Le retour aux enquêtés n’est pas un moment détaché de la recherche. Au contraire, il doit être conçu dans la continuité de l’étude menée. Tout au long de son travail, le chercheur doit rassembler des indices qui aideront à mieux rendre compte de ses résultats aux membres de la communauté étudiée. La position particulière du chercheur observateur-participant lui permet d’évoluer dans deux univers dont les limites sont parfois floues. Connaître ce qui sépare l’espace scientifique de l’espace public permet au chercheur de comprendre les cadres dans lesquels sa recherche sera reçue et ainsi de mieux préparer le moment du retour. La temporalité, l’espace, les cadres de références, le langage et les moyens de restitution sont des éléments auxquels le chercheur devra faire attention pour rendre compte de ses recherches aux enquêtés.
Mots clefs : Jeu de rôle en ligne massivement multi-joueurs (MMORPG), observation participante, intercompréhension, publics.
More than a return, building bridges with participant observation : study of an online community
Reporting the results of an inquiry to its subjects is not a disconnected moment of the research. On the contrary, it must be built in the continuity of the study that is made. The researcher must gather clues all along the research process for a better reporting of the study to the member of the community he/she is studying. The participant-observer has a particular position that allows him/her to evolve in two realms where the limits are sometimes blurred. Knowing what divides the scientific space from the public space gives the researcher a better understanding of the frames in which his/her study will be received and therefore allows a better preparation for the moment he/she will return. Time frame, space, frames of reference, language and the means of communication are elements which the researcher should be careful about when he/she will present his/her study to the people he/she has investigated.
Keywords : MMORPG, participant observer, mutual understanding, audience.
Parler de « retour aux enquêtés » tout comme de phase de « présentation de soi » de manière isolée peut occulter le fait que la recherche n’est pas seulement une succession de moments sans liens entre eux. Elle est, au contraire, un processus complexe de construction de sens qui s’opère dans le temps. En tant que sujets, les enquêtés construisent un horizon d’attentes quant aux résultats de la recherche guidé par leurs propres représentations du monde scientifique. C’est dans la totalité des interactions entre le chercheur et les enquêtés que se construit la recherche et que la présentation des résultats peut être envisagée comme une étape dans ce processus qui commence dès l’entrée sur le terrain. À cette dimension temporelle s’ajoute une dimension contextuelle et situationnelle. Bien que la notion de retour fasse référence à un déplacement entre le monde académique et le monde social étudié, il faut se poser la question de ce qui sépare précisément ces deux mondes pour envisager les modalités de ce déplacement.
S’il agit à découvert, le chercheur doit intégrer à son travail la position des enquêtés par rapport à sa propre recherche. Tenir compte de ce point de vue est non seulement nécessaire pour le chercheur qui souhaite dégager le sens des interactions dans lesquelles il s’engage avec les acteurs de son terrain, mais aussi primordial d’un point de vue éthique et humain. Pour cela, l’observation participante peut aider le chercheur à mieux comprendre le point de vue des membres de la communauté qu’il étudie pour mieux cerner leurs attentes et peut l’aider à préparer la restitution des résultats d’une enquête en le plaçant en position d’acteur du champ étudié. Déjà dans les années 1920, Malinowski voulait « saisir le point de vue de l’indigène […] comprendre sa vision de son monde » [1].
J’aimerais donc, dans cette contribution, proposer une alternative possible au modèle présentation VS retour qui serait basée sur une approche dynamique cherchant à construire des ponts pour une meilleure intercompréhension entre le monde scientifique et le monde qu’il étudie. Cette approche s’ancre dans une démarche de sciences humaines et sociales et s’inscrit dans la continuité de mes recherches sur la réflexivité [2]. Je m’appuierai pour cela sur ma propre expérience en tant que chercheur-joueur au sein d’une communauté en ligne sur le jeu Age Of Conan (AOC) qui est le cas d’étude de ma thèse. Mes recherches portent sur l’utilisation de la mythologie nordique dans ce jeu. Je reviendrai sur les réussites et les échecs relatifs [3] dans la construction de ces ponts.
Age of Conan, comme la plupart des jeux de rôle en ligne massivement multi-joueurs, propose aux joueurs une expérience de jeu à plusieurs qui prend place au sein d’un univers numérique [4]. Le joueur qui souhaite affronter les défis les plus avancés doit alors s’allier à des compagnons de jeu. Cela peut se faire de façon ponctuelle, le temps d’affronter un ou plusieurs défis, ou de façon plus durable en intégrant une guilde, c’est-à-dire une « Association pérenne de joueurs réunis par un intérêt commun sous une même bannière […] ». [5]
J’ai intégré le Clan Arkenstone en octobre 2010 et après quelques semaines en leur compagnie, je leur ai dévoilé les raisons de ma présence sur le jeu et fait part de mon statut de jeune chercheur. D’autres positionnements auraient été possibles puisque dans, en ligne, l’anonymat est une pratique courante [6] ; cependant, ayant accès des informations privées dans des sections du site uniquement accessibles aux membres de la guilde, j’ai fait le choix de l’honnêteté. Cette présentation et les discussions qui ont suivi m’ont fourni des informations dont je devais tenir compte sur la façon de mener mes recherches, mais aussi sur la manière d’en rendre compte aux membres de la guilde. Les discussions s’orientaient tout d’abord vers la question du respect de la confidentialité des données que je recueillais et des « autorités » [7] pour lesquelles je travaillais. Un joueur me fit également la remarque suivante : « J’espère que tu as choisi Arkenstone pour ce que l’on pouvait t’apporter personnellement plus que comme guilde Cobaye ! ». Ce qui est important ici pour mes enquêtés, c’est de ne pas être objectivés ou transformés en rats de laboratoire. Une autre remarque va aussi dans ce sens : « Enfin, dernier point plus « humain », clarifie bien les choses avec chaque membre de la guilde quitte à prendre le temps de discuter avec eux.[…] C’est le meilleur moyen pour éviter des tensions, incompréhensions qui altèreraient immanquablement vos plaisirs de jeu réciproques. » Encore une fois, les joueurs soulignent la nécessité de garder à l’esprit qu’ils sont avant tout des personnes et que mes recherches ne doivent pas nuire à leur présence en jeu. Après une courte discussion, il fut décidé qu’une section du forum serait ouverte pour me permettre de poster les informations liées à mes recherches, ce qui permettrait aux membres de la guilde de suivre mon travail et d’accéder aux données que j’allais utiliser. Le forum est un des moyens de communication privilégiés des joueurs car il permet de communiquer de manière asynchrone. Il permet également de garder des traces des discussions, de diverses informations pratiques sur le jeu et sur l’organisation de la guilde. C’est un passage obligatoire pour les aspirants qui postulent pour y être intégrés. Il complète les moyens de communication disponibles au sein du jeu et en constitue par conséquent un prolongement. Il permet aussi d’inclure plusieurs types de support, textes, images, vidéo et hyperliens, ouvrant ainsi des possibilités pour le chercheur. Me servir de cet outil permet alors d’étudier à la fois le contenu des représentations qui circulent au sein du groupe que la façon dont elles circulent.
Au final, nous retrouvons l’idée selon laquelle « la présentation de soi doit donc s’efforcer de donner des gages de sa neutralité par rapport aux intérêts sociaux en présence dans la situation et de témoigner de beaucoup de respect aux acteurs qui sont très attentifs aux marques de distance qui peuvent être prises pour du mépris, aux marques de condescendance qui peuvent être jugées insultantes… » [8]. Ces remarques sont également valables pour le compte-rendu que le chercheur fera aux enquêtés. Le chercheur qui souhaite s’armer pour le « retour aux enquêtés » doit toujours garder à l’esprit les bornes posées avec l’accord des enquêtés. De la même façon, à plusieurs reprises lors d’autres discussions, des joueurs m’ont fait savoir à quel moment ils souhaitaient que les informations personnelles qu’ils me confiaient n’apparaissent pas directement dans mes recherches. C’est lorsque ce type de contrat tacite entre enquêteur et enquêtés est rompu qu’il y a un risque pour le chercheur de voir sa recherche rejetée par les informateurs. Il est bien sûr toujours possible de discuter avec les enquêtés d’une information qu’on souhaite utiliser en expliquant les raisons de leur pertinence pour ses recherches. En faisant cela, le chercheur montre qu’il tient compte de leur avis. C’est pourquoi je pense qu’il peut être bénéfique pour le bon déroulement de l’enquête que le chercheur explique ses objectifs aussi clairement que possible lorsque la relation avec les enquêtés le permet [9].
Le retour ne doit pas se limiter au compte-rendu de l’analyse mais doit inclure des explications qui leur permettent de comprendre le contexte scientifique dans lequel les informations recueillies seront utilisées. Cela donne également l’occasion d’expliquer quel est le rôle du chercheur en sciences sociales (qu’il soit sociologue, anthropologue, linguiste ou d’une autre discipline), fonction souvent floue pour les non-initiés. Pour donner ici un exemple, je peux citer un joueur qui refusait tout d’abord l’idée d’être interviewé sous prétexte « qu’il était nul en histoire ». Un autre joueur, étudiant en master en sciences naturelles mais ayant dit lui-même qu’il se sentait « indirectement concerné par [ma] situation. », est alors intervenu en disant que mon rôle n’était pas de mesurer les connaissances des joueurs, mais de comprendre comment les personnes interprétaient les éléments mythologiques présents en jeu, qu’ils aient des notions en histoire ou non. Le premier joueur avait une représentation de la science liée au contexte scolaire où les niveaux de connaissance sont évalués. Cet échange l’informe dès lors sur le rôle de ma recherche et permettra à l’avenir une meilleure réception de celle-ci, puisque ses objectifs sont clarifiés. Il rappelle aussi au chercheur qu’il ne doit pas donner l’impression qu’il émet un jugement de valeur sur les connaissances de ses enquêtés. Nathalie Heinich parle de maintenir une « neutralité axiologique » pour créer des passerelles entre différents « univers séparés » [10]. Si elle-même l’applique à des acteurs ayant des avis différents sur l’art contemporain, on peut également utiliser ses réflexions ici pour créer le lien entre univers scientifique et univers étudié.
Pour comprendre ce qui distingue le monde de la recherche du monde social étudié, il faut raisonner en termes d’activités plutôt qu’en termes d’acteurs, comme le suggère Howard S. Becker. Selon lui, « chaque activité s’opère en réaction à une situation donnée ». Ce sont donc différentes situations qui vont permettre de définir les activités qui lui sont liées. Mes interlocuteurs ne sont pas que des joueurs, mais sont des personnes qui à certains moments s’adonnent à une activité : le jeu. Moi-même en tant que chercheur observateur-participant, je m’adonne à cette activité et, en plus, je me consacre à l’activité scientifique. Ces deux activités sont interdépendantes mais les finalités sont distinctes. Certains joueurs peuvent eux aussi appartenir au champ scientifique. Pour reprendre mon exemple précédent, le joueur qui était étudiant en master comprenait les enjeux de ma recherche et a pu les expliquer à un autre joueur. Cela permet d’aborder deux points de ma réflexion, celui de la complexité des publics et celui de la séparation des cadres de référence.
Selon Florence Weber :
« Ces cloisonnements entre un espace scientifique, où les chercheurs peuvent dans un même mouvement construire leurs cas, les analyser et les publier à destination de leurs pairs, et un espace public, auquel chacun a accès, y compris les enquêtés, ont été largement remis en cause, non seulement du fait de la réduction de la distance sociale entre l’ethnographe et ses enquêtés, mais aussi du fait des bouleversements introduits par les usages, scientifiques et publics, d’internet. Qu’on le déplore ou qu’on s’en réjouisse, il n’existe pas d’espace internet fermé (ou d’intranet) pour les chercheurs en sciences sociales, et le modèle des sciences dures avec leurs « archives ouvertes », inaccessibles de fait et non de droit aux non spécialistes, pose de redoutables problèmes aux sciences de la société. » [11]
L’auteur rend compte ici d’une vision classique de la science séparée du monde social qu’elle étudie, une science qui se faisait à l’écart de l’espace publique. Cette vision se modifie aujourd’hui grâce aux changements intervenus dans la société, cependant les mécanismes de cette réduction de la distance sociale ne sont pas clairs. « La notion de distance sociale renvoie à l’idée d’un espace social structuré par des caractéristiques comme l’âge, le genre, l’origine ethnique et le statut social. » [12] Quelles sont alors les caractéristiques sur lesquelles la réduction dont parle Florence Weber s’appuie ?
Pour une restitution d’enquête, le chercheur peut se poser la question de savoir si ses productions scientifiques sont accessibles aux enquêtés ou s’il doit les adapter pour ce public. Néanmoins, je mettrais ici deux bémols aux propos de Florence Weber. Premièrement, bien qu’internet permette d’accéder à de nombreuses ressources scientifiques, tout le monde n’a pas la formation nécessaire pour en saisir toutes les nuances. Plusieurs raisons peuvent expliquer cela, le manque de connaissances préliminaires sur l’objet, le contexte, les théories utilisées ou les méthodes, une connaissance générale des recherches en cours dans un domaine ou simplement la langue dans laquelle l’article ou l’ouvrage est publié. Comme le dit Howard S. Becker à propos des productions scientifiques, « dans les domaines spécialisés, on attend des usagers qu’ils apprennent à consommer savamment les représentations en se formant à l’université ou dans les écoles professionnelles, encore que le contenu des attentes en la matière change de temps en temps. » [13] C’est pourquoi les productions scientifiques ne sont, en général, pas destinées aux non-initiés et les personnes n’ayant pas de formation universitaire peuvent ne pas les saisir dans leur globalité. Deuxièmement, il existe bien des espaces fermés au public non-universitaire comme de nombreuses revues scientifiques dont le contenu n’est accessible que sur abonnement. C’est le cas d’ailleurs de l’article de Florence Weber, disponible sur le site cairn.info à condition de pouvoir s’identifier ou d’acheter le texte en question. Même les chercheurs n’ont pas accès à certaines revues si leur institution de rattachement n’y est pas abonnée et il leur faut alors utiliser des moyens détournés pour y accéder. Le rapprochement entre les publics est donc loin d’être achevé.
Ces remarques s’appliquent à condition que les enquêtés manifestent un intérêt pour les études scientifiques. Et même s’ils en prennent connaissance, il est encore moins sûr qu’ils émettent un avis. Ainsi, mon premier article qui traitait de la réflexivité et présentait mes relations avec les enquêtés ne reçut qu’un seul commentaire, celui d’un joueur dont j’étais proche qui me félicita mais ne fit aucune remarque critique quant au contenu. Enfin, de nombreux joueurs de la guilde ne commentent pas la partie du forum où je poste les informations relatives à mes recherches même s’il arrive que nous en discutions en jeu. Certains ne prennent sans doute même pas la peine de lire cette section. Les propositions du présent article pourraient alors servir à susciter l’intérêt chez les enquêtés.
Parmi les joueurs de ma guilde, plusieurs catégories socio-professionnelles sont représentées : travailleur indépendant, employé dans le secteur privé ou le secteur public, cadre, personne sans emploi, étudiant, etc. Tous n’ont pas le même parcours et sont donc susceptibles de recevoir les résultats de mon étude de façons différentes. Cette complexité ne se limite pas aux activités professionnelles des différents enquêtés car chaque individu a des préférences concernant les interactions dans lesquelles il s’engage. Ainsi, l’un des joueurs, étudiant en master d’histoire, est très intéressé par l’univers de Conan et la façon dont celui-ci peut être mis en rapport avec des événements historiques ou des sources mythiques. Nous avons plusieurs fois discuté de cet intérêt commun, sur le canal de discussion en jeu, sur le logiciel de discussion vocal de notre guilde ou même lors d’une rencontre IRL (In Real Life). Mais bien qu’étant un utilisateur assidu du forum, il n’est quasiment jamais intervenu sur la partie consacrée à mes recherches lorsque j’y proposais des résultats ou lors de l’expérience évoquée précédemment. Le but n’est pas ici de lui jeter la pierre mais de montrer qu’on ne peut pas catégoriser les enquêtés de façon stricte et que même lorsqu’on s’attend à certains comportements de leur part, on peut être surpris. Il faut alors savoir s’adapter car la difficulté de rendre compte d’une recherche peut provenir de l’hétérogénéité du public. Un compte-rendu individuel tenant compte des connaissances préliminaires et des préférences de chaque enquêté n’est bien sûr pas envisageable pour des raisons évidentes de temps. Le chercheur doit trouver le bon équilibre pour une restitution qui puisse intéresser les enquêtés dans leur globalité et qui tienne compte de la complexité du public. Pour cela, il lui faut en premier lieu définir clairement ce qui réunit les personnes qu’il étudie, quels sont les moyens de communication qu’ils utilisent et comment ils les utilisent pour savoir s’il peut lui même s’en servir. Sinon, il lui faudra trouver d’autres voies et proposer une alternative aux dispositifs de communication habituels pour présenter ses résultats.
Une composante majeure de ma recherche est que mes enquêtés se rassemblent en ligne. Ils ne sont pas présents géographiquement au même endroit. Par conséquent, il serait difficile d’organiser un rassemblement où tous les participants seraient physiquement réunis au même endroit, tel qu’une exposition ou une présentation publique pourraient le permettre.
J’ai déjà évoqué plus haut la partie du forum ouverte pour mes recherches sur le site de ma guilde. J’y ai mené une expérience où je demandais aux joueurs de choisir une capture d’écran d’un élément qui leur évoquait la mythologie nordique en jeu, de la poster sur le forum et de la commenter. Ils ne pouvaient soumettre qu’une image mais pouvaient commenter à volonté les propositions des autres participants. Plusieurs personnes participèrent mais aucune ne commenta les autres contributions. Je leur ai suggéré plus tard une interprétation où je voyais cela comme une volonté de ne pas remettre en question les apports de chacun. Ainsi, chaque contribution était légitime et cette façon de faire se différenciait de la recherche scientifique qui fonctionne sur le mode de la critique. Cependant, mon commentaire est venu très tard et n’a suscité qu’une seule réaction, courte mais positive. Il peut y avoir plusieurs raisons à cela. Soit mon commentaire a trop tardé et arrive à une période où de nombreux joueurs quittaient le jeu et où ma guilde n’était pas épargnée par ces défections ; les priorités étaient donc différentes pour les joueurs à ce moment-là. Ou alors, tout comme ils ne s’étaient pas commentés mutuellement, ils n’osèrent pas commenter mes propositions d’interprétation. Comme le souligne Gérard Derèze, « les réactions des acteurs aux propositions interprétatives peuvent constituer une matière très intéressante pour le travail » [14]. J’ajouterai que la non-réaction est elle aussi un signe dont il faut tenir compte. D’une part, le monde social étudié n’évolue pas au même rythme que le monde scientifique, et d’autre part, ses priorités sont différentes et changeantes. Connaître les attentes et les priorités des enquêtés est une clef pour une restitution réussie. La différence de vitesse d’évolution des deux mondes peut également influencer la réception d’une étude. La recherche est en général un processus très long, surtout si on le compare à l’évolution des mondes numériques. Des enquêtés enthousiasmés par le fait de participer à une recherche peuvent alors voir leur intérêt décroître avec le temps, ne voyant aucun résultat concret, ou ne plus être présents lors de sa publication.
Cela ne doit pas m’empêcher d’envisager de nouveaux dispositifs de diffusion. J’imagine au moment même où j’écris ces lignes qu’il serait possible d’organiser en jeu une visite commentée de plusieurs régions où apparaissent des éléments de mythologie nordique, accompagnée d’explications provenant de mes recherches sur l’origine de ces éléments, puis de recueillir les impressions et les questions des joueurs pendant et après la visite. Le chercheur ne doit donc pas avoir peur d’être créatif dans ses démarches de restitution pour éviter de simplement fournir des supports scientifiques qui pourraient paraître arides aux non-initiés. Il peut proposer des rapports intermédiaires aux enquêtés, plus accessibles, qui lui permettront de mettre ses interprétations à l’épreuve.
J’occupe une position particulière puisque, comme je l’ai évoqué, j’exerce les deux activités qui nous intéressent ici, à savoir l’activité scientifique et le jeu. De plus, bien qu’ayant commencé à jouer à Age Of Conan pour le besoin de mes recherches, je joue aux jeux vidéo depuis vingt ans et aux jeux de rôle, grâce auxquels j’ai pour la première fois été en contact avec l’univers de Conan, depuis quinze ans. J’ai également joué à plusieurs autres MMORPG avant AOC ; mon expérience ne se limite donc pas à mon terrain actuel. C’est pourquoi, lorsque j’ai commencé à travailler sur ce sujet en première année de master, je savais que la problématique à laquelle je m’attaquais, à savoir l’utilisation de la mythologie nordique dans les jeux de rôle en ligne massivement multi-joueurs, ne possédait pas de réponse évidente au sein de la communauté des joueurs ni dans le monde scientifique et méritait que je m’y attarde.
La connaissance provient donc en partie de mon propre vécu et des relations que j’entretiens avec mes enquêtés. Giulia Fabbiano résume bien, à mon sens, comment la connaissance est produite à partir de ces expériences :
« L’anthropologue se déplace sans cesse – et ne peut faire l’économie de ces déplacements – entre le registre de l’expérience et celui de l’explication. Dans le premier il participe comme sujet d’affects, il établit des rapports plus ou moins empathiques, il s’émerveille ou se sent frustré, mais en tout cas il est partie prenante à l’intérieur du monde qu’il observe et ne peut s’en extraire, tandis que dans le second il agit comme sujet de connaissance, il déconstruit les rapports, il interpelle leur nature empathique ou non, il s’observe participer et analyse comme des faits distanciés, non sans difficultés, les différents rôles qu’il occupe. C’est précisément le retour réflexif et distancié sur soi même comme sujet positionné à l’intérieur d’un champ de rapports et de relations qui contribue à la production de connaissances. » [15]
Je me considère moi-même comme un joueur mais je ne peux bien sûr pas occulter complètement le fait que je suis aussi chercheur lorsque certains éléments inattendus, comme des conversations ou des éléments de jeu que je n’avais pas encore perçus, attirent mon attention car ils font référence à mes recherches. J’effectue donc continuellement un « déplacement symbolique du changement de système de référence » [16] entre le monde social que j’étudie et le monde scientifique. Je participe à la vie du groupe et tout comme les autres joueurs évoquent leur travail ou des histoires personnelles, je parle de mes recherches. Je les préviens par exemple lorsque je vais parler d’eux dans une présentation, et, après celle-ci, je leur raconte comment cela s’est passé, les exemples que j’ai utilisés et les réactions du public. Certains proposèrent un jour de venir « foutre le souk » lors d’une de mes présentation et de venir « déguisé en Penis » si mes présentations étaient filmées. Cet exemple montre l’importance de l’humour au sein de la communauté et celui-ci n’épargne pas le chercheur et ses activités. Ce qu’il faut noter ici c’est que la recherche, affaire sérieuse s’il en est, et les représentations qui lui sont liées n’empêchent pas les enquêtés de faire des blagues à son propos. Utiliser ce type d’exemple souligne le fait que l’espace où se retrouvent les différents membres de la guilde est un lieu de détente et de décontraction bien qu’il y ait aussi des moments sérieux. Y faire appel permet de dédramatiser mon travail de chercheur, de le rendre plus vivant, moins distant et permet de mieux rendre compte de la réalité quotidienne des interactions dans lesquelles je m’engage aux côtés d’autres joueurs. Retrouver ces exemples dans un compte-rendu de recherche destiné aux enquêtés peut également avoir cet effet dédramatisant pour eux tout en conservant sa pertinence. « Prendre au sérieux des plaisanteries peut apparaître au premier abord paradoxal, a fortiori lorsque ces plaisanteries ne constitue pas l’objet de la recherche et que cette dernière encourt le risque de donner un sens sérieux à ce qui ne prétend pas l’être. Les plaisanteries occasionnent des situations d’enquête difficilement appréhensible pour l’ethnographe. Pour autant, ces situations n’en manifestent pas moins certains pans des pratiques, discours et représentations, qui demeurent tus selon d’autres modalités plus posées de discours et de comportements. »
Lexique scientifique
Le cas de l’écrivain Victoria Thérame, exposé dans la revue Genèses, illustre ce problème. Elle rappelle qu’elle a consacré beaucoup de temps et fourni du matériel à la sociologue Delphine Naudier et a été blessée par les résultats : « elle utilise tous les éléments, mineurs ou importants, venus dans la conversation, pour les retourner contre moi ! » [17] Dans cet exemple, on retrouve l’idée d’un « énorme investissement personnel que les acteurs-informateurs-lecteurs placent dans l’objet analysé » [18]. L’un des problèmes qui est apparu est que « l’usage du mot « stratégie », banal dans la sociologie critique objectivante qui postule une forme d’inconscient social structurel, la choque bien sûr, comme suggérant un calcul, sinon une magouille. » [19] La différence de sens qu’un mot peut prendre en fonction des contextes dans lequel il est utilisé et des connotations qui lui sont liées pose ici problème. Parler de stratégie dans un contexte scientifique est neutre alors qu’il peut-être connoté négativement dans le « champ des non-spécialistes » [20]. Les personnes ne pouvant faire le déplacement nécessaire à l’interprétation de ce type d’usage entre les deux champs peuvent alors se méprendre sur le sens des propos du chercheur. Pour éviter ce type d’incompréhensions, le chercheur peut présenter son article aux enquêtés avant publication pour le discuter, prendre le temps d’éclaircir les points obscurs et prendre en compte leurs réactions. Cela permet aussi de montrer une forme de respect pour leur point de vue et d’engager une discussion éclairante sur des parties de l’étude qui auraient pu être mal interprétées. Ce pourrait également être le cas pour le terme « non-spécialistes » qui met l’accent sur le fait que les personnes ne possèdent pas les compétences nécessaires à la compréhension de la connaissance produite par les chercheurs. Risque-t-on alors de créer un sentiment d’infériorité chez le lecteur ? Mon article ici même insiste sur les différences de cadres de réception et la nécessité de posséder certaines bases pour comprendre une production scientifique dans sa globalité. Je précise donc que je ne considère pas la science comme supérieure à d’autres activités. Elle a un rôle qui lui est propre, celui de produire de la connaissance. On peut même dire que les sciences humaines et sociales souffrent d’un manque de reconnaissance en ce qui concerne leur utilité. C’est pourquoi il peut être judicieux de les rendre accessibles à un public plus large. Le style d’écriture peut aussi refléter cette position en étant plus informel et en rappelant que « nous ne sommes que des gens comme les autres […] Il se peut que nous connaissions un petit nombre de choses que les autres ne connaissent pas, mais il n’y a rien de spécial. » [21]
Catégories « indigènes »
Recontextualiser une information est une exigence de la science pour comprendre les connaissances dites « indigènes », c’est-à-dire « des connaissances qui sont attachées à leur localisation et à leurs relations, tels que la culture, la religion et la communauté. » [22] Le terme fait référence à des connaissances issues des communautés étudiées par les sciences sociales. Cela a souvent pour effet de nier leur pertinence pour la science dont les acteurs préfèrent imposer leurs propres catégories pour leurs analyses [23]. Mais pour rendre compte avec justesse du sens donné aux activités des enquêtés, il faut tenir compte de la façon dont ils en parlent. Restituer ces connaissances et les catégories telles qu’elles circulent au sein de la communauté étudiée peut aider à mettre en avant les problématiques propres à un terrain. « Selon Patricia Zavella (1996), les insiders, c’est-à-dire les sociologues de couleur qui enquêtent dans « leur » communauté (comme Elijah Anderson, Mario Small ou Mary Pattillo), comprennent mieux les subtilités du langage, gagnent la confiance de leurs interlocuteurs plus facilement, et formulent des problématiques plus respectueuses des communautés auxquelles ils appartiennent. » [24]
Un article sur le retour aux enquêtés qui cherche à démontrer que l’on peut construire des ponts entre la science et « l’espace public » ne serait pas complet sans présenter les réactions des enquêtés à sa lecture. J’ai donc posté la version préliminaire de ce texte sur le forum de ma guilde et j’ai demandé aux joueurs d’y réagir. Malheureusement, encore une fois, peu de réactions ont pu être recueillies parmi les membres de la guilde car, comme je l’ai souligné précédemment, de nombreux changements ont mis à mal la communauté : mise à jour contenant trop de bugs et fusion des serveurs monolingues en serveurs multilingues changeant les habitudes de jeu. Une première réponse :
« Coucou lulu, j’ai commencé la lecture de ton pdf, c’est sympa de nous proposer la synthèse de ton « labo ». Je suis assez d’accord sur le fait que personne n’ai remit en cause l’apport des autres dans ton petit exercice des screen / mythologie nordique.
Cela peut avoir comme raison le peu de personne ayant participé et aussi la méconnaissance du sujet, personnellement je ne connais pas bien la mythologie nordique mais comme dans les autres mythes on y retrouve des thèmes communs.
Peut-être aurait-il fallu ouvrir le « test » sur le forum officiel pour plus de retours ?[…] »Ici, le joueur signale qu’il trouve « sympa » de proposer une synthèse et souligne par là qu’il pense que c’est une bonne chose que le chercheur fasse un compte-rendu de ses recherches et montre que cela peut intéresser des joueurs. Il propose aussi une interprétation de l’expérience des captures d’écran à laquelle il a lui-même participé, en soulignant que la volonté de ne pas se commenter peut venir de la méconnaissance du sujet. Les remarques des enquêtés peuvent donc compléter celles du chercheur en proposant leurs propres points de vue sur des résultats temporaires. Il va même jusqu’à proposer une alternative à l’expérience qui permettrait d’avoir plus de réponses. Cela va dans le sens de la suite de son message qui montre l’intérêt de participer et d’aider au bon déroulement de l’enquête. Il cite une partie de l’article concernant les visites commentées et répond :
« […]Raaa t’aurais pas pu avoir cette idée avant. C’est super intéressant ça… on aurait même pu en faire une petite vidéo RP à destination de la communauté aoc. »Il montre ici de l’intérêt pour ce type d’initiative et montre comment cela aurait pu être diffusé plus largement. En proposant d’en faire une vidéo RP (Roleplay), le joueur met en avant les possibilités de productions de représentations et de diffusion au sein de la communauté des joueurs et révèle des problématiques qui lui sont propres. Ce faisant, il informe le chercheur sur la manière dont l’information et les connaissances peuvent circuler entre les joueurs et ouvre de nouvelles pistes de recherche. Le retour au enquêtés a donc permis ici d’ouvrir de nouvelles perspectives pour la suite de mes travaux. Je m’ancre donc une anthropologie de l’interaction qui se construit dans le dialogue avec les enquêtés. Howard S. Becker donne l’exemple suivant : lors d’une interview, il joue un morceau de jazz avec son interlocuteur pour comprendre avec lui comment les musiciens de jazz peuvent accompagner un morceau qu’ils ne connaissent pas. Dans cette interaction, la connaissance est co-construite par le chercheur et son enquêté, « en d’autres mots, l’enquêteur et l’enquêté, ensemble, ont créé une question pertinente pour la recherche et ont ensuite collaboré pour en trouver la réponse » [25]. La réponse suivante est celle de l’étudiant en histoire cité précédemment :
« Alors déjà, espèce d’étudiant, tu baratines !
Et que je mets des phrases d’un paragraphe pour rien dire et pour remplir des pages !
Pour l’absence de critiques des images de mythologie nordique, oui, je pense que tu n’as pas à chercher plus loin, vu que les participants n’avaient pas de positionnement critique, ils n’ont pas discuté des points des autres.
Perso je me suis exprès retenu de dire quoi que ce soit pour pas que les gentils intervenants se sentent attaqués alors qu’ils avaient fait un travail non-négligeable. Étant donné que nous ne sommes pas dans un environnement de recherche, j’ai esquivé le milieu critique (par expérience il est rarement bien reçu, et comme ça il aurait pu y avoir plus de contributions).
Puis y’a aussi le fait que j’avais initialement prévu un exposé sur le Vanaheim et que j’ai…hum…finalement été trop occupé pour le finir à temps.
Ah, au fait :
*te lance un gros caillou*
On peut pas me catégoriser ! Je suis unique ! UNIIIIQUE ! »Pour la majorité de son message, il répond à un point déjà évoqué dans la discussion, celui de l’expérience des captures d’écran, il s’insère donc dans la discussion en cours. Puis il donne une justification sur sa non participation. Là encore, il répond sur les points qui le concernent directement, terminant par une touche d’humour sur la façon dont il est présenté précédemment dans l’article. Aucune des deux réponses ne fait référence aux parties sur le chercheur observateur-participant ou la partie lexique.
Dans cet article, j’ai tenté de mettre en avant une approche dynamique qui encourage l’intercompréhension et la coopération entre le chercheur et ses enquêtés. Cette approche se met en place dès l’entrée sur le terrain et ouvre des pistes que le chercheur peut suivre durant son enquête. La restitution des résultats peut alors être intégrée dans sa démarche comme un moment de mise à l’épreuve de ses analyses. Cette position ouverte met en avant le respect des enquêtés et de leur point de vue. En leur donnant le rôle d’interlocuteur [26] et en analysant les situations de communication dans lesquelles il s’engage, le chercheur met en avant la co-construction de l’expérience de terrain et par conséquent de la connaissance qu’il élabore à partir des interactions avec les enquêtés. Mon plus grand regret est de ne pas avoir osé adopter plus fermement cette position plus tôt, de peur d’influencer les représentations de mes enquêtés et de créer un biais dans mon enquête. Aujourd’hui, Age Of Conan est un jeu sur le déclin et les lois du marché du jeu vidéo n’attendent pas le monde de la recherche. J’espère donc encourager d’autres chercheurs, et en particulier les chercheurs débutants comme moi qui souhaitent mener ce type d’enquête, à oser ce type d’approche et à chercher à construire des ponts pour une meilleure compréhension mutuelle entre le monde de la recherche et le monde social qu’ils étudient.
[1] Y. Winkin, Anthropologie de la communication : de la théorie au terrain, Paris, De Boeck université, coll. Points. Série Essais, 2001, p. 136
[2] L. Di Filippo, « La dichotomie chercheur-joueur dans la recherche en jeu vidéo : pertinence et limites », in La position du doctorant entre engagement et réflexivité [titre de travail], L. Di Filippo, H. François, A. Michel (dirs), Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 2011
[3] Je dis ici « relatifs » car je considère qu’un chercheur peut apprendre de ses réussites autant que de ses échecs.
[4] M. Bonenfant, « les mondes numériques ne sont pas « virtuels » : l’exemple des jeux vidéo en ligne », Revue des sciences sociales, 45, 2011, p. 60-67
[5] Jeuxonline, Lexique des MMO Jeuxonline, [en ligne] http://www.jeuxonline.info/lexique/ (Page consultée le 19 juin 2011)
[6] P. Schmoll, « Les Je en ligne », in La Société Terminale 1. Communautés virtuelles, P. Schmoll (dir.), Strasbourg, Néothèque, 2011, p. 113-135
[7] A.-M. Arborio et P. Fournier, L’observation directe [2005], 3, Paris, A. Colin, coll. Série L’Enquête et ses méthodes, 2010.
[8] Ibid., p. 37.
[9] M. Avanza, « Comment faire de l’ethnographie quand on n’aime pas ses « ses indigènes » ? Une enquête au sein d’un mouvement xenophobe », in Les Politiques de l’enquête. Épreuves ethnographiques, D. Fassin et A. Bensa (dirs.), Paris, La Decouverte, coll. Recherches, 2008, p. 41-58
[10] N. Heinich, « Pour une neutralité engagée », Questions de Communication, 2, 2002, p. 117–127.
[11] F. Weber, « Publier des cas ethnographiques : analyse sociologique, réputation et image de soi des enquêtés », Genèses, 70, 2008, p. 140–150.
[12] F. Bonnet, « La distance sociale dans le travail de terrain : compétence stratégique et compétence culturelle dans l’interaction d’enquête », Genèses, 73, 2008, p. 57-74
[13] H. S. Becker, Comment parler de la société : artistes, écrivains, chercheurs et représentations sociales, trad. Christine Merllié-Young, Paris, la Découverte, coll. Grands Repères. Guides, 2009, p. 39
[14] G. Derèze, Méthodes empiriques de recherche en communication, Bruxelles, De Boeck, coll. Info & com, 2009, p. 208
[15] G. Fabbiano, « Déconstruire l’empathie. Réflexions sur l’art magique de l’ethnographe », Journal des anthropologues, 114/115, décembre 2008, p. 185–202.
[16] L. Di Filippo, Op. Cit.
[17] F. Weber, op. cit.
[18] Y. Winkin, Anthropologie de la communication : de la théorie au terrain, Paris, De Boeck université, coll. Points. Série Essais, 2001.
[19] A. Desrosières, « Quand une enquêtée se rebiffe : de la diversité des effets libérateurs, ou les arguments des trois chatons », Genèses, 71, 2008, p. 148–159.
[20] P. Bourdieu, Science de la science et réflexivité : cours du Collège de France (2000-2001), Paris, Raisons d’agir, coll. Cours et travaux, 2002.
[21] H. S. Becker, Écrire les sciences sociales, trad. Patricia Fogarty et Alain Guillemin, Paris, Économica, coll. Méthodes des sciences sociales, 2004, p. 43.
[22] M. Van Der Velden, « Design for the contact zone. Knowledge management software and the structures of indigenous knowledges », in Proceedings Cultural Attitudes Towards Communication and Technology 2010, F. Sudweeks, H. Hrachovec et C. Ess (dirs.), Murdoch, Murdoch University, 2010, p. 1-18
[23] Ibid.
[24] F. Bonnet, op. cit.
[25] R. R. Faulkner et H. S. Becker, « Studying Something You Are Part Of : The View From the Bandstand », Ethnologie française, 113, 2008, p. 15-21.
[26] E. Chauvier, Anthropologie de l’ordinaire. Pour une conversion du regard, Toulouse, Anacharsis, 2011
Di Filippo Laurent, « Plus qu’un retour aux enquêtés, construire des ponts par l’observation participante : étude d’une communauté en ligne », dans revue ¿ Interrogations ?, N°13. Le retour aux enquêtés, décembre 2011 [en ligne], http://revue-interrogations.org/Plus-qu-un-retour-aux-enquetes (Consulté le 21 décembre 2024).