Erasme, l’humaniste de Genève est en effet allé jusqu’à mourir pour ses idées. Cette trajectoire initiée par le biographe suggère une forme de radicalisation de l’engagement ou, plutôt, un pessimisme croissant.De fait, il s’agit, pour Zweig, d’affirmer toujours plus fort, au fur et à mesure que croît le péril nazi, l’irréductible pouvoir de ce souffle spirituel dont il se croit l’un des relais, et qu’il fait remonter à l’humanisme. Mais l’on ne peut que trouver troublant la communauté de destin qui lie le biographe à son second héros : si Erasme figurait l’humaniste isolé mais encore confiant dans ses valeurs, Castellion a été victime du dogmatisme calviniste, comme Zweig, rongé par le pessimisme a disparu un soir de 1942, en voyant brûler, au loin, l’Europe dans laquelle il plaçait tant d’espoirs. C’est dire que, pour lui, l’humanisme n’est pas seulement le mouvement culturel propre à la Renaissance, mais qu’il correspond à une vision plus large de l’humain. En ce sens, l’humanisme est une composante essentielle de la tradition européenne et s’oppose à la barbarie qui caractérise aussi bien le fanatisme religieux que le nationalisme échevelé du XXe siècle.

 Conclusion

Le projet pacifiste et communautaire des européistes, dont Zweig se fait ici l’écho, dessine donc un nouveau temps de l’humanisme. Mais le projet de Zweig met également en exergue la crise que la montée des totalitarismes fait subir à l’intellectualisme européen. Thématique inhérente à l’humanisme, le mythe de Faust ressort justement dans ces années-là. Il trouve sans doute sa meilleure représentation dans le héros duDoktor Faustus,Adrian Leverkühn, dont son auteur disait qu’il était « une figure idéale, un “ héros de notre temps ”, un homme qui porte la souffrance de l’époque  » [28]. Or, en considération de tels troubles, les grandes figures de Zweig, notamment celle d’Erasme, pouvaient constituer une bouée de sauvetage pour un humanisme en péril. On pourrait même ajouter que Stefan Zweig construit, grâce, paradoxalement, à son manque d’objectivité, une figure coupée de ses racines historiques, à cheval entre le XVIe et le XXe siècle, emblème de la grandeur humaniste. Bref, il crée un mythe.

Or il est intéressant de voir de quelle manière Erasme, érigé en symbole de l’humanisme européen, pouvait venir, telle une figure paternelle, servir l’argumentaire des pro-européens. De fait, il y a toujours eu une fonction politique du mythe, grâce à laquelle, au moins depuis les Césars, les Etats ont su forgé de sublimes généalogies. En construisant son « idée », son mythe « Erasme », Zweig répondait donc indirectement au dessein de Julien Benda selon lequel : « l’Europe se fera ici comme s’est faite la nation. […] Il s’agit d’opposer à un pragmatisme nationaliste un autre pragmatisme, à des idoles d’autres idoles, à des mythes d’autres mythes, à une mystique une autre mystique » [29]. L’engagement de Stefan Zweig s’il s’inscrit ainsi de manière un peu dérisoire dans le débat politique des années 1930, a pu avoir un résultat tardif. L’intérêt essentiel du travail de l’Autrichien, en fait, tiendrait en ce qu’il aboutit, par le succès de ses ouvrages, à une inévitable vulgarisation de la figure d’Erasme, qui ne sera plus seulement, après lui, un objet d’étude pour chercheurs, mais deviendra une référence interculturelle propre à servir le projet d’une union spirituelle des peuples. Car si le propos de Stefan Zweig, tel qu’il le prévoyait, et que le lui avait enseigné la tradition humaniste, ne pouvait être entendu dans le marasme des conflits idéologiques qui entouraient la percée totalitaire, il ne fait pas de doute qu’il a contribué à « panthéiser » la figure d’Erasme, à lui donner une légitimité européenne que les étudiants d’aujourd’hui savent apprécier.

 Bibliographie :

●Benda Julien,Discours à la nation européenne,Paris, Gallimard, 1933.

●Coudenhove-Kalergi Richard [de],Pan-Europe[1923], publication de l’Institut universitaire d’Etudes Européennes - Genève, PUF, 1988.

●Croce Benedetto,Histoire de l’Europe au XIXe siècle[1933],trad. de l’italien d’Henri Bedarida, Paris, Folio Gallimard,Essais(Coll.), 1994.

●Du Réau Elisabeth,L’Idée d’Europe au XXe siècle,des mythes aux réalités, Paris, Editions complexe, Questions au XXe siècle(Coll.), 1995.

●Fragnière Gabriel,StefanZweig ou… espérer l’Europe à en mourir, Bruxelles, Presses interuniversitaires européennes, Portraits d’Européens (Coll.),1994.

●Freud Sigmund,Correspondance (1873-1939), Paris, Gallimard, trad. de l’allemand d’Anne Berman, avec la collaboration de Jean-Pierre Grossein, 1966.

●Husserl Edmund,La Crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale,trad. de Gérard Granel, Paris, Gallimard,Tel (Coll.),1989.

●Mann Klaus,Briefe und Antworten,(1922-1937), München, Edition Spangenberg, 1975.

●Mann Thomas,Le Journal du Docteur Faustus, le roman d’un roman,trad. de l’allemand de Louise Servicen Paris, Plon, 1949.

●Mesnard Pierre,L’Essor de la philosophie politique au XVIe siècle, Paris, J. Vrin, De Pétrarque à Descartes, tome XIX(Coll.),1969.

●Prater Donald,Stefan Zweig, trad. de l’anglais de Pascale Mezamat, Paris, La Table Ronde, 1988.

●Roth Joseph,Briefe,(1911-1939), Köln, Kiepenheuer und Witsch, 1970.

●Rotterdam Erasme (de),Complainte pour la Paix[1517], trad. du latin de Jean-Claude Margolin, Paris,Robert Laffont, Bouquins(Coll.),1992.

●Saint-Gille Anne-Marie,La « Paneurope », un débat d’idées dans l’entre-deux guerres, Paris, Presses universitaires de Paris Sorbonne, 2003.

●Valéry Paul,Variété I et II,Paris, Folio Gallimard, 1998.

●Zweig Stefan,Castellion contre Calvin, conscience contre violence[1936],trad. de l’allemand de Alzir Hella, Paris, Le Castor Astral, 1997.

●Zweig Stefan,Erasme, grandeur et décadence d’une idée[1934], trad. Alzir Hella, Paris, Livre de Poche, 2001.

●Zweig Stefan,Le Monde d’hier,souvenirs d’un Européen[1943],trad. de l’allemand de Serge Niémetz, Paris, Le Livre de Poche, 1993.

Notes

[1] P. Valéry,Variété I et II,Paris, Folio Gallimard, 1998, p. 13.

[2] E. Husserl,La Crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale,trad. de Gérard Granel., Paris, Gallimard, Tel (Coll.),1989, p. 23.

[3] R. de Coudenhove-Kalergi,Pan-Europe[1923], publication de l’Institut universitaire d’Etudes Européennes - Genêve, PUF, 1988, p. 35.

[4] E.du Réau,L’Idée d’Europe au XXe siècle,des mythes aux réalités, Paris, Editions complexe, Questions au XXe siècle (Coll.), 1995, p. 7.

[5] Cf. A-M. Saint-Gille,La « Paneurope », un débat d’idées dans l’entre-deux guerres, Paris, Presses universitaires de Paris Sorbonne, 2003.

[6] B. Croce,Histoire de l’Europe au XIXe siècle[1933],trad. de l’italien d’Henri Bedarida, Paris, Folio Gallimard, Essais (Coll.), 1994, p. 436.

[7] S. Zweig,Erasme, grandeur et décadence d’une idée[1934], trad. Alzir Hella, Paris, Livre de Poche, 2001.

[8] Ibid,p. 84.

[9] Cf. P. Mesnard,L’Essor de la philosophie politique au XVIe siècle, Paris, J. Vrin, De Pétrarque à Descartes, tome XIX(Coll.),1969.

[10] E. de Rotterdam,Complainte pour la Paix[1517], trad. du latin de Jean-Claude Margolin, Paris : Robert Laffont, Bouquins(Coll.),1992, p. 918.

[11] S. Zweig, Erasme, op. cit., p. 45.

[12] S. Freud,Correspondance (1873-1939), Paris, Gallimard, trad. de l’allemand de Anne Berman, avec la collaboration de Jean-Pierre Grossein, 1966, pp. 467-468.

[13] S. Zweig,Le Monde d’hier,souvenirs d’un Européen[1943],trad. de l’allemand de Serge Niémetz, Paris, Le Livre de Poche, 1993, p. 300.

[14] S. Zweig,Erasme,op. cit., p. 165.

[15] S. Zweig,Le Monde d’hier,op. cit., p. 8.

[16] Ibid, p. 23.

[17] D. Prater,Stefan Zweig, trad. de l’anglais de Pascale Mezamat, Paris, La Table Ronde, 1988,p. 221.

[18] G. Fragnière,StefanZweig ou… espérer l’Europe à en mourir, Bruxelles, Presses interuniversitaires européennes, Portraits d’Européens(Coll.),1994, p. 34.

[19] J. Roth,Briefe,(1911-1939), Köln, Kiepenheuer und Witsch, 1970, p. 261 :« On ne se méprend pas sur vous, parce que vous vous appelez Zweig, mais parce que vous êtes un Juif, […] un pacifiste, un homme de lettres civilisé, un libéral. Tout espoir est vain. […] Taisez-vous – ou battez-vous : faites ce qu’il vous semble le plus judicieux ».

[20] K. Mann,Briefe und Antworten,(1922-1937), München, Edition Spangenberg, 1975, p. 70 :« Vous avez donné, pour le premier numéro du prometteurZeitlupe, un article court, mais très profond, que j’ai lu avec le plus haut intérêt, mais pas avec un total accord. Votre compréhension de la “radicalisation” de la jeunesse – c’est-à-dire de sa radicalisation réactionnaire – me semble trop large. Avez-vous, sur place, une telle indulgence vis-à-vis d’elle ? Alors je ne peux pas être d’accord ».

[21] D. Prater,op. cit., p. 230.

[22] S. Zweig,Erasme,op. cit., p. 85.

[23] Ibid,p. 48.

[24] Ibid,pp. 13-14.

[25] S. Zweig,Erasme, op. cit.,p. 103.

[26] Ibid, titre du chapitre portant sur le conflit entre Erasme et Luther.

[27] S. Zweig,Castellion contre Calvin, conscience contre violence[1936],trad. de l’allemand de Alzir Hella, Paris : Le Castor Astral, 1997.

[28] Th. Mann,Le Journal du Docteur Faustus, le roman d’un roman,trad. de l’allemand de Louise Servicen Paris, Plon, 1949, p. 85.

[29] J. Benda,Discours à la nation européenne,Paris, Gallimard, 1933, p. 29.

Articles connexes :



-S’engager par et hors du théâtre. Arthur Adamov dans les années 1950 et 1960, par Lempereur Nathalie

-La société de communication, ou le ressassement d’un mythe par ses interprètes, par Abid-Dalençon Ambre

-La réflexivité dans les dispositifs d’accompagnement : implication, engagement ou injonction ?, par Le Goff Jean-Louis

-Individualité et rapports à l’engagement militant, par Pereira Irène

-L’engagement dans les espaces de la sphère publique : pour la construction partagée de la décision collective, par Gilbert Yves

Pour citer l'article


Jouhaud Etienne, « Erasme, ou les ambiguïtés de l’engagement européen de Stefan Zweig », dans revue ¿ Interrogations ?, N°9. L’engagement, décembre 2009 [en ligne], http://revue-interrogations.org/Erasme-ou-les-ambiguites-de-l (Consulté le 21 décembre 2024).



ISSN électronique : 1778-3747

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