Un séjour prolongé sur le terrain peut provoquer des demandes de retour de la part des enquêtés, en même temps que le chercheur y tisse des liens personnels forts. Pour y faire face, la réflexivité permet de comprendre la place du chercheur dans le groupe étudié et de définir le point de vue à travers lequel l’enquête est restituée. Plutôt que d’expertiser, il est possible de discuter des avancées et des orientations de la recherche directement avec les enquêtés, tout en respectant l’objectif de compréhension et les modalités d’accueil de l’ethnographe dans le groupe étudié. Au cours d’interactions routinières, l’enquêteur pré-positionne son analyse en faisant part de l’évolution de sa recherche notamment lorsque se modifie sa perception du terrain, et donc la place qu’il y occupe.
Mots-clés : retour, anthropologie réflexive, expertise, émotions
Perpetual feedback : communicating the investigation in a situation of reflexive ethnography
An extended stay in the field may cause the investigated people to ask for feedback, meanwhile the researcher develops strong personal ties with them. To face it, reflexivity allows an understanding of the researcher’s place in the studied group as well as a definition of the point of view through which the investigation is communicated. Instead of valuing, it is possible to discuss the progression and the orientation of the research directly with the studied group, while respecting the aim for its understanding and the conditions through which the ethnographer is welcomed. During usual interactions, the researcher pre-position the analysis by sharing the process of his/her research, especially when the perception of the field changes along his/her position in it.
Key-words : feedback, reflexive anthropology, expertise, emotions
C’était un vendredi après-midi et le Collectif les Morts de la Rue se présentait dans le cadre d’un séminaire organisé par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris. Face à une audience clairsemée, bénévoles et professionnels du funéraire se succédaient à la tribune pour évoquer les enjeux éthiques de « la mort aujourd’hui ». Quand vint mon tour, je me retrouvai face à une salle dont les derniers spectateurs étaient soit des enquêtés que je connaissais bien, soit des gens que j’avais prévu de voir. Je pivotais machinalement sur ma chaise, comprenant qu’en parlant ainsi de mon enquête à mes enquêtés, quelques désagréables écueils étaient à prévoir…
Comment continuer l’ethnographie lorsque différents enquêtés demandent à prendre connaissance du travail du chercheur ? Surtout, comment le retour peut-il s’inscrire dans une pratique réflexive de la recherche et contribuer à son approfondissement ? J’aborderai ces questions en puisant dans ma recherche doctorale sur la prise en charge administrative et associative des défunts sans ressources suffisantes. L’enquête vise notamment à mieux comprendre les motivations des bénévoles intervenant auprès des morts indigents, et comment ils font usage (ou non) de la mort comme moyen d’interpellation publique. C’est dans ce cadre que je pratique une ethnographie du Collectif les Morts de la Rue, auquel j’ai adhéré. Cette association se donne pour mission d’interpeller le public sur la vie et la mort à la rue depuis 2002. Depuis 2004, elle reçoit un financement de la mairie de Paris pour accompagner au cimetière parisien de Thiais les cadavres non réclamés. Elle organise donc un rituel pour tous les isolés : des personnes de la rue jusqu’aux personnes âgées dont la famille n’a pas été retrouvée en passant par des bébés. Mais au vu de ses origines et comme son nom l’indique, le message public du Collectif reste focalisé sur la problématique de la rue.
Comprenant une enquête de terrain abordant le contexte de l’association et d’autres villes avec des groupes semblables, des observations participantes et des entretiens semi-directifs et compréhensifs, ma recherche m’a souvent amené à communiquer des résultats d’investigation et à prendre position en fonction de ces derniers. J’aimerais donc étudier ici ces situations de retour aux enquêtés sous l’angle d’une pratique réflexive, c’est-à-dire, selon P. Corcuff, d’« un retour sur soi, son histoire, ses outils et ses relations avec les enquêtés » [1]. Ce retour sur soi est assimilable à un détour pour comprendre les autres, et son expression à une manière de contextualiser l’enquête que l’on restitue. Je tenterai de voir en quoi cet exercice d’aller-retour représente une opportunité de recherche. Dans un premier temps, j’exposerai l’importance de l’exercice du retour pour le chercheur. Dans un second temps, j’analyserai trois difficultés inhérentes au retour : l’approfondissement de la recherche après avoir publiquement communiqué les premiers résultats aux enquêtés ; les perturbations du terrain par la recherche à travers le cas d’un retour auprès d’administrations ; les demandes d’expertise. Enfin, pour répondre à ces difficultés, j’analyserai dans un dernier temps mes expériences de retour comme un exercice permanent permettant de se positionner sur son terrain et donc de communiquer progressivement avec les enquêtés tout en avançant dans sa recherche.
Parler avec ses enquêtés, leur présenter des résultats ou des pistes, peut être considéré comme un moment constitutif de l’activité scientifique [2]. Pour B. Bergier, s’insérant dans la veine réflexive, il s’agit du moment où la recherche passe du privé vers le public et de se pousser « à aller au bout de ses idées » [3] par l’instauration d’un dialogue. Il peut aussi s’agir d’un travail particulier. Par exemple, Corcuff s’étant engagé à rendre un rapport au syndicat qu’il étudiait, avait donc produit un document « qui se voulait plus pédagogique que le mémoire universitaire » [4]. Le retour permet aussi de voir si l’étape de l’analyse n’a pas brouillé la compréhension que l’enquête avait permis d’atteindre. Dans tous les cas, c’est une affaire sérieuse qui demande un minimum de réflexion méthodologique.
Lorsque le retour se produit une fois la recherche terminée, et par le biais d’une publication, les enquêtés peuvent se sentir dupés. C’est ce qui est arrivé lors de la publication d’un article de D. Naudier [5] : la romancière qui était le sujet de son étude vécut mal la façon dont la recherche requalifiait son œuvre littéraire, notamment selon une perspective stratégique. Le débat subséquent échappa en partie à la sociologue, mais également à l’enquêtée dont on analysa le droit de réponse au prisme de la curiosité scientifique [6]. On aurait sans doute tort de négliger l’importance du ressenti des enquêtés face à l’utilisation de leur vie dans un cadre scientifique, et on peut donc s’accorder avec D. Naudier sur le fait que « nous faisons partie du monde social et que nos écrits produisent des effets sur ceux qui les lisent. » [7]
J’avais ce problème à l’esprit au moment de rendre mon mémoire de master. Lancé dans la course aux financements doctoraux, je redoutais de froisser par mon discours universitaire l’association qui m’avait accueilli et donc de compromettre la suite de l’enquête, en même temps qu’apparaitre trop sensible ou trop proche pouvait compromettre mon statut scientifique et donc mon financement. Au final, la coordinatrice de l’association, Cécile, réagit laconiquement lorsque je lui fis part de mes doutes : « Pour le reste, fais au mieux. » Je tentais donc de produire un texte dont toute l’analyse pouvait être discutée en fonction de mon implication dans la recherche : un résultat serait critiquable et interprétable à partir des conditions de l’enquête. Déterminé à marquer le coup, j’imprimai plus d’une douzaine de mémoires. Cette attitude annonçait la tension entre reconnaissance de la recherche, perturbations des événements étudiés et respect des enquêtés.
Au moment où le chercheur rend un travail et s’il souhaite poursuivre l’enquête, il se doit être très attentif aux réactions des enquêtés. Dans mon cas, ma manière de diffuser le travail manifestait très tôt mon envie de prendre position (sans toujours le reconnaitre) sur le terrain étudié. J’eus un premier avis positif de Cécile qui mit mon mémoire à disposition de tous au local de l’association. Alors que j’avais accepté de le faire avant mes futurs entretiens, je retardai indéfiniment son envoi électronique et collectif. Puisque j’essayais de comprendre des motivations, je ne voulais pas que les futurs entretiens se positionnent a priori par rapport à mon travail. Je savais que les lectures au local seraient très limitées et l’enquête reprit donc jusqu’au point où je me sentis capable de rendre compte de mon travail dans des interactions de face à face.
Concrètement, j’avais identifié deux origines différentes des motivations des bénévoles : d’abord les militants principalement concernés par la problématique des SDF et l’interpellation politique en usant du thème de la mort, ensuite ceux plus proches de la thématique plus générale de l’isolement ou de l’abandon telle qu’elle fut notamment formulée au moment de la canicule de 2003 [8]. Bref, pour reprendre l’expression d’un bénévole : ceux qui gueulent et ceux qui pleurent. Ce clivage se retrouve d’une ville à l’autre. A Paris, les deux groupes coexistent tout en ayant des activités différentes et reconnaissent plus ou moins leur présence. Face aux bénévoles troublés par la question de la rue on trouve ceux qui se sont battus pour que l’association se trouve dégagée de toute implication dans les accompagnements de bébés abandonnés, estimant qu’en plus de leur difficulté émotionnelle, ils diluaient le message politique du Collectif portant spécifiquement sur la vie et la mort à la rue. J’ignorai ce clivage pendant plusieurs mois avant de prendre conscience de son importance. Lui faisant face, j’en devins constitutif. Non seulement analyser cette tendance contribuait à remettre en cause l’unité du Collectif et à questionner son partenariat financé avec la mairie, mais me positionnait aussi dans le débat puisqu’au vu de ma propre pratique de bénévole, je développais un engagement personnel. C’est notamment dans les entretiens que je me permettais d’exprimer ma vision de ce clivage, lorsqu’il s’agissait d’approfondir ce qu’un bénévole en pensait. A l’extérieur, il m’est arrivé de défendre l’apport d’un tel clivage lorsqu’une personne critiquait la posture publique du Collectif. Ce fut notamment le cas auprès d’une association partenaire en province, et mon incapacité à laisser passer une critique pourtant en accord avec mes idées personnelles signalait mon intégration à l’association parisienne et ma révérence pour cette dernière.
Ma proximité avec les enquêtés compliquait la divulgation de leurs caractéristiques. Dans mon mémoire l’anonymat me paraissait être illusoire, et il fut donc limité. Dans un milieu d’interconnaissance caractéristique de l’ethnographie, il est facile de reconnaitre un collègue ou un bénévole derrière un pseudonyme. En plus des discours sur l’association et des actions des administrations, se posait le problème des discours personnels sur l’expérience de la mort, ou sur la vie intime de la personne. Autour de thèmes sensibles, de profondes blessures sont décrites au moment des entretiens et articulées comme constitutives de l’engagement bénévole. Si certains cas ne me posent pas de problème lorsque les entretiens se sont passés d’une manière particulièrement ouverte, il arrive que l’enquêté se rapproche de la confession et ne parle de certaines choses qu’au prix d’initiatives de ma part (telles que la divulgation de mes propres expériences personnelles). Le statut de l’enregistrement n’est alors pas toujours évident : au contraire du reportage, la thèse n’a pas de finalité très claire pour beaucoup d’enquêtés [9]. On peut alors essayer, dans la mesure du possible, de retourner vers les enquêtés pour s’assurer que leur confiance est renouvelée. Personnellement, je m’abstins généralement de le faire pour le mémoire, estimant avoir bien exposé l’issue de l’enquête aux enquêtés. A l’époque, je n’avais pas encore fait face aux cas autrement plus sensibles que je découvris plus tard. Travail de longue durée, l’écriture de la thèse demande donc des arbitrages plus sérieux, et des précautions plus poussées, négociées avec les enquêtés. Comme le note D. Naudier [10], ces négociations demandent alors une explication dans le compte-rendu d’enquête, afin de prévenir les travers de l’analyse. Le problème de la préservation de la vie privée qu’elle pose pour les personnes publiques [11] se retrouve en fait pour nombre d’enquêtes ethnographiques.
La recherche se poursuivant, je continuai mes entretiens en abordant systématiquement la question des motivations des bénévoles par rapport à la ligne de revendication politique du Collectif. Un Jour, Cécile me raconta qu’une bénévole l’avait appelée pour lui confier son étonnement face à ce clivage, et qu’elle avait commencé à y réfléchir depuis que j’avais abordé le sujet en entretien. Troublé par cette rétroaction, je prenais conscience de ma ‘double casquette’. Peut-être qu’à force de me considérer comme parfaitement intégré, j’en venais à oublier les raisons de ma présence dans le groupe.
Auprès des administrations, peu propices à l’anonymat (poste identifiable ou hiérarchie prévenue), ma position fut toujours clairement identifiée et parfois associée à une source d’ennuis : c’est donc avec elles que les situations de retour furent les plus sensibles.
La rencontre des fonctionnaires ou employés me permettait d’analyser le mécanisme de la prise en charge des défunts, mais jamais de comprendre tout à fait leur expérience quotidienne. Aussi, les réseaux professionnels obéissent à des logiques de responsabilité et de réserve particulières.
J’ai longtemps été animé par l’idée de révéler, à côté de mon analyse sociologique, des pratiques douteuses de la part des administrations. Mon insistance à propos de questions sensibles telles que la supposée dégradation accélérée des corps finit par ennuyer certains fonctionnaires. Dans mon mémoire, je rendis compte du caractère parfois tendu des relations d’enquête à Paris et racontai notamment une scène où la directrice du cimetière de Thiais apprenait devant moi que son responsable technique pensait qu’un système de dégradation rapide des corps était installé alors même qu’elle le pensait illégal. La confusion répétée autour de ce sujet m’amena à discuter les différentes versions des fonctionnaires et à tenter de les expliquer en fonction de leur place dans la hiérarchie et d’une forme de « bricolage » [12]. En situation d’enquête prolongée, il n’y a rien d’étonnant au fait de rencontrer des contradictions (surtout sur un sujet technique) et de les analyser. D. Bizeul [13] note que les opinions d’une même personne changent en fonction des situations et des interlocuteurs. C’est une des vertus premières de l’ethnographie : briser le sceau du discours officiel ou prémâché. Plus le chercheur passe de temps avec les enquêtés plus il est à même de repérer interprétations et contradictions, chez un même individu et entre plusieurs personnes.
Pourtant, lorsque la connaissance des administrations est remise en cause, le texte final peut être mal reçu, notamment lorsque les responsables ont l’impression d’avoir donné de leur temps pour éclaircir tout malentendu. Dans mon cas, j’envoyai un exemplaire personnel à la directrice de Thiais, et un autre à sa hiérarchie (à leur demande) non sans l’arrière pensée quelque peu vaniteuse de pouvoir enfin exposer leur défense que je jugeais ridicule. Aussi, il m’était impossible de rendre anonyme la directrice du cimetière (puisqu’il n’y avait qu’un cimetière concerné). Celle-ci avait fait preuve d’une attention et d’une communication exemplaires, je pris donc les devants et mentionnai clairement (avec son accord) d’où venaient mes informations. Les choses étant replacées de mon point de vue, je pensais m’attirer l’animosité de la hiérarchie et laisser un peu d’air à la responsable. Plus tard, j’allai m’enquérir de la réaction de ses supérieurs auprès d’elle. Elle commença par dire qu’ils n’avaient pas apprécié l’histoire de la dégradation rapide et qu’il y avait eu quelques récriminations avant d’être rapidement interrompu par son adjointe. Lapidaire, celle-ci exprima le peu d’impact des mémoires universitaires. La remarque coupa court à la discussion.
Bien plus embarrassante fut la réaction des services municipaux de la ville de Metz, objet de ma comparaison. L’anonymisation complète était impossible : il s’agissait de petits services dans lesquels je finis par être connu et mes interlocuteurs reconnus. J’avais notamment communiqué avec une remplaçante du Centre Communal d’Action Sociale (CCAS). Lors d’un entretien enregistré, celle-ci géra par téléphone une situation confuse où l’élu d’un village voisin essayait de leur faire enterrer un cadavre dont il ne voulait pas au motif que la personne était originaire de Metz. J’avais enregistré une petite partie de la conversation. Lorsqu’elle raccrocha, je tentai de la faire parler sur ce qui venait d’être dit, mais elle changea immédiatement de sujet. La scène était exemplaire du problème de la charge des petites villes avec de grosses structures hospitalières et la tractation était trop originale pour être ignorée. Surtout, j’appris plus tard que le défunt avait été enterré sans que l’association partenaire ne soit prévenue. Choqué par le procédé et inquiet du manque d’expérience de l’association locale, j’insistai lourdement sur l’événement dans mon mémoire. Après son envoi, la titulaire avait repris son poste. Elle accepta de me rencontrer « pour un entretien informel de retour sur [mon] écrit ». Le jour venu, l’employée me demanda de ne pas prendre de notes et annonça sa formation en sociologie. Elle adopta un style incisif mais contenu, proche de l’ironie, comme pour me faire reconnaitre que sous cet exercice universitaire se trouvait une forme de journalisme gonzo [14].
Assis face à elle, j’écoutais ses critiques sur ma mauvaise interprétation du discours de la remplaçante et sur mon analyse des bénédictions catholiques systématiques par l’intermédiaire des pompes funèbres (que je n’avais pas rencontrées). Elle démentit formellement, de même qu’elle démentit que la ville ait pu payer pour l’enterrement d’un indigent d’une commune voisine. Critiqué dans ma capacité d’investigation, je finis par me contenter d’une réponse de principe : tout cela ne changeait rien aux tractations dont j’avais été le témoin.
Point alors une considération déontologique : je fus profondément touché d’apprendre que la personne qui m’avait renseigné avait eu un rappel à l’ordre pour avoir tenté de régler cette affaire devant moi. J’expliquai que j’avais enregistré une partie de la scène sans la prévenir, mais mon interlocutrice tourna en dérision ma défense. A ses yeux, une faute avait été commise, et il y avait eu des conséquences que mes protestations tardives ne pouvaient pas changer. Même pour une simple réprimande, je ne pouvais me défaire de l’idée que j’avais de nouveau exploité l’amabilité d’une personne au risque de mettre sa réputation en danger. Puisqu’en plus on me soutenait que j’avais exagéré les faits, tout cela avait été en vain. La personne conclut la séance de retour en me prévenant que ce que j’écrivais pourrait bien me fermer des portes. Il reste pourtant difficile de considérer qu’enfoncer les portes ouvertes est la mission première du chercheur.
D’abord, je remis en cause ma capacité d’interprétation et décidai de procéder à des vérifications. Non sans surprise, j’appris entre autres qu’il y avait bien une bénédiction systématique des corps abandonnés, et l’explication fournie (une forme de discours déiste) correspondait tout à fait avec le premier entretien. Enfin, on me confirma que non seulement Metz avait bien récupéré le cadavre mais qu’en plus la ville avait payé pour son enterrement, et ce en dépit de la dénégation de la titulaire.
On aurait tort de négliger l’opportunité que représente une telle séance. D’abord, elle permet de recueillir la parole de ceux dont on n’a pas atteint la compréhension profonde. Ensuite, elle m’a permis de voir quel était véritablement le point de vue de mon enquête : celui d’un bénévole habitué aux exigences du Collectif parisien, mêlé à celui d’un chercheur déterminé à s’imposer. Ce retour éclairait l’enquête quasi-policière que j’opposais aux administrations, et signalait la position particulière que je cherchais à occuper sur le terrain. Enfin, ce fut un appel à vérifier les faits, dont on n’est jamais expert.
Quand Emmanuel Hirsch, directeur de l’Espace éthique à l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), m’a demandé d’intervenir avec le Collectif lors d’une journée à destination d’étudiants, j’ai d’abord refusé. Les réunions organisées par le Collectif sous son égide constituent une activité particulière ne rassemblant qu’un petit nombre de bénévoles. Ceux-ci viennent discuter avec d’autres associations des aspects éthiques de leur démarche. Il s’agit d’une activité dans laquelle je me sens toujours observateur extérieur et non bénévole. Au contraire des accompagnements au cimetière ou des réunions au local, mon manque d’expérience s’y fait parfois sentir. Enfin, mon identification à Sciences Po avait déjà donné lieu à discussion. Mais, poussé avec insistance dans le rôle du « sociologue de service » comme on me désigna alors, je finis par céder. On me demandait une forme d’expertise sociologique sur le sujet des manifestations publiques de l’association. De nombreuses personnes auraient pu en parler mieux que moi du point de vue des faits et mon analyse n’était pas encore développée. Je trouvai une porte de sortie en demandant à insister sur d’autres villes, même si je ne pouvais pas ignorer Paris. Je prévus un exposé descriptif et lisse, évitant de mentionner les tensions internes.
Le jour même, deux événements avaient été prévus en même temps et on nous annonça que cette séance au public disparate servirait de répétition à l’année suivante. Les bénévoles que je connaissais se succédaient à la tribune. Des membres d’une association amie firent un exposé très émouvant. Suivirent d’autres témoignages, militants ou touchants. Quand vint mon tour, je savais que je n’avais rien d’émotionnel à partager sur le sujet et que mon analyse avait alors peu de recul. Dernier orateur, je montai en me préparant à une prestation minime mais sans vague. Je demandai à Cécile de rester à côté de moi afin de conclure la séance : l’organisateur avait quitté la salle. Face à moi, une caméra et quelques enquêtés abreuvées des émotions des exposés précédents, fatigués en cette fin d’après-midi. J’effectuais ma présentation comme un automate lorsque Cécile m’interrompit. Je venais de dire qu’à Marseille, les bénévoles liaient leur activité publique à une volonté d’accompagner les défunts au cimetière. Cécile annonça brutalement : « Ca n’a rien à voir. » Contesté dans la position d’expert que j’avais acceptée, sous les yeux des gens qui m’accueillaient depuis plus d’un an, et face à la caméra, je digérai rapidement cette intervention convaincue. J’étais péniblement renvoyé aux premiers jours d’investigation et aux regards de surprise qui m’étaient lancés quand je ne comprenais pas quelque chose. Cécile, prenant conscience de la vivacité de son intervention, s’excusa. Je lui demandai au contraire de s’exprimer, soucieux de briser une fois pour toute cette image d’expert. Elle expliqua ce que je n’avais pas voulu dire : le Collectif fait une différence dans ses activités entre les défunts morts de la rue et tous les autres accompagnés au cimetière pour la mairie (isolés), surtout, il milite publiquement uniquement pour la première catégorie. Au prix d’une désagréable remise en cause publique, je réappris à quel point le sujet était important pour certains bénévoles qui ne pouvaient pas accepter que plane un doute sur la question, même si cela voulait dire remettre en cause l’unité de l’association.
Si certains enquêtés semblent demandeurs d’une « intervention sociologique » (A. Touraine) qui leur permettrait de comprendre « ce qu’il y a de projet dans leur propre action » [15], il semble toutefois que le chercheur n’en sache jamais plus sur ces actions que les acteurs, et que son expertise ne fasse que répondre à sa propre perception du terrain. Même sur de simples points techniques, l’ethnographe doit donc fuir l’estrade. Voilà pourquoi je propose de rendre l’enquête visible, communicable et critiquable au moment où elle se fait, et parfaitement insérée dans les interactions routinières avec le groupe.
Dans mon enquête, les situations de retour m’ont à chaque fois permis de comprendre la ‘topographie’ du terrain. J’avais choisi un point d’entrée qui n’avait, au départ, rien d’évident : je contactai pour la première fois l’association dans un climat de curiosité et de méfiance. La découverte de leurs actions me rapprocha irrémédiablement de certain d’entre eux. Au fil des jours, j’ai compris de quel côté de l’opposition pleurer/gueuler je finissais par me trouver et me retrouver. H. S. Becker [16] a déjà noté qu’il est difficile de ne pas prendre parti : il faut expliciter d’où on parle. Faire face à son positionnement, c’est comprendre en quoi il modifie l’enquête, et cela ne peut se faire sans les enquêtés.
L’enquête [17] menée par S. Dufoulon, J. Saglio et P. Trompette sur un navire de guerre revient sur l’importance de la voix des enquêtés dans la recherche. Après avoir transmis un premier document écrit à ceux avec qui ils partageaient l’intimité du bateau, ils expliquent comment leur texte donna lieu à une réception problématique mais sujette à débat. Au terme des discussions, les chercheurs mettent en avant le bénéfice pour l’analyse de cette confrontation avec les enquêtés : le conflit permet de mieux comprendre les positions qui s’affirment, mais aussi d’approfondir l’analyse. J’aimerais, à leur suite, insister sur l’intérêt de considérer à sa juste valeur la parole des enquêtés pour les comprendre, mais insister également sur la possibilité de mieux cerner le point de vue de l’enquête et donc ses angles morts. Aussi, à la différence de ces chercheurs qui ne pouvaient jamais prétendre à être des militaires, je présente ici un autre cas : j’ai le statut de bénévole. Intégré, il faut tenter de comprendre les interactions entre les dynamiques que l’on cherche à étudier, le rôle changeant que l’on se construit, et la recherche que l’on mène.
L’échange avec les enquêtés est alors primordial. Dans une démarche empirique, même le cadre d’analyse est discutable. J’ai ainsi demandé à un enquêté comment les articles scientifiques qu’il présentait comme cadre intellectuel de l’association pouvaient négliger de façon aussi évidente le travail des bénévoles. En lui expliquant comment j’ai moi-même changé mon fusil d’épaule (la littérature ne rend pas compte de mon expérience du terrain), je lui permets de discuter mon raisonnement analytique en fonction de mon enquête et le laisse m’enjoindre à creuser certaines questions plutôt que d’autres : il est acteur de ma recherche. Communiquer ainsi l’enquête permet de recueillir des réactions indicatives de son propre positionnement et du vécu des enquêtés : la posture réflexive interroge les interactions avec les autres pour comprendre et faire comprendre d’où l’on parle. S. Kleinmann [18] raconte ainsi avoir ignoré des étudiants Noirs sur son terrain en ne prenant pas en compte la place qu’elle occupait dans la structure étudiée et ses propres émotions à leur sujet.
Quand les groupes où les activités étudiées comportent une part de débat et de discussion, le chercheur est en droit d’y participer pleinement. Il peut alors accepter sa double identité et finir par la banaliser de la même manière que d’autres bénévoles banalisent d’autres caractéristiques. Dans son optique de compréhension, le chercheur n’a besoin de cacher ni la raison de sa présence ni sa réflexion. Il existe auprès des enquêtés de vrais espaces de libertés permettant de revenir sur sa recherche. Plutôt que de privilégier les retours écrits ou universitaires, il me parait possible de saisir les opportunités d’interactions plus personnelles pour exprimer comment ce que l’on fait et voit perturbe et génère le questionnement scientifique. Les entretiens sont une possibilité. Dans l’extrait ci-dessous, une bénévole ressent une gêne avec le nom de l’association. Quand elle se demande si elle est la seule à penser ainsi, je livre alors largement ce que l’enquête m’a appris :
[bénévole] « Je sais pas si je suis la seule, j’espère que non ! [rit]
[moi] Non, je crois pas, non.
Mais il m’a semblé entendre samedi, je crois que… Je sais pas si c’est Cécile ou si c’est Christophe Louis [président de l’association] qui a parlé justement de… [hésite] Pas de changer, mais…
Une réflexion sur le nom, oui.
Oui, une réflexion. Mais pourquoi ? Parce que là, je ne vois pas pourquoi ils ont parlé de ça.
Euh, moi je pense que c’est à cause de ce qu’on est en train de discuter là.
De ce dont on parle.
Oui. Je… Là, ce n’est que mon avis personnel…
Oui, oui.
Là, ce que tu dis, cette espèce de confusion entre les deux… Il y a beaucoup de gens qui la ressentent.
Ah, ben ça me rassure.
Je… Dans les entretiens que je fais, je pense que ça se remarque. Et ça se ressent encore plus en dehors de Paris. C’est-à-dire que, comme je te disais avant, Lyon… Eux, vivent très mal la façon dont Paris se présente publiquement. C’est-à-dire vraiment ‘Collectif les Morts de la Rue’. Alors, eux ils trouvent bizarre justement ce titre. Ils trouvent bizarre qu’on parle que des SDF etc. … Et je pense que là, la tête du Collectif, donc Cécile, Christophe, le conseil d’administration… commence à se rendre compte qu’il y a cette confusion qui existe. Ah ! Et qu’il y a des gens qui le vivent peut-être différemment. Alors… D’accord… [Je continue mon explication] Oui, oui, oui. Non mais c’est vrai que ce que tu dis, ça me rassure, parce que moi ça me gênait un petit peu. On n’ose pas trop en parler. Les morts de la rue. Ca me gêne de dire ‘les morts de la rue’ alors que ce n’est pas les morts de la rue, voilà. »
Les entretiens se basent sur des éléments empiriques et viennent donc souligner et creuser ce que repère l’enquête préliminaire. Je deviens acteur des clivages, et une telle divulgation de la recherche en cours peut mener à une forme d’accord, ou, comme dans d’autres entretiens, à une controverse. Chaque entretien est différent sur le point de mon implication. Mais quand il est possible d’obtenir un échange mutuellement informé par le biais d’un retour sur l’enquête, je n’hésite pas à faire réagir les enquêtés sur le travail en cours. Les réactions doivent ensuite être interprétées dans le contexte de l’entretien et de mes propres biais d’enquêteur, bref, en usant de réflexivité : l’analyse que je livre dans cet extrait est aussi liée à ma confiance en cette personne avec qui j’ai vécu des moments intenses lors d’un accompagnement. Je lui révèle ce que j’ai moi-même appris parce que son questionnement renvoie à un clivage que je découvre, et qui me gêne comme elle la gêne. Dans d’autres entretiens, je comprends que je ne peux pas autant partager : nous n’avons pas les mêmes expériences. Le clivage s’expose alors sur un autre mode, certes, mais il signale que mon expérience de bénévole est limitée. En tant qu’ethnographe, je ne vis qu’avec une partie de l’association, j’ignore ceux que l’émotion et mes premières questions de recherche ont éloignés de moi. Quand je suis publiquement interrompu ou quand je partage une analyse en entretien, je suis renvoyé à ma position dans le groupe. C’est la réflexivité qui permet de comprendre ce que l’on ignore et pourquoi on l’ignore. L’exercice réflexif ne sert donc pas à se recentrer sur soi-même, mais au contraire à comprendre l’autre dans les limites ou opportunités constitutives de notre interaction. Là où la parole est autorisée selon les modalités propres au groupe, comme en réunion, il est possible de pré-positionner le travail final, d’effectuer des retours sur un point précis. Plutôt que de prétendre ne rien savoir, je donne des informations ou des avis personnels au Collectif parisien sur les administrations que je rencontre ou sur mon enquête en province, je parle de mon questionnement. Il s’agit d’assumer l’enquête plutôt que de la cacher, de cerner ses propres biais, et d’analyser l’influence de ce retour permanent qui est toujours partiel, parfois intéressé. Au-delà de l’enquête, le chercheur ne peut pas ignorer totalement ses propres convictions, et peut toujours essayer de les frotter au terrain sans en briser les règles ou en changer radicalement le visage. Par exemple, P. Descola, confronté au fond de l’Amazonie au phénomène de la violence domestique, fait face à l’épreuve « du devoir de neutralité » [19] sans pour autant s’abstenir de tenter de raisonner en privé un des Indiens qu’il connait. Bien sûr, l’ethnographe obéira plus souvent aux contraintes du rôle qu’il a endossé qu’il ne parlera de sa recherche. Le retour vient s’insérer dans les espaces d’expression dévolus à ceux dont le chercheur a pris la perspective. Il a donc des limites. Même dans les groupes où la discussion est possible ou encouragée, l’ethnographe ne coupera pas aux heures d’écoute, à l’observation silencieuse des détails, et à l’apprentissage des tâches : il est impossible de communiquer l’enquête avant de l’avoir faite. Le retour est progressif, comme une montée précautionneuse en puissance. Quant à l’analyse, dans la veine réflexive, l’essentiel est de la présenter d’une manière discutable en fonction du contexte de l’enquête et de l’implication du chercheur auprès des autres. Ainsi, sa discussion peut se faire sur une base empirique et circonstanciée, un socle de connaissances partagées, par exemple lorsqu’on me reproche d’avoir négligé les pompes funèbres messines. Le sociologue ne fait alors que proposer une interprétation qui n’épuise pas le réel. Il règle peut-être ainsi une partie des problèmes de « traduction » [20] ou de « langage » [21]. Pourtant, D. Bizeul [22] note que la présence du chercheur et de son enquête dans la recherche finale constitue un clivage profond des sciences sociales. Peut-on considérer comme F. Weber qu’il est possible d’atteindre une connaissance de cas « sociologiquement justes mais socialement faux » [23], c’est-à-dire dont sont exclus les références à un contexte particulier ? Plutôt que d’arriver à un produit sociologique aseptisé de ses contingences et de ses particularités, il faut se soucier de l’enquête quand elle se fait. Autrement dit : négocier avec les enquêtés leur implication et la divulgation de leur vie, rendre compte des refus en tentant de les expliquer, et comprendre les effets des conditions d’enquête sur l’analyse. Sans se demander jusqu’à quel point la dimension déictique de J.-C. Passeron [24] est importante, il est clair que pour les enquêtes de terrain elle parait prépondérante tant les contextes locaux, historiques ou personnels jouent dans la compréhension d’activités routinières. Voilà pourquoi dévoiler l’enquête au fur et à mesure permet d’atténuer la possible violence de l’analyse.
Indiscutablement, le chercheur aura des dilemmes à affronter, des arbitrages à effectuer qui, même mauvais, doivent être pris en compte dans l’analyse. Comme le dit éloquemment A. K. Daniels en parlant de la découverte mutuelle des enquêtés et de l’enquêteur dans le cadre d’une recherche : « It is in the nature of fieldwork that you are likely to find yourself up to the waist in a morass of personal ties, intimate exchanges, and lofty and base sentiments as your own sense of decency, vanity or outrage is tried. » [25] Confronté à la proximité de ses enquêtés, le chercheur peut associer les personnes concernées au produit final de sa recherche. C’est en se positionnant lui-même par rapport à elles qu’il établit un rapport de confiance et définit le point de vue de son enquête. De celui-ci découle la compréhension qui anime sa recherche et qui doit pouvoir être interrogée au prisme du contexte de l’enquête et de la collecte des données, dégageant ainsi la spécificité du discours scientifique. Il reste toujours utile de préciser que l’objet de l’étude n’est pas le chercheur lui-même [26]. Comme toutes les autres méthodes, la réflexivité, le positionnement sur le terrain et le retour peuvent se solder par un échec. Ne pas avoir abouti à une meilleure compréhension du groupe étudié, c’est-à-dire avoir échoué à analyser comment il s’organise jusque dans ses dissensions, dans quel contexte, et avec quelles justifications, est le plus grand danger pour l’ethnographe. Pour réussir, la réflexivité et le retour sont à voir comme une recherche d’humilité. Les temps n’ont effectivement pas changé depuis que Claude Levi-Strauss exprimait une reconnaissance d’apprenti aux Indiens, lors de sa leçon inaugurale au Collège de France en 1960. A jamais, et même en situation de retour, l’ethnographe reste un élève.
Becker Howard Saul, « Whose side are we on ? », Social problems, 14/3, 1967, p. 234-247 Bergier Bertrand, Repères pour une restitution des résultats de la recherche en science sociale, Paris, L’Harmattan, 2001 Bizeul Daniel, « Le récit des conditions d’enquête : exploiter l’information en connaissance de cause », Revue française de sociologie, 39/4, 1998, p. 751-787 Chauvier Eric, « Restitution et réception du texte anthropologique », Ethnologie française, 33, 2003, p. 503-512 Corcuff Philippe, « Quand le terrain prend la parole… Eléments de sociologie réflexive », L’homme et la société, 115, 1995, p. 61-73 Collet Victor, Canicule 2003, Paris, L’Harmattan, 2005 Daniels Arlene Kaplan, « Self-discovery and self-deception in fieldwork », Qualitative sociology, 6, 1983, p. 195-214 Descola Philippe, Les lances du crépuscule [1993], Paris, Pocket, 2006 Dufoulon Serge, Saglio Jean, Trompette Pascale, « Marins et sociologues à bord du Georges Leygues : interactions de recherche », Sociologie du travail, 41, 1999 Ghasarian Christian, « Les désarrois de l’ethnographe », L’Homme, 37, 1997, p.189-198 Kleinman Sherryl, Copp, Martha A., Emotions and fieldwork, Sage, 1993 Kobelinsky Carolina, « Les situations de retour » in Les politiques de l’enquête, Alain Bensa et Didier Fassin (Dir.), Paris, La Découverte 2009, p. 185-204 Levi-Strauss Claude, La pensée sauvage [1962], Paris, Plon, 2010 Naudier Delphine, « La restitution aux enquêté-e-s : entre déontologie et bricolages professionnels ? », in Enquêter : de quel droit ? Menaces sur l’enquête en sciences sociales, Sylvain Laurens et Frédéric Neyrat (Dir.), Editions du Croquant, p. 80-104 Passeron Jean-Claude, « De la pluralité théorique en sociologie – Théorie de la connaissance sociologique et théories sociologiques », Revue européenne des sciences sociales, 32/99, 1994, p. 71-116 Touraine Alain, « Les mouvements sociaux : objet particulier ou problème central de l’analyse sociologique ? », Revue française de sociologie, 25/1, 1984, p. 3-19 Weber Florence, « Publier des cas ethnographiques : analyse sociologique, réputation et image de soi des enquêtés », Genèses, 70, mars 2008, p.40-46
[1] P. Corcuff, « Quand le terrain prend la parole… Eléments de sociologie réflexive », L’homme et la société, n° 115, 1995, p. 61
[2] C. Kobelinsky, « Les situations de retour » in Les politiques de l’enquête, Alain Bensa et Didier Fassin (Dir.), Paris, La Découverte 2009, p. 196
[3] B. Bergier, Repères pour une restitution des résultats de la recherche en science sociale, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 125
[4] P. Corcuff, art. cit., p. 64
[5] Voir : D. Naudier, « La restitution aux enquêté-e-s : entre déontologie et bricolages professionnels ? », in Enquêter : de quel droit ? Menaces sur l’enquête en sciences sociales, Sylvain Laurens et Frédéric Neyrat (Dir.), Broissieux, Editions du Croquant, p. 80 - 104
[6] F. Weber, « Publier des cas ethnographiques : analyse sociologique, réputation et image de soi des enquêtés », Genèses, n°70, mars 2008, p. 140
[7] D. Naudier, art. cit., p. 103
[8] V. Collet, Canicule 2003, Paris, l’Harmattan, 2005, p. 49
[9] Etre doctorant à Sciences Po provoque aussi une perception particulière, celle du chercheur comme futur décideur.
[10] D. Naudier, art. cit., p.101
[11] D. Naudier, at. cit., p.98
[12] C. Levi-Strauss, La pensée sauvage [1962], Paris, Plon, 2010, p. 46-49
[13] D. Bizeul, « Le récit des conditions d’enquête : exploiter l’information en connaissance de cause », Revue française de sociologie, 39/4, 1998, p. 772
[14] Voir les ouvrages de Hunter S. Thompson.
[15] A. Touraine, « Les mouvements sociaux : objet particulier ou problème central de l’analyse sociologique ? », Revue française de sociologie, 25/1, 1984, p. 17
[16] H. S. Becker, « Whose side are we on ? », Social problems, 14/3, 1967, p. 234-247
[17] S. Dufoulon, J. Saglio, P. Trompette, « Marins et sociologues à bord du Georges Leygues : interactions de recherche », Sociologie du travail, 41, 1999
[18] S. Kleinmann, M. A. Copp, Emotions and fieldwork, Sage, 1993, p. 11
[19] P. Descola, Les lances du crépuscule [1993], Paris, Pocket, 2006, p. 217
[20] B. Bergier, op. cit., p. 120
[21] E. Chauvier, « Restitution et réception du texte anthropologique », Ethnologie française, 33, 2003, p. 511
[22] D. Bizeul, art. Cit., p.753
[23] F. Weber, art.cit., p. 142
[24] J.-C. Passeron, « De la pluralité théorique en sociologie – Théorie de la connaissance sociologique et théories sociologiques », Revue européenne des sciences sociales, 32/99, 1994, p. 71-116
[25] C’est à dire : « C’est dans la nature du travail de terrain que de se retrouver jusqu’à la taille dans un marécage de liens personnels, d’échanges intimes, et de sentiments nobles et basiques pendant que son propre sens de la décence, de la vanité ou de l’outrage est mis à l’épreuve » ; A. K. Daniels, « Self-discovery and self-deception in fieldwork », Qualitative sociology, 6, 1983, p. 213
[26] Le problème du narcissisme est notamment abordé par C. Ghasarian, « Les désarrois de l’ethnographe », L’Homme, 37, 1997, p. 189-198. Corcuff y fait également référence p.61.
Guffanti Lucas, « Le retour permanent : communiquer l’enquête en situation d’ethnographie réflexive », dans revue ¿ Interrogations ?, N°13. Le retour aux enquêtés, décembre 2011 [en ligne], https://revue-interrogations.org/Le-retour-permanent-communiquer-l (Consulté le 21 novembre 2024).