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Comité de rédaction

Préface au n°36. Les mythes au XXIe siècle

 




numéro coordonné par Laurent Di Filippo

Paru en 2001, le roman American Gods de Neil Gaiman raconte l’opposition des dieux et des personnages issus des mythes traditionnels nordiques, slaves, irlandais, africains, égyptiens, amérindiens parmi d’autres traditions, avec les incarnations de mythes modernes tels que la télévision, l’informatique, le complotisme, la main invisible, des entités réunies au sein d’un groupe mené par « Mr World » incarnation de la mondialisation. Même si, finalement, ce combat s’avère être une machination des dieux nordiques Odin et Loki pour accroître leur pouvoir, l’opposition symbolique entre tradition et modernité interroge le lecteur sur la place des mythes dans nos sociétés, leurs rôles, leurs significations, leurs usages, ou encore, les valeurs qu’on leur attribue.

Cet exemple préliminaire illustre deux aspects du présent numéro, à savoir d’une part l’utilisation de mythes anciens dans les productions culturelles et d’autre part la mise en lumière de mythes contemporains, dialectique déjà chère à Gaiman :

« Les œuvres de Gaiman ne font pas que jouer avec les mythes du fantastique et du merveilleux. Elles mettent en scène leur rapport à toutes les formes de mythe, à leur réécriture et à leur réappropriation. À côte des mythes populaires de la fiction, ceux de l’histoire des religions sont omniprésents. Il y a aussi les mythes modernes au sens où l’entend Barthes (donc pas seulement ceux de la fiction, mais ceux de la société en général), et le cœur de ces récits est le dialogue esthétique et philosophique entre toutes ces formes en mythes » (Camus, 2018 : 13-14).

Choisi arbitrairement parmi de nombreux autres, cet exemple illustre le fait que les questions relatives aux mythes sous leurs différents aspects inspire toujours la réflexion des chercheurs en sciences humaines et sociales. La notion de mythe a donné lieu à un vaste champ de travaux et à de multiples approches qu’il est impossible de présenter ici. Encore aujourd’hui, l’étendue des recherches autour cette notion est immense et foisonnante, allant de l’intérêt porté aux anciennes mythologies, comprises comme des systèmes de croyances de différentes périodes historiques ou parties du monde, à celui porté au le Camembert, présenté comme un « mythe français » (Boisard, 2007). Aborder la question des mythes au XXIe siècle renvoie donc à plusieurs aspects, tels que la réception actuelle de mythes anciens dans divers domaines, une étude des phénomènes contemporains qui nourrissent nos imaginaires et forment des mythes modernes ou, sur un plan épistémologique, les nouvelles théories qui permettent d’aborder les mythes aujourd’hui.

Bien qu’anciennes, les discussions autour de cette notion restent toujours d’actualité, comme le montrent les différents articles de ce trente-sixième numéro. Celui-ci regroupe les actes d’un colloque organisé dans le cadre du programme ANR Aiôn, à Besançon les 12 et 13 mai 2022, ainsi que de nouvelles contributions reçues dans le cadre de l’appel à articles de la revue. Une présentation exhaustives de ces exemples et de ces études sur les mythes ne pourra pas être réalisée ici. Ainsi, ce numéro se veut constituer une ouverture et une invitation à poursuivre les réflexions autour de cette notion. En effet, tout comme les mythes sont continuellement réécrits et transformés, les recherches dans ce domaine se poursuivent et se renouvellent.

 Utiliser la notion de « mythe » aujourd’hui : entre catégories indigènes et problématiques scientifiques

Dans un premier temps, revenons rapidement sur le terme « mythe » lui-même, qui n’est pas sans poser certains problèmes. Sarah Iles Johnston (2018 : 1) met en garde : « The word “myth” is a notoriously slippery beast » [1]. Et en effet, cette notion ne tient pas du tout de l’évidence et ses significations ont évolué dans le temps. Utilisé pour la première fois en français en 1796 pour parler des Odes de Pindare dans le syntagme « Mythes nationaux », le terme vient remplacer le mot « fable » pour désigner les récits des anciens, c’est-à-dire des Grecs, car « certainement les anciens n’ont pas regardé comme des fables les traditions consacrées sur l’origine des nations, sur les dieux et les héros qu’ils adoroient » (Chompré, Millin, 1801 : 694). Autrement dit, ce terme est proposé pour désigner des récits qui relevaient non seulement de la croyance, mais participaient aussi à une forme de sentiment d’appartenance qui préfigurait les nations du XIXe siècle. On comprend que, dans cette définition même, ce sont les préoccupations de cette période, romantique et nationale, qui prévalaient. De nos jours, le terme mythe « désigne dans le langage courant aussi bien des récits mettant en scène des êtres surnaturels, des allégories philosophiques, une part de l’imaginaire qui serait dénué de réalité, que des récits renvoyant à de supposées croyances » (Di Filippo, 2020). Cette polysémie appelle donc les chercheurs à la vigilance lorsqu’ils souhaitent utiliser cette notion. Les travaux de l’anthropologie culturelle américaine, comme ceux de Franz Boas (1962 [1928]) et d’Edwar Sapir (1967), qui ont influencé l’ethnolinguistique, ont montré la nécessité de prêter attention aux catégories indigènes utilisées dans les cultures étudiées. Un peu plus tard, cette position réflexive sur nos catégories de pensée s’est retrouvée dans les travaux d’histoire des religions de Jean-Pierre Vernant (1974) et Marcel Détienne (1981), pour ne citer qu’eux. Dans cette continuité, Philippe Borgeaud (2010, 2013) a souligné l’importance du regard christiano-centré sous-jacent à l’usage de la catégorie de « mythes » et a également mis en garde contre l’uniformisation d’interprétation à laquelle elle peut conduire. Il rappelle que « ce que nous appelons mythe correspond en effet à différentes catégories de récits indigènes » (Borgeaud, 2010 : 779). Il est donc nécessaire de ne pas plaquer trop rapidement nos catégories et nos modes de pensée sur des traditions autres. De nombreux auteurs ont montré que, déjà dans la Grèce antique à laquelle la racine du mot est emprunté, « mythos » (μῦθος) n’a pas le même sens que « mythe » aujourd’hui, et que les récits grecs étaient désignés par des termes tels arkhaîa et palaiá par Plutarque, c’est-à-dire des « choses anciennes » (Calame, 2015 : 26), et plasmata, que l’on peut traduire par « fabrications » ou « constructions » par Xenophane (Calame, 2015 : 26). Néanmoins, comme l’écrit Pauline Schmitt Pantel (2015 : 6) : « Et pourtant, faute de mieux, on ne peut que continuer à utiliser le terme de mythe dans le contexte du monde grec ancien car des mots comme légende, ou récit ou encore imaginaire sont d’un emploi très périlleux » [2]. En effet, le terme est toujours utilisé fréquemment aujourd’hui. Le pendant de cette précaution quant aux catégories linguistiques est alors de s’interroger sur les significations associées à l’usage du terme « mythe » aujourd’hui. Désigner des récits de la sorte implique de leur accorder une certaine valeur ou un certain sens. En restant réflexif, les chercheurs peuvent alors se demander quelles significations les acteurs souhaitent donner aux phénomènes qu’ils désignent comme des mythes.

 Réceptions et transmissions culturelles

La première partie de ce numéro rassemble les textes qui abordent la question des mythes à travers l’histoire de leur réception et leur transmission, puisqu’un aspect des mythes au XXIe siècle est la présence de mythes anciens ou lointains dans nos cultures contemporaines. Des références aux mythes grecs, nordiques, égyptiens, japonais et bien d’autres traditions du monde se retrouvent au cinéma, dans les séries télévisées, les dessins animés, la musique, les bandes dessinées et les jeux de toutes sortes, qu’ils soient de rôle, de plateau ou vidéo. Dans les productions des industries culturelles récentes, nous trouvons, par exemple, des réécritures modernisées qui racontent des épisodes précis des récits mythiques, comme les films Hercule (2014) ou Troie (2004), La Légende de Beowulf (2007), dont le scénario est co-écrit par Neil Gaiman, ou encore King Arthur : Legend of the Sword (2017). Plusieurs auteurs s’essaient également à la réécriture moderne de sources anciennes, tel Neil Gaiman (2017) encore une fois, qui a rédigé l’ouvrage Norse Mythology. Ce texte reprend le contenu de l’Edda en Prose de Snorri Sturluson, une des principales sources des mythes nordiques, dans une version romancée et modernisée. Avant lui, d’autres auteurs de fantasy comme J. R. R. Tolkien ou Poul Anderson avaient également repris diverses sagas [3]. Si l’on sort des œuvres de divertissement, nous trouvons également de nombreuses productions à visée éducative et documentaire, telles que Les Grands Mythes - Les dieux et héros grecs (Arte, 2015). Dans le domaine de la recherche, les études sur les mythes anciens sont nombreuses. Citons à titre d’exemple l’excellente synthèse de René Treuil (2012) sur Le Mythe de l’Atlantide. Des travaux de recherche collectifs se sont intéressés à certaines aires culturelles ou périodes historiques, comme les numéros de la revue Fantasy Art and Studies consacrés aux mythes nordiques (numéro 6) et aux mythes arthuriens (numéro 8), ainsi que les travaux autour du carnet de recherche hypotheses.org Antiquipop [4], consacré aux recherches sur l’antiquité dans la culture populaire. Nous observons également des emprunts plus ponctuels, comme dans les figures des vampires (Ory, 2016) ou des zombies issus du Vodou haïtien (Tuaillon Demésy, Grosprêtre, 2020). Dans une autre optique, la présence de mythes sur de nombreux supports médiatiques a récemment amené à poser la question de leur transmédialité (Arioli, Friant-Kessler, 2023).

L’intérêt pour les mythes se retrouve aussi sur le plan de l’érudition scientifique comme le montrent des publications encyclopédiques, telles que le Dictionnaire critique de mythologie de Jean-Loïc Le Quellec et Bernard Sergent (2017) et le Dictionnaire universel des dieux, déesses et démons, dirigé par Patrick Jean-Baptiste (2016). Cette tradition des dictionnaires ou encyclopédies des mythes et légendes du monde est aussi ancienne que l’emploi du terme mythe pour désigner autre chose que les récits traditionnels grecs. Ils contribuent dans une large mesure aux « processus d’universalisation et d’uniformisation » (Di Filippo, 2016a) qui placent dans la même catégorie des récits provenant de cultures éloignées dans le temps et dans l’espace et véhiculent donc une vision universaliste de ces phénomènes.

Les traditions du monde entier, provenant de différentes aires culturelles et périodes historiques, deviennent de multiples répertoires des cultures populaires contemporaines. Pour le dire autrement, nos cultures sont « hybrides » (Burke, 2009), même si ce terme doit être discuté. Pris sous un angle religieux, nous pouvons également parler de « syncrétisme », terme qui désigne soit une « fusion originale de traits religieux hétérogènes » ou une « contamination » d’une religion dominante par une autre (Mary, 2010 : 1197). Il s’agit alors de comprendre comment les différents récits mythiques ou les mythologies [5] sont mélangés et articulés les uns aux autres aujourd’hui. Les hybridations sont parfois le fait de la traduction ou de la localisation d’une œuvre. Dans la série de jeux vidéo Suikoden, les symboles magiques appelés « monsho » en japonais, terme qui peut être traduit par « emblème » ou « blason », deviennent des « runes » en anglais et français et font alors références aux mythes nordiques dans lesquels les runes sont parfois présentées comme des symboles magiques (Guffroy, 2022 : 180).

Dans une perspective différente, certains chercheurs ont focalisé leur attention sur les œuvres d’un auteur en particulier et dans leurs rapports avec des mythologies spécifiques. C’est le cas par exemple de Rudolf Simek (2005) qui a étudié les emprunts de Tolkien aux mythologies germano-scandinaves, ainsi que Carolyne Larrington (2016), qui a fait de même à propos des romans de Georges R. R. Martin A Song of Ice and Fire (1996-aujourd’hui) et son adaptation télévisée Game of Thrones (2011-2019). La littérature de fantasy entretient d’ailleurs un rapport particulier aux mythes sous deux aspects principaux. Premièrement, elle fait de nombreux emprunts à différentes mythologies et, deuxièmement, elle se présente parfois elle-même comme un récit mythique, plus spécifiquement dans le sous-genre appelé « fantasy mythique » ou « myth fantasy » (Di Filippo, 2018 : 270). On y trouve des œuvres comme Le Silmarillon de Tolkien et, avant lui, Les Dieux de Pegāna écrit par Lord Dunsany (1905). Lorsqu’elle en emprunte des éléments, « la fantasy fournit de nouveaux contextes et ainsi, inévitablement, de nouvelles significations pour le mythe » [6] (Attebery, 2014 : 3). Autrement dit, le sens donné aux mythes se renouvelle dans ses nouveaux usages et il ne s’agit jamais d’un retour aux origines :

« Plutôt que de passer trop de temps à simplement identifier un mythe celtique particulier dans un travail de fantasy moderne, nous devrions regarder comment l’auteur de fantasy s’approprie, engage un dialogue avec, parodie et reconstitue le mythe. Les réutilisations moderne ne seront jamais les même que l’interprétation originale. La plupart des mythes nous parviennent en étant extrait de leur contexte » [7] (Attebery. 2014 : 3).

Ces réflexions sur les transformations et les resémantisations des mythes renvoient aux travaux du philosophe allemand Hans Blumenberg (1979) qui a analysé ces processus de transmission culturelle qu’il a nommés le « travail sur le mythe » dans son ouvrage éponyme. Dans un article préliminaire, traduit en français sous forme d’ouvrage en 2005, Blumenberg (2005 [1971] : 154-155) soulignait que « la significativité […] est un résultat, non pas une réserve constituée : les mythes ne signifient pas “toujours déjà” ce que leur interprétation et leur élaboration en font, mais s’enrichissent à partir des configurations dans lesquelles ils entrent ou auxquelles ils sont rapportés ». Le sens des récits change donc au fur et à mesure de leurs usages dans de nouveaux cadres et de nouveaux contextes. Il ne faut donc pas aller chercher leurs significations dans des récits originaux. La référence au passé peut participer à la reconnaissance de la forme, mais n’impose pas d’interprétation spécifique. En effet « une telle validité offre pour ainsi dire des points de référence pour des “allusions” et de vagues renvois : on peut supposer des éléments familiers, sans qu’ils se distinguent par une sanction particulière ou imposent de les traiter de manière conservatrice » (Blumenberg, 2005 [1971] : 34). Selon Blumenberg, plus les mythes sont utilisés, réécrits et intégrés à de nouveaux cadres, plus ils s’éloignent justement de leurs récits originels. Cette distance indique alors qu’il ne faut pas y chercher des formes de « détermination orthodoxe » (Blumenberg, 2005 [1971] : 111-112), au contraire. Les significations diffèrent avec la distance et ouvrent à des formes de liberté dans les usages, qui peuvent aller jusqu’au ludique. Nous retrouvons ici l’idée de Franz Boas (1962 [1928] : 165) lorsqu’il écrivait que « ce qui peut être un mythe sacré pour une tribu peut être raconté pour s’amuser par une autre » [8]. Plutôt que de vouloir y chercher des modèles à suivre, il semble alors que les mythes offrent un ensemble de ressources riches pour produire de nouvelles créations et que les créateurs doivent se sentir libres de les transformer :

« Le passé est aujourd’hui plus passé qu’il ne l’a jamais été. Sans doute devons-nous moins que jamais espérer de lui ; ou plutôt borner nos espérances à ce qu’il tienne ses portes grandes ouvertes et nous laisser entrer et piller chez lui tous les fragments que nous choisirons pour orner nos jolies mosaïques » (Sapir, 1967 : 158).

Suivant ces pistes initiales, les articles de cette première partie abordent des problématiques liées aux emprunts à des traditions passées et aux transmissions culturelles qui renouvellent le sens des mythes par leurs nouveaux usages.

Pour ouvrir ce numéro, Marie Kergoat propose une étude des moires dans The Witcher 3. Wild Hunt, un jeu vidéo inspiré par la série de romans et de nouvelles de l’auteur de fantasy polonais Andrzej Sapkowski, intitulé en français Le Sorceleur. Dans ce jeu, le personnage-joueur rencontre trois sorcières appelées « crones  » en anglais et « moires » en français, rappelant les puissances divines tisseuses de la mythologie grecque. Dans l’univers de Sapkowski, la « conjonction des Sphères » est un événement durant lequel de nombreux mondes se sont rencontrés et qui justifie que des êtres de multiples origines et d’influences diverses soient réunis dans le même univers fictionnel. Autrement dit, le syncrétisme ou l’hybridité sont justifiés du point de vue des contenus et les différentes références peuvent être analysées du point de vue de l’intertextualité. L’autrice montre d’ailleurs que les Moires du jeu vidéo sont elles-mêmes un mélange de différentes références. Les créateurs de l’univers empruntent à des récits mythiques variés et, dans un même mouvement, construisent eux-mêmes une ou des mythologie(s) pour leur monde fictionnel. C’est ce que Marie Kergoat propose de nommer « l’appel au mythe ».

Aurore Noury présente une étude du jeu vidéo Hellblade : Senua’s Sacrifice, qu’elle aborde du point de vue de l’herméneutique. Dans ce jeu vidéo, les traditions scandinaves, celtes, mais aussi gréco-romaines sont mélangées pour proposer une aventure qui est également une mise en scène de la maladie mentale et la psychose. Les concepteurs se servent ainsi de récits mythiques pour évoquer différents degrés de folie. Dans ce cadre, des hallucinations auditives et visuelles contribuent au gameplay du jeu et suggèrent plusieurs interprétations des mythes tels qu’ils sont vécus par le personnage principal, Senua, et par les joueurs et joueuses. L’autrice s’appuie notamment sur les travaux de Michel Picard afin de montrer les différentes positions du « lecteur » face aux récits. Ces différents niveaux d’interprétation amènent à questionner la vérité des discours tels qu’ils sont exprimés dans le jeu. La signification des mythes est renouvelée et transformée aussi bien dans leur réécriture au niveau fictionnel que dans ce qu’ils symbolisent.

Dans l’article suivant, Soline Anthore étudie l’importance que la figure de la skjaldmö (la guerrière au bouclier des récits médiévaux nordiques) a pris dans les cultures populaires contemporaines, notamment à travers le personnage de Lagertha de la série télévisée Vikings (2013-2020). Selon l’autrice, cette femme guerrière est devenue un des symboles de l’empowerment féminin dans les productions des industries culturelles et créatives ainsi que dans des productions documentaires et scientifiques. Dans un premier temps, l’autrice revient sur les sources médiévales dans lesquelles ce personnage apparaît, notamment La Geste des Danois de Saxo Grammaticus mais aussi les sagas islandaises, puis sur ses différentes attributions en tant que femme guerrière et épouse de chef, afin de comprendre les textes qui ont servi d’inspiration à ce personnage. Elle montre comment des découvertes archéologiques récentes à propos du sexe du squelette de la tombe de Birka ont également remis en question la place des femmes dans les sociétés médiévales nordiques. La simultanéité de ces phénomènes a créé une synergie qui est venue faire écho aux questions féministes contemporaines.

Dans un registre différent, Raphaël Salvi propose une étude de l’histoire et des mythes fondateurs de différents fromages d’appellation d’origine protégée (AOP) du Massif Jurassien, à savoir le Comté, le Morbier, Le Bleu de Gex Haut-Jura et le Mont d’Or (côté français) et le Vacherin Mont-d’Or (côté suisse). Les récits d’origine de ces fromages s’étendent sur l’Histoire longue et constitue un imaginaire et des légendes fondatrices servant de justifications à leur fabrication ou leur rattachement à des territoires particuliers, menant parfois à des oppositions par-delà les frontières. Ces histoires ont alors une « vocation de caution historique et culturelle, et d’ancrage ancestral à la terre » et servent à la « patrimonialisation du passé et de la tradition » même si elles ne remettent pas en cause les appellations d’origine protégées.

Pour clôturer cette première partie, Ethson Othilien analyse trois récits de vie haïtiens présents sur la plateforme Youtube, partageant des expériences mystico-religieuses liant Vodou et christianisme. Au départ de ces récits se trouve le désir de richesse ou de vengeance des narrateurs, qui sollicitent l’aide d’êtres surnaturels par l’entremise de pratiques Vodou. Dans les cas narrés, la foi chrétienne protège les personnes des conséquences du pacte passé avec des puissances maléfiques. L’article montre l’articulation de différents fragments de mythes et récits religieux dans ces récits personnels qui eux-mêmes prennent une valeur de témoignage mystique, notamment parmi des populations défavorisées.

 Mythes, questions sociales et politiques

La seconde partie de ce numéro regroupe les articles qui abordent les rapports entre mythes et politiques. Ils sont répartis en deux sous-groupes, l’un concernant les reprises de mythes anciens et l’autre sur des discours politiques modernes faisant usage de procédés narratifs. Parmi les approches contemporaines des mythes en sciences humaines et sociales, l’approche politique s’est développée depuis les années 2000, marquée notamment par la publication du livre de Bruce Lincoln Theorizing Myth. Narrative, Ideology, and Scholarship, paru en 1999, qui revient non seulement sur les récits mythiques et les termes grecs, mais également sur les recherches en mythologie et leurs implications. Pour cet auteur, les mythes sont des « idéologies sous forme narrative » [9] (Lincoln, 1999 : 147) et, au-delà de leurs sources, ils servent également de « discours de différenciation » (Lincoln, 1999 : 54), notamment pour des idéologies nationalistes. Dans une perspective proche, Stefan Arvidsson (2006) a consacré un ouvrage aux recherches sur les peuples indo-européens et leurs mythologies, afin de mettre en évidence les idéologies qui les sous-tendaient, ainsi que celles auxquelles elles ouvraient la voie. En France, ces questions ont également été traitées par Maurice Olender (2005 : 57-92) et Jean-Paul Demoule (2015) qui a récemment publié une somme conséquente sur la question des recherches indo-européennes, dont il pose la question de savoir s’il ne s’agit pas simplement d’un mythe des origines des sociétés occidentales.

Dans la lignée de Bruce Lincoln, Nicolas Meylan (2020) s’est intéressé aux sources médiévales nordiques et a montré que, pour bien comprendre ces textes, il est indispensable de les situer dans leur contexte politique et social. La poésie scaldique est, en effet, une poésie de cour pour un public plutôt noble et instruit (Meylan, 2020 : 15). Il s’agit donc de récits circulant dans une certaine caste de la population et qui ne représentant pas des croyances quotidiennes ou qui se destinent à toutes les populations scandinaves. Il faut également prendre en considération le contexte politique plus large de la première moitié du XIIIe siècle islandais, époque durant laquelle la Norvège cherche à soumettre l’Islande, ce à quoi les Islandais ne sont pas tous favorables. Les textes contiennent des représentations de la royauté à interpréter dans ce contexte historique où la politique islandaise fonctionne sous une forme d’assemblée. Les textes donnent ainsi à lire les positions politiques des auteurs (Meylan, 2020 : 112-114). Enfin, les usages politiques des récits nordiques se font tout au long de l’histoire et, plus particulièrement, au XIXe siècle, ce que l’on retrouve dans les idéologies völkisch et jusqu’à nos jours parmi nombre de suprémacistes blancs (Meylan, Roesli, 2020).

Les mythes grecs ne sont pas en reste en ce qui concerne les usages politiques. Changeons de registre ici pour évoquer des questions contemporaines et notamment celle de la place des femmes dans nos sociétés. Le collectif de chercheuses et chercheurs Les Jaseuses [10] s’est ainsi entouré d’artistes pour proposer cette année le bel ouvrage Brouillon pour une encyclopédie féministe des mythes, dont l’objectif est de « faire émerger des modèles identificatoires alternatifs, positifs, puissants, pluriels et complexes, afin de nous penser au contact des mythes et de les faire circuler » (Berthier et al., 2023 : 8). À travers la production d’articles critiques mais également de textes littéraires et d’illustrations, « l’objectif de cet ouvrage est autant de construire de nouveaux mythes que d’en redéfinir de plus anciens, qui ont pu servir à justifier une éthique, à légitimer un ordre social établi au détriment des femmes et des minorités » (Berthier et al., 2023 : 11). Ces questions sont particulièrement présentes aujourd’hui comme le montre également l’ouvrage de Jayne Draycott et Kate Cook (2022), Women in Classical Video Games, qui les aborde dans le domaine des jeux vidéo [11].

Les deux premiers articles de cette partie de cette partie s’inscrivent précisément sous cet angle. Membre des Jaseuses, Cassandre Martigny propose une étude sous l’angle de la littérature, portant sur le roman de Natalie Haynes The Children of Jocasta (2017). Cette œuvre reprend les tragédies de Sophocle Antigone et Œdipe Roi pour valoriser deux personnages féminins, Jocaste et Ismène. Ainsi s’agit-il pour Haynes de réécrire des récits de la Grèce antique afin de valoriser des personnages féminins secondaires généralement délaissées et de renégocier « la culture dominante et hégémonique » par une « contre écriture ». En inversant les rôles pour bousculer l’image traditionnelle des mythes, Haynes suggère à travers son roman une « lutte contre la dépossession de soi » pour redonner aux personnages féminins oubliés « le contrôle sur leur propre histoire ». Cette perspective permet alors de ne pas limiter les récits connus à une seule vision unique et dominante.

Dans une perspective proche, Emmanuelle Lescouet s’intéresse également aux réécritures féministes des mythes antiques, dans le roman Eurydice déchaînée de Melchior Ascaride, publié en 2021, et Lore Olympus, un webtoon de Rachel Smyth, publié en 2018. À partir de ces deux cas d’étude, l’autrice montre que les lecteurs ont affaire à une « antiquité réécrite et fantasmée ». Les sources historiques mettent très peu d’héroïnes en scène, celles-ci ayant tendance à disparaître pour laisser la place aux hommes. Ces réécritures ont pour vocation d’« affiner ou déplacer la perception que nous, lecteurs et lectrices du XXIe siècle contemporain·e·s, avons de ces femmes ». Lescouet propose une approche à travers le prisme de l’édition et de la représentation graphique, montrant comment les auteurs jouent avec les couleurs ou avec le défilement, pour mettre en valeur les personnages féminins et leurs ressentis. De même, leur prise de position face aux situations qu’elles rencontrent leur permettent de rassembler des groupes de femmes et, ainsi, de proposer des modèles nouveaux de pouvoirs féminins aux lectrices.

D’autres courants que ceux des réécritures des mythes antiques existent pour évoquer les rapports entre mythes et politique. C’est le cas des travaux d’Yves Citton (2010) dans son étude sur la « Mythocratie », terme qu’il emploie pour désigner le « règne de la fable » dans nos sociétés contemporaines. Résolument politique et engagé, son ouvrage invite à une « interrogation sur les pouvoirs propres du récit » (Citton, 2010 : 11). Cette approche relève donc autant de la question des mythes contemporains que des approches politiques. L’auteur montre que, ce qu’il nomme un « pouvoir de scénarisation » (Citton, 2010 : 12), vient dédoubler les formes de pouvoir plus dures, policier ou militaire par exemple. Ce pouvoir s’exprime dans les narrations utilisées par les discours politiques et, selon Citton, il est très présent dans les « imaginaires de droite » (Citton, 2010 : 15) et fait actuellement défaut aux forces de gauche qui n’arrivent pas à renouveler les histoires qui leur donneraient de nouveaux atouts. C’est pourquoi, après avoir étudié ces formes de pouvoir, l’auteur invite qu’elles soient mises à profit pour les politiques de gauches émancipatrices, par la construction d’un imaginaire qui unirait les multiples revendications de ce bord politique. La mythocratie désigne alors « la capacité du mythe […] à frayer de nouveaux devenirs, individuels et collectifs » (Citton, 2010 : 17).

Dans le troisième article de cette partie, Vitaly Buduchev étudie ce qu’il nomme le mythe du « petit patriote  », s’inspirant du mythe « petit bourgeois » de Roland Barthes (1957 : 214), à travers une analyse des jeux vidéo World of Tanks (2010) et Opération Bagration (2008), produits par le studio russo-biélorusse Wargaming. Le premier jeu met en scène des batailles contre les forces allemandes dont la fin est déjà écrite, alors que le second propose de mener plus prosaïquement des combats de tanks. L’auteur montre qu’en Russie et en Biélorussie, les jeux, en tant que médias, sont des affaires politiques, puisqu’ils ils permettent d’influencer l’opinion publique. Ces jeux reçoivent donc le soutien des autorités car ils contribuent à développer chez les joueurs un sentiment de patriotisme national. Les jeux vidéo sont ici utilisés comme des outils de médiation des discours politiques et, surtout, des représentations que la figure que l’auteur nomme le « petit patriote ». Ils travaillent l’histoire et héroïsent l’action guerrière. En ce sens, ils construisent un mythe politique servant de « prétexte pour s’autoglorifier et s’autoconvaincre de la grandeur de son pays, de son histoire et ses armes, de soi, en fin de compte ».

Dans une approche philosophique, Benjamin Gizard part de l’idée que les récits contemporains sur le capitalisme souffrent de l’emprise du cadre capitaliste lui-même et qu’il est nécessaire de sortir de ce cadre. Pour ce faire, l’auteur s’appuie sur la relecture marxienne de l’approche structurale des mythes de Claude Lévi-Strauss par l’anthropologue Terence S. Turner. Ce dernier propose deux dimensions du récit, la première métonymique ou combinatoire que Gizard appelle « syntagmatique », et la seconde métaphorique ou sélective, appelée cette fois « paradigmatique  ». Ces deux dimensions sont en tension et contribuent à la fonction poétique des récits, qui permet de comprendre la partie transcendante d’un mythe qui se répète, ici le contexte capitaliste. Pour finir, Gizard applique cette grille de lecture à l’histoire du capitalisme proposée par David Graeber (2011) qui en suggère une transcendantalisation progressive plutôt qu’originelle.

 Les mythes de notre époque

La troisième partie de ce numéro regroupe les textes qui prennent comme terrain d’étude les mythes de notre époque, car parler de mythes aux XXIe siècle amène aussi à la question des mythes contemporains. Dans ce cadre, il s’agit notamment de s’interroger sur les phénomènes sociaux et culturels qui ont marqué nos sociétés depuis les années 2000 de façon importante au point d’acquérir un statut qui en ferait des produits ou des expressions représentatifs et largement diffusés. Cet angle de réflexion renvoie aux travaux célèbres qui ont exploré les imaginaires propres à leur période sous l’angle des mythes, désignant par là aussi bien une portée symbolique qu’un imaginaire collectif s’exprimant dans les productions médiatiques. Dans son fameux ouvrage, Mythologies, Roland Barthes (1957) propose l’idée que le mythe est un système de communication. Plus précisément, il le définit comme un « système sémiologique second » (Barthes, 1957 : 187). Le signe qui serait l’association entre un signifiant et un signifié deviendrait lui-même un signifiant auquel un signifié de second ordre serait associé. Ainsi naîtrait le mythe, dans un second degré de signification. Tout peut alors devenir mythe, selon les usages sociaux qui en sont faits. Barthes a ainsi étudié de nombreux exemples qui sont restés classiques, comme la Citroën DS [12], présente sur la couverture de nombreuses éditions du livre, le catch ou encore les Romains du cinéma et leur frange. Quelques années après lui, Edgar Morin (1961) cite, pour sa part, le bonheur et l’amour de la jeunesse promus dans productions des industries culturelles. Le titre de l’ouvrage, L’Esprit du temps, traduit le terme issu de la philosophie allemande « Zeitgeist », qui désigne des systèmes de pensée collectifs propres à une époque. Ils pourraient ainsi être rapprochés de l’idée d’« imaginaire » marquant une période donnée.

À côté de ces deux auteurs bien connus, nous trouvons également l’ouvrage d’Alfred Sauvy (1967), paru peu après et intitulé Mythologie de notre temps. Pour cet auteur, les mythes ne sont que « de simples représentations de faits contemporains, qui se modifient à l’étude approfondie du sujet » (1967 : 8). À la différence de Barthes et de Morin, il ne s’intéresse donc pas aux grandes figures des imaginaires collectifs de nos sociétés mais propose de partir des oppositions entre des idées reçues largement partagées et des formes d’objectivité scientifique qui viendraient infirmer ces idées reçues. Dans ce cas, le mythe serait alors une idée fausse qui circule, une croyance populaire, ou encore une fable, qui ne résisterait pas à l’examen des faits. Il fait figurer parmi ses exemples le mythe de la guerre courte, celui du bon vieux temps ou encore celui de l’abondance.

Plus récemment et dans une perspective communicationnelle et médiatique, Pascal Lardellier s’interroge lui aussi sur ce qui relie les mythes et les rites contemporains. Selon lui, « le mythe contemporain ne dit pas qu’il est mythique, mais il reste porteur d’une puissante charge narrative et symbolique » (Lardellier, 2013 : 17). Autrement dit, il est difficile de savoir de prime abord ce que seraient les mythes d’aujourd’hui, car ils ne sont pas nommés ainsi : plutôt que de partir d’un corpus donné, il faut s’interroger sur les phénomènes qui disposent de cette puissance narrative et symbolique pour les caractériser comme des mythes. Il fait alors entrer dans cette catégorie nombre de mythes médiatiques, tels que des jeux télévisés ou séries, des romans, aussi bien que les nouvelles technologies informatiques et les réseaux sociaux numériques.

Pour commencer cette troisième partie, Ambre Abid-Dalençon étudie le mythe de la société de la communication à partir d’un corpus de presse spécialisée dans les domaines de la communication et du marketing. Comme le montre l’autrice, les discours de ces magazines contribuent à constituer un imaginaire et des mythes contemporains autour des questions de communication. Les auteurs et professionnels de ces supports catalysent et nourrissent ce mythe qui se retrouve aussi bien dans les discours généralistes que spécialisés. Ils contribuent à la répétition qui participe à former le discours en mythe. Enfin, l’autrice montre comment la question de la communication se conjugue à celle de la société de la technologie qui révèle une forme d’utopie technophile.

Dans son article consacré aux biopics cinématographiques de Steve Jobs et Mark Zuckerberg, Camille Roelens étudie la construction des figures mythiques du numérique du point de vue de la philosophie. Il montre comment ils font écho aux contextes contemporains dans lesquels nous observons le passage d’une « mythogénése holiste » à une « mythogénèse individualiste ». Pour cela, l’auteur va notamment s’appuyer sur les travaux de Paul Yonnet portant sur l’alpinisme, qui montrent comment la discipline sportive, à travers ses représentants prestigieux, passe d’un statut de réussite nationale à celui d’une réussite individuelle. Dans cette lignée, les deux figures majeures des industries numériques choisies comme cas d’étude représentent des incarnations archétypales d’un succès face au défi contemporain du devenir individu et participent donc à définir cet ethos.

Dans l’article suivant, Justine Simon et Magali Bigey étudient les réappropriations contemporaines des mythes du chat noir, figure bien connue des superstitions, dans lesquelles il est généralement associé au malheur pour qui le croise. Les autrices proposent une analyse comparée des publications dédiées aux chats noirs sur trois réseaux socio-numériques, à savoir Twitter, Instagram et TikTok, afin de saisir les imaginaires discursifs liés à cet animal. En ressortent trois principaux positionnements dans les usages et les discours : « la polémicité (positionnements sociopolitiques grâce au chat noir), la créativité (mythe du chat noir et culture populaire) et l’exposition de soi (moi et mon chat noir : différents degrés d’extimité) ». Dans une économie de l’attention, le symbole du chat noir est employé comme vecteur d’un récit de soi ancré dans le grand collectif des internautes.

Pour clôturer la partie thématique de ce numéro, Valentine Gourinat et Nathanael Jarrassé s’intéressent au mythe du cyborg. Les deux auteurs montrent qu’au-delà de la figure de fiction se joue une « vision de l’homme et de son corps à une époque technocentrée ». En effet, ce type de personnage questionne les corps appareillés ou les corps réparés qui font écho aux représentations sociales du handicap. Des fabricants de prothèses utilisent d’ailleurs l’imaginaire cyberpunk pour faire la promotion de leurs produits. Toutefois, les discours sur ces technologies idéalisent leur utilisation et laissent de côté nombre d’impensés, tels que le temps d’adaptation, l’entraînement ou encore l’usage très ciblé et spécifique de certaines prothèses. Le cyborg représente alors un vecteur d’idéologies et de valeurs collectives, notamment pour les promoteurs d’une vision de « techno-enchantement et de réductionnisme corporel ».

 À propos de deux approches récentes

Pour clore cette introduction, il est nécessaire d’évoquer brièvement quelques évolutions épistémologiques récentes des recherches sur les mythes [13]. Tout comme l’approche politique présentée précédemment, qui a pris une place importante depuis le début des années 2000, deux autres approches méritent que nous les évoquions.

Premièrement, Claude Calame a développé à la fin du XXe et au début du XXIe siècle, une approche pragmatique et située des mythes grecs. Pour cet auteur, il faut tenir compte des situations d’énonciation dans lesquelles les mythes s’expriment. Ils sont le « résultat d’une mise en discours singulière et spécifique, en relation avec une situation d’énonciation précise, une situation dans laquelle la narration fictionnelle réalise sa dimension pragmatique  » (Calame, 2000 : 48). Les mythes sont pris dans des « processus d’énonciation et de communication » (Calame, 2000 : 48). Pour étudier les mythes, il faut donc tenir compte des locuteurs ou des énonciateurs de ces discours, des publics, ainsi que du « contexte d’énonciation » (Schmitt Pantel, 2015 : 7). Cette prise en compte du contexte se retrouve également en ethnologie comme le rappelle Alban Bensa (2012 [2006] : 132) : « En tant que parole en actes, outil de communication politique, le récit prend tout son sens en regard du contexte d’interlocution où il intervient ». Suivant cette idée, chaque expression d’un mythe doit donc être pensée comme une « situation historique, sociale, idéologique » (Calame, 2011 [1996] : 10). Sortir de l’étude des textes uniquement et des perspectives herméneutiques pour s’orienter vers une approche discursive intégrant des perspectives propres aux sciences sociales permet de comprendre les mythes comme des productions ayant une place dans la vie sociale : « Le mythe est une réalité qui participe de la société, de la culture, de la religion, du politique. Son récit n’est pas seulement une performance éphémère et sans conséquence car il est performatif, et son impact sur les relations sociales est réel » (Schmitt Pantel, 2015 : 12). L’objectif n’est plus alors seulement de comprendre les modes de pensée des individus, qu’il s’agisse des idéologies des indo-européens chez Georges Dumézil, forme d’imaginaire collectif vague, ou des structures de l’esprit chez Claude Lévi-Strauss, mais bien de réintégrer les récits dans leurs usages sociaux : « Dès lors, la rationalité universelle n’est pas seulement celle de l’esprit humain en général mais aussi celle de la présence de tout énoncé au monde social, politique et intellectuel de son époque. Les mythes sont des pensées en actes qu’il est vain de vouloir déconnecter de l’histoire et du temps. Il faut donc les traiter comme des récits, ici et maintenant » (Bensa, 2012 [2006] : 130). Réintégrer les mythes dans l’histoire, c’est aussi tenir compte de leurs variations. Déjà durant la période antique, les mythes pouvaient prendre différentes formes, poèmes, hymnes, représentations théâtrales, récitations privées ou des formes écrites plus synthétiques et être présentés à des occasions diverses. Les conditions de leur réalisation participent donc à donner un sens particulier au récit, de même qu’« il s’adapte aux conventions du genre dans lequel il est énoncé  » (Schmitt Pantel, 2015 : 7). Ces possibilités d’adaptation ont également pour conséquence qu’il n’y a pas de forme pure ou canonique des récits qui serait atemporelle, « bien au contraire : non seulement les mythes varient, mais ils évoluent, comme toute tradition orale et toute forme de pensée liée à une organisation sociale et politique. Ils ont donc une histoire propre » (Schmitt Pantel, 2015 : 8). Ces travaux peuvent faire écho à ceux de Blumenberg, bien qu’ils se situent dans un tout autre champ de recherche et sur d’autres objets. Le philosophe allemand abordait l’histoire de la réception des mythes jusqu’à nos jours du point de vue de la phénoménologie alors que Calame reste dans le domaine de l’hellénisme [14].

La seconde approche qu’il nous semble intéressant de présenter dans le cadre de cette introduction est celle proposée par Sarah Iles Johnston (2018), dans son ouvrage intitulé The Story of Myth. Elle diffère des réflexions précédentes car l’autrice choisit de se servir des outils récents des sciences sociales, et plus particulièrement de la narratologie, de la psychologie, de la sociologie et de l’anthropologie, afin d’étudier les récits antiques. Son ouvrage aborde trois aspects des récits mythiques. Premièrement, Johnston s’intéresse à la narration ou, plus précisément, aux techniques narratives et aux manières dont elles permettent de donner de la crédibilité au récit. Pour ce faire, elle s’appuie sur les travaux de Joshua Landy (2012), qui montrent comment se servir des fictions pour transmettre des modes de pensée plutôt que des faits en s’appuyant sur des métaphores. Elle va également s’intéresser aux « relation parasociales [parasocial relationship] », c’est-à-dire aux liens à sens unique que des individus forment avec d’autres individus qui n’ont pas conscience de l’existence individuelle des premiers. Il peut donc s’agir de fans de star de cinéma mais aussi de liens avec des personnages de fictions qui contribuent à donner à ces dernières des formes de crédibilité (Johnston, 2018 : 24). Enfin, Johnston suggère que la narration épisodique des mythes encourage les publics à continuer à penser aux histoires et aux personnages entre les épisodes. L’autrice s’intéresse aussi aux « construction de mondes », concept qu’elle n’entend pas de la même manière que les études sur le magicien d’Oz ou la Terre du Milieu de J. R. R. Tolkien, qui s’intéressent à la formation d’une diégèse dense, mais qu’elle rattache à l’importance des relations entre personnages dans les récits qui narrent les histoires de dynasties entières ou d’ensemble de compagnons à travers différents textes (Johnston, 2018 : 25-26). Enfin, le troisième pan de son approche est consacré aux personnages des récits mythiques et à ce qui les rend plus réels. Pour Johnston (2018 : 27), les personnages antiques ne correspondraient pas aux typologies familières de personnages contemporains, notamment car il n’y aurait pas de forme canonique de ces personnages. De plus, les personnages mythiques sont plurimédiatiques et « accrétifs » (Johnston, 2018 : 27), c’est-à-dire qu’ils apparaissent sur plus d’un support et plus d’un type de média dans différentes instanciations. Chaque instance ferait croître les caractéristiques du personnage auprès des publics et participerait à développer un investissement cognitif et émotionnel envers lui. Les liens entre les publics et les personnages seraient ainsi renforcés. Les différentes manières dont les dieux sont présentés dans différents récits, à savoir comme des « autres invisibles » (Johnston, 2018 : 10) ou comme ayant une nature presque humaine, doivent être mises en relation avec le genre de texte selon qu’il s’agisse d’hymnes homériques ou de tragédie. L’autrice termine par une étude des noms de personnages et des jeux que font les poètes sur ces noms, en s’appuyant sur les connaissances implicites des publics des œuvres pour leur donner certaines significations.

Ces deux types d’approche sont différents à bien des égards et nous montrent qu’il existe des manières diverses d’aborder les mythes, l’une tentant de saisir les mythes grecs au plus proches des situations sociales et discursives « émiques » (Olivier de Sardan, 2008) et l’autre s’appuyant sur des élaborations théoriques issues de travaux sur les productions médiatiques contemporaines. Si nous constatons que la première a déjà eu une certaine influence dans le champ de recherche sur les mythes grecs, il sera intéressant de voir si la seconde, très récente, fera aussi école.

 Varias

Pour ce numéro, la rubrique Varia accueille trois articles. Le premier, intitulé « L’historicité comme outil pour questionner les tensions et dilemmes professionnels : le cas de consultants en développement organisationnel » est co-rédigé par Martial Rousseau et Jessika Cleary. Dans une perspective méthodologique et de sociologie clinique, les auteurs cherchent à comprendre comment l’historicité peut devenir un outil facilitant la construction d’un sens au travail pour les consultants, dans un cadre managérial. Ils discutent l’usage de cette méthode mise en œuvre dans le cadre d’une recherche doctorale, ses enjeux, ses atouts et ses limites.

Le second texte, « Promesses et appropriations d’une innovation bibliométrique : le recours au Scimago Journal Ranking au sein des Sciences Humaines et Sociales », écrit par Bastien Soulé, s’intéresse, dans une optique critique, aux méthodes d’évaluation de la recherche, en particulier dans le champ des STAPS et de la psychologie. Questionnant le fonctionnement des indicateurs bibliométriques (notamment du SJR), l’auteur se fixe pour objectif de révéler les conséquences de ce virage bibliométrique sur les communautés de chercheurs et met en lumière l’émergence d’un solutionnisme technologique ainsi que les enjeux politiques qui le sous-tendent.

Le troisième texte, « Des rapports aux morts : Freud ou James ? » écrit par Thierry Drumm fait écho à la thématique du numéro sur la fonction du symbole dans les récits de l’expérience de la relation qui s’éprouve entre les sujets et leurs morts. En s’appuyant sur l’héritage de la philosophie empirique et pragmatique de James, centrée sur les pratiques et les effets, l’auteur revient sur la dissociation qu’opère la pensée symbolique, à laquelle se réfère traditionnellement la psychanalyse freudienne, avec la définition d’une réalité éprouvée qui, à travers ce que les morts font faire et dire aux vivants, ne peut s’enfermer à n’être qu’une illusion subjective.

 Notes de lecture

La rubrique notes de lecture accueille quant à elle un texte portant sur un « mythe » particulier, celui des zones franches dans le Sud global. Louis Wilsot, revient sur l’ouvrage de l’historien et géographe Georges-Eddy Lucien, Le Nord-Est d’Haïti, la perle d’un monde fini : entre illusion et réalités (Open for business). Publié en 2018 aux éditions L’Harmattan, ce dernier analyse les conséquences socio-économiques et politiques de la création des zones franches, encouragées par les institutions internationales, dans la région nord-est de l’île caribéenne. Dans sa note de lecture, Louis Wilsot insiste sur les enjeux méthodologiques que représente la saisie des « rapports de forces et [d]es différentes formes de résistances que l’on peut rencontrer dans [c]es zones franches ».

Le comité de rédaction de la revue tient à chaleureusement remercier l’ensemble des experts qui ont permis la réalisation de ce numéro, pour leurs conseils avisés et leur suivi :

Bengie Alcimé, Maureen Attali, Sandra Boehringer, Mélanie Bost Fievet, Justine Breton, Yann Bruna, Solenne Carof, Rémi Cayatte, Daniela Cerqui, Hélène Cléau, John Cultiaux, Pierre Antoine Dessaux, Nicolas Le Dévédec, David Faure, Jean-Yves Feberey, Florent Gaudez, Alban Gautier, Géraldine Letz, Lucie Malbos, Fabien Martin-Juchat, Nicolas Meylan, Eleni Mitropoulou, Thomas Mohnike, Servanne Monjour, Christophe Niewiadomski, Frédéric Pailler, Julie Pasquer, Bruno Péquignot, Jean-Robert Pitte, Sandra Provini, Valérie Sacriste, Hélène Sellier, Marc-André Simard, Justine Simon, Sylvie Thieblemont, Jean Vandewattyne, Albin Wagener.

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Notes

[1] Traduction de l’auteur : « Le mot mythe est de façon notoire difficile à saisir. »

[2] Certains de ces termes sont parfois associés dans des recueils, tels que Mythologies. Mythes et légendes du monde entier (collectif, 2006). Il faudrait alors s’intéresser aux manières dont ces termes sont rapprochés, se chevauchent ou, au contraire, servent parfois à différencier des types de récit.

[3] Tolkien avait réécrit la Saga des Volsung sous le titre The Legend of Sigurd and Gudrún (2009) et Poul Anderson la Saga de Hrolf Kraki (1973).

[4] https://antiquipop.hypotheses.org/ (consulté le 02/06/2023).

[5] Les mythes ou récits mythiques sont généralement considérés comme des récits ponctuels alors que les mythologies sont des ensembles de récits ayant des liens entre eux.

[6] Traduit par l’auteur : « Fantasy provides new contexts, and thus inevitably new meanings, for myth ».

[7] Traduit par l’auteur : « accordingly, instead of spending much time simply identifiyng a particular Celtic myth in a work of modern fantasy, we should look at how the fantaisist appropriates from, engages with, travesties, and reconstitutes the myth. The modern reuse will never be the same as the original performance. Most myths come down to us stripped of context ».

[8] Traduction de l’auteur : « What is a sacred myth in one tribe is told for amusement in another ».

[9] Traduction de l’auteur de la préface : « ideology in narrative form » (c’est l’auteur du livre qui souligne).

[10] Leur carnet de recherche hypotheses.org est accessible à cette adresse : https://lesjaseuses.hypotheses.org (consulté le 29/02/2023)

[11] Pour une note de lecture critique de ce livre, voir la recension d’Esteban Giner et Gabrielle Lavenir (2022).

[12] Une voiture emblématique de la marque Citroën.

[13] En complément, le lecteur pourra se référer à la synthèse proposée par Philippe Matthey (2016) à propos de quatre ouvrages récents sur les mythes en français.

[14] Ajoutons que Blumenberg ne questionnait pas le terme mythe lui-même dans son usage scientifique comme le font Calame et les ethnologues inspirés par l’anthropologie culturelle. Il est toutefois possible de faire dialoguer ces approches (Di Filippo, 2016b).

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Pour citer l'article


Comité de rédaction, « Préface au n°36. Les mythes au XXIe siècle », dans revue ¿ Interrogations ?, N° 36. Les Mythes au XXIe siècle, juin 2023 [en ligne], http://revue-interrogations.org/Preface-au-no36-Les-mythes-au-XXIe (Consulté le 27 décembre 2024).



ISSN électronique : 1778-3747

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