Afin de poursuivre leur carrière et améliorer leur situation, les vacataires employés par les entreprises de sondages sont confrontés à une double contrainte : se fidéliser auprès d’un nombre restreint d’employeurs tout en évitant d’en être trop dépendants. Pour cela, ils doivent se soumettre à des standards comportementaux, détenir un capital professionnel et faire preuve d’un sens du placement spécifiques. L’analyse de la gestion de ces ressources par les salariés montre que la dérégulation des relations d’emploi sur ce marché du travail produit un régime de mobilisation et de gouvernement des agents qui tend à en faire de petits entrepreneurs d’eux-mêmes.
Mots-clés : Flexibilité - Mobilité - Néolibéralisme - Précarité - Sondages
A Career in Insecure
Submission, Soft Skills, Professional Capital and Sense of Placement among the Precarious Workers in Surveys Institutes
In order to pursue their careers and improve their situation, the precarious workers in surveys institutes face a double bind : stabilize their situation with a limited number of institutes and reduce their dependence towards them. For this, they must comply with behavioural standards, professional capital and sense of placement. The analysis of the management of these resources by workers shows that deregulation of employment relations on this labour market produces a system of mobilization of agents which tends to transform them into businessmen.
Key-words : Flexibility - Mobility - Neoliberalism - Precariousness - Surveys
La majeure partie des opérations liées au recueil et à la mise en forme des données dans les entreprises de sondage [1] est assurée par des salariés employés sous contrats à durée déterminée très courts [2]. Leurs liens avec les entreprises sont donc discontinus et particulièrement précaires. Cependant, afin de disposer d’une main-d’œuvre loyale et rapidement opérationnelle, les employeurs ont tout intérêt à entretenir un noyau de vacataires fidélisés. De leur côté, les vacataires cherchent à se fidéliser auprès d’un noyau restreint d’employeurs [3] pour sécuriser leur situation. De ce fait, on n’observe pas de stricte correspondance entre la discontinuité des relations contractuelles et l’instabilité de l’emploi, mais, au contraire, des logiques de stabilisation reposant sur des engagements réciproques. Si un vacataire tient les cadences et fait son travail correctement, s’il est docile et systématiquement disponible, il peut s’attendre à faire l’objet d’un traitement privilégié (stabilisation, accès prioritaire au travail et aux missions les plus intéressantes en termes de difficulté et de rémunération). Symétriquement, si un employeur propose un bon niveau de rémunération, s’il fournit régulièrement du travail à un vacataire et lui confie prioritairement les tâches les plus faciles, ce denier acceptera parfois des missions difficiles, fera son travail le mieux possible et se rendra disponible. Cela étant, les cadres chargés de la réalisation des opérations de terrain fidélisent en premier lieu les salariés présentant un ensemble de propriétés qui rend leur fidélisation utile à l’entreprise.
Qui sont les vacataires des sondages ? Selon des représentations courantes, la population des vacataires serait composée de personnes à la recherche d’une activité ponctuelle, passagère ou réduite (étudiants, « marginaux », artistes, mères de famille…). Bien que des données d’ensemble fassent défaut, plusieurs sources permettent de contredire cette vision qui fait correspondre une situation d’emploi atypique avec des profils sociaux spécifiques. C’est notamment ce que montre l’analyse de l’évolution du recrutement à partir de l’exploitation statistique du fichier des vacataires travaillant pour une entreprise de taille moyenne. Si les moins de 30 ans sont majoritaires dans le recrutement sur la période 1997-2004 (autour de 50%), ils y restent rarement plus de quelques mois contrairement aux vacataires plus âgés. Mais un des indices le plus probant de la normalisation du recrutement est une masculinisation couplée d’une augmentation de l’âge des hommes à leur entrée dans l’entreprise : alors qu’en 1997, ils représentaient 23% des nouvelles recrues, ils étaient 35% en 2004 ; en 1997, 71% d’entre eux avaient moins de 30 ans et cette proportion a décru régulièrement pour atteindre 41% en 2004. Une autre source corrobore ces observations : l’audit réalisé en 2007 par un cabinet de conseil (IDC). Selon cet audit, les étudiants représentent une faible part du personnel d’enquête (30% pour les enquêtes par téléphone, 4% pour les enquêtes en face-à-face, à peine 1% pour les superviseurs et 16% pour les autres postes). On y apprend également que l’âge moyen des enquêteurs téléphoniques est de 32 ans (avec une ancienneté moyenne de 4 ans), celui des enquêteurs en face-à-face de 44 ans (avec une ancienneté moyenne de 12 ans), celui des superviseurs de 39 ans (avec une ancienneté moyenne de 13 ans) et celui de personnels occupant d’autres postes de 38 ans (avec une ancienneté moyenne de 11 ans). Quant à leur situation familiale, ils sont 50% à vivre en couple et ils ont des enfants dans une proportion identique. Des étudiants minoritaires, des âges relativement élevés, une ancienneté conséquente, de plus en plus d’hommes de moins en moins jeunes dans une activité très féminisée [4]…On est loin de l’image du job d’appoint ou de passage pour étudiants et femmes au foyer. Il s’agit bien d’un « travail comme un autre » effectué par des gens « comme tout le monde ». |
Malgré cela, toute stabilisation reste incertaine. En effet, il suffit de peu de chose (un manquement trop manifeste aux standards de production, une attitude revendicative, une altercation avec un supérieur…) pour que le lien soit rompu unilatéralement par simple décision d’un cadre. Les vacataires sont ainsi face à une double contrainte : se fidéliser pour sécuriser leur situation tout en limitant leur dépendance vis-à-vis de leurs employeurs réguliers. Pour y parvenir, ils doivent être dotés d’atouts leur permettant de se placer facilement sur le marché. Faire carrière implique donc à la fois une capacité à se fixer et une capacité à être mobile. Pour cela, trois types de ressources s’avèrent nécessaires.
En premier lieu, les vacataires doivent être en mesure de se conformer à des standards comportementaux. Ensuite, ils doivent se constituer un capital professionnel spécifique. Enfin, ils doivent faire preuve d’un sens du placement leur permettant d’optimiser les arbitrages entres les missions, les postes et les employeurs. Ces arbitrages permanents déterminent la valorisation ou la dévaluation de leur capital et influent sur le déroulement de leur carrière entendue à la fois comme possibilité de vivre de leur activité (donc d’accéder à un volume de travail suffisant) et, bien que les perspectives restent limitées, comme possibilité d’améliorer leur situation par l’accès aux postes les mieux placés sur l’échelle du salaire, des responsabilités, de l’autorité, de l’autonomie et du prestige.
L’enquête Les résultats présentés ici reposent en grande partie sur une enquête par observation participante qui s’est déroulée entre l’automne 2002 et l’été 2005 dans une dizaine d’entreprises de sondages comme enquêteur (téléphone et face-à-face), opérateur de saisie, codificateur, chef d’équipe et cadre chargé de l’organisation des études. L’ensemble des analyses s’appuient ainsi sur des faits dont on a pu vérifier qu’ils constituaient le quotidien des entreprises de sondages et des vacataires qu’elles emploient. Outre les innombrables discussions menées entre collègues pendant les journées de travail ou en marge de celles-ci, on a également réalisé 25 entretiens auprès de vacataires et de cadres permanents. Un questionnaire a été administré, selon la méthode de l’échantillonnage « sur place », auprès de 129 vacataires travaillant, au moment de l’enquête, pour quatre-vingt entreprises de sondages différentes. La structure de l’échantillon a été contrôlée par comparaison avec le fichier d’une entreprise comprenant 561 vacataires et dont l’exploitation a également permis de tirer des enseignements sur les relations entre les salariés et leurs employeurs. |
En première approximation et d’après ce qu’en disent les cadres, que ce soit en entretien ou au cours de leur activité, les bons vacataires sont ceux en qui ils peuvent se fier. Ils doivent bien sûr tenir leurs engagements, présenter un bon niveau de productivité et réaliser une prestation dont le niveau apparent de qualité est satisfaisant. Mais ce n’est pas tout. Les cadres estiment également pouvoir compter sur eux dès que le besoin se présente. Logiquement, les vacataires qui répondent à ces attentes sont privilégiés dans la distribution des missions. Mais parmi ces dernières, toutes ne se valent pas, certaines sont plus faciles que d’autres ou mieux rémunérées. L’accès à ces missions se fait sur la base d’une attente de réciprocité. Pour recevoir ce qu’une cadre définit comme « une récompense », les vacataires doivent avant tout donner. L’allégeance récompensée prend ici la forme d’une disponibilité complète et d’une acceptation de tout ce qui leur est proposé, du jour au lendemain, voire le jour même, quelles qu’en soient les conditions et parfois pour seulement quelques heures. Refuser trop régulièrement les propositions les moins intéressantes reviendrait à perdre toutes chances de fidélisation. Aussi, lorsqu’ils ne travaillent pas, les vacataires restent à disposition de leurs employeurs au point que leur temps libre devient un temps d’astreinte [5]. Cela étant, tout ceci ne fait pas l’originalité des relations que les vacataires entretiennent avec les cadres, car pour obtenir du travail régulièrement, il ne suffit pas d’effectuer correctement son travail, d’obéir et de se tenir à disposition. Il faut avant tout savoir se vendre, se conformer à des standards comportementaux, voire s’impliquer affectivement.
La vente de soi et l’implication relationnelle
Pour chaque mission, tous les vacataires inemployés entrent en concurrence pour l’accès à la demande de travail. Pour accéder prioritairement aux missions, il faut faire partie des vacataires les plus fidélisés, ceux à qui les cadres pensent spontanément, et, pour cela, avoir réalisé un travail de placement préalable. En effet, la fidélisation dépend en grande partie de la capacité à se vendre efficacement en démarchant régulièrement les employeurs, par téléphone ou en se déplaçant, et à se présenter sous son meilleur jour lors de chaque contact. Pour parvenir à tisser des liens privilégiés, il faut se montrer réactif, volontaire, souriant, sympathique, voire amical, tout en restant respectueux. Dans une situation où les liens contractuels sont discontinus et de courte durée, la personnalisation des relations avec les cadres représente la meilleure assurance pour l’avenir. Les vacataires soulignent très souvent que l’obtention de travail repose avant tout sur une appréciation positive personnelle, voire sur des rapports affectifs (« Ça dépend de qui t’aime ou t’aime pas. »). Ces relations, aussi superficielles soient-elles, excèdent les strictes relations professionnelles entre supérieurs et subordonnés, tout en les transfigurant. Alors que le statut d’emploi confère aux cadres un pouvoir discrétionnaire sur les vacataires, les interactions entre les deux parties prennent l’apparence de rencontres entre vendeurs et acheteurs d’une prestation [6] enrobées d’une touche de familiarité [7].
La façon de se présenter et de s’exprimer pour solliciter du travail est à ce point déterminante qu’elle prime sur la capacité à tenir correctement le poste. Dans ces emplois, un ensemble de qualifications réelles, sur lequel on reviendra, joue un rôle important tant pour effectuer le travail que pour se maintenir dans l’emploi. Cependant, ces qualifications ne font l’objet d’aucune certification institutionnelle et d’aucune reconnaissance dans les entreprises. Dans les fichiers de suivi des vacataires, les informations consignées portent moins sur la productivité ou sur la qualité du travail que sur les comportements. On y juge la « personnalité » des vacataires, leur entrain, leur dynamisme, leur ponctualité, leur bonne volonté, leur investissement, leur attitude générale ou encore leur façon de se tenir et de parler [8]. Les cadres se déplaçant rarement sur le terrain, les évaluations sont donc essentiellement le résultat d’impressions recueillies au cours d’interaction en face-à-face lors de passages dans les bureaux et de courts briefing ou d’échanges téléphoniques comme celui-ci, enregistré pendant un entretien interrompu par l’appel d’une cadre : « Oui, salut Isa…Mais oui, je te reconnais parfaitement ma chérie ! Si je ne te reconnaissais pas, j’aurais un peu honte…OK…Moi aussi, je te fais mille bisous…Ciaciao Isa, au revoir. »
En l’absence de qualifications reconnues, les compétences dites relationnelles (le « savoir-être ») prennent une place centrale dans les évaluations. Ainsi, il vaut mieux faire bonne impression en se montrant aimable et en manifestant sa conformité aux standards comportementaux qu’uniquement respecter les standards de production.
Les relations avec les cadres entre distance au rôle et enchantement
Se conformer à ces standards comportementaux suppose dans un premier temps de les identifier puisqu’ils ne sont pas prescrits explicitement. Dans un second temps, cela implique un certain degré de théâtralisation dans la présentation de soi [9], donc un certain « talent », ou tout du moins une aptitude à jouer afin de mettre en cohérence son comportement avec les attendus de la situation [10]. En fonction du degré d’intériorisation de cette aptitude, lié aux origines sociales des agents, on observe différentes modalités du rapport à la mise en scène des interactions avec les cadres.
Nombres de vacataires d’origine moyenne ou supérieure développent un point de vue réflexif sur les pratiques relationnelles permettant d’obtenir du travail [11]. En raison de dispositions et d’aspirations liées à leur extraction sociale ou à leur investissement scolaire, la conformation aux règles de l’interaction représente pour eux un tel coût symbolique et pratique, un tel investissement, qu’elle ne va jamais de soi, n’est jamais insensible. Ils désignent souvent l’impression de devoir « mendier » le privilège de vendre leur force de travail comme un des aspects les plus désagréables de leurs relations avec les cadres. Mais ce n’est pas le seul ni le plus contraignant. Ce sont surtout les artifices relationnels dont doivent se parer les interactions qui leur pèsent le plus. Il peut s’agir de chantage affectif (« tu pourrais quand même faire ça pour moi ») face auquel ils sont désarmés puisque toute réponse négative remettrait en cause leur fidélisation ; de séduction (plaire à tout prix et plus que les autres, par tous les moyens en allant parfois jusqu’à la limite de l’obséquiosité) ; ou encore de ce qu’une vacataire identifie comme « une sorte d’injonction au déballage de la vie privée et au copinage ».
Si ces vacataires sont assez lucides sur le jeu auquel ils sont contraints, c’est que n’y étant pas spontanément ajustés, ils doivent se livrer à d’importants efforts d’ajustements corporels, linguistiques et éthiques pour parvenir à tenir le rôle attendu. Car ils savent que ces artifices sont déterminants et qu’ils ne peuvent s’y soustraire s’ils veulent se faire une place ou la conserver. Certains assument de se mettre en scène au nom de l’impératif de survie (« Je ne compte que sur ça pour vivre, alors je fais en sorte que mon comportement leur donne envie de m’en donner un peu plus. Je suis un minimum sociable et sympathique, je leur donne l’image qui leur convient. »). D’autres n’y parviennent pas. Pour ceux-là, les chances de trouver régulièrement du travail et de se fidéliser auprès d’un noyau d’employeurs s’en trouvent limitées tout comme l’éventail de leurs possibilités, réduit à deux options : sortir du secteur ou se résoudre à une carrière difficile.
En revanche, parmi les vacataires qui ont de l’ancienneté et ont effectué la majeure partie, voire la totalité, de leur parcours professionnel dans les sondages, on observe les meilleures performances de mise en scène des relations avec les cadres ainsi que des attitudes allant du déni de cette mise en scène à une vision véritablement enchantée de ces relations. Ces logiques, poussées à leur comble, parviennent à travestir les rapports de domination au point que ces vacataires peuvent en arriver à considérer que les cadres et eux-mêmes font partie d’un même groupe de copains, voire d’une même famille.
Ces vacataires sont souvent d’origine plus modeste ou sont issus de lignées de petits travailleurs indépendants. Le cas de Marie-Paule J., 58 ans, vacataire depuis 22 ans, fille d’un ouvrier de l’artisanat et dont tous les membres de la fratrie travaillent en indépendants, est exemplaire. Dans son travail, elle ne côtoie ni collègues ni chefs : elle n’a que des « copines » ou des « copains ». Ce cas est d’autant plus intéressant que Marie-Paule J. travaille non seulement comme enquêtrice, mais qu’elle encadre également des équipes dont elle est chargée du recrutement [12]. Elle se retrouve donc à la fois en position de recrutée et de recruteuse et les relations qu’elle entretient avec les cadres sont celles qu’elle attend que les enquêteurs qu’elle supervise entretiennent avec elle. Le fait que les cadres et les autres vacataires soient « sympas » et « l’aiment bien » prime sur toute autre chose. Elle estime d’ailleurs que ses relations avec les cadres sont irréductibles à des rapports hiérarchiques et de dépendance. Elle se défend également d’entretenir ces relations pour des raisons utilitaires. Voici par exemple comment elle relate une reprise de contact avec un employeur avec lequel les liens s’étaient distendus : « Pendant six mois ils ne m’avaient pas appelée, alors je suis passée leur dire bonjour, en tant que copine, pas pour demander s’ils avaient quelque chose…Du coup, c’est reparti. Mais je ne l’ai pas fait pour ça. » Pour trouver des missions et renouer des liens, Marie-Paule J. passe « dire bonjour », sans façon, et ces visites ne lui apparaissent (ou elle ne les présente pas) comme des démarches de recherche d’emploi. Ce sont des visites de courtoisie.
Si entretenir de telles relations avec des agents qui détiennent un pouvoir de distribution du travail suppose d’endosser un rôle, il faut cependant nuancer la métaphore théâtrale [13]. D’une part, ceux qui « jouent » n’ont pas vraiment le choix de jouer ou de se retirer, ni celui du rôle, ni celui de modifier le « script » sans provoquer une débâcle qui pourrait leur coûter cher [14] ; d’autre part, le rôle ne peut être joué « naturellement » par ceux qui ne détiennent pas la capacité incorporée à improviser dans les limites d’un certain registre imposé par le cadre des interactions, ce qui les contraint à des efforts constants d’ajustement. Pour les autres, il y a au contraire congruence entre le « script » et leurs attitudes spontanées. On a là une des clés de compréhension des variations dans les perceptions que les vacataires peuvent avoir de cadres. Le caractère contraignant des standards comportementaux auxquels chacun se plie, au moins dans une certaine mesure, est lié au degré de leur intériorisation, laquelle dépend en grande partie de leur origine sociale : plus ils le sont, et moins ils apparaissent en tant que tels ; plus l’ajustement est fort, plus la prise de rôle est pleine, moins le rôle doit être joué et plus le sentiment de relations libres et de liberté d’action est important ; à l’inverse, moins les agents sont ajustés et plus la prise de rôle suppose un effort et plus ils développent une aptitude à la distanciation réflexive.
Ainsi, plus les vacataires sont disposés à s’investir spontanément et sincèrement dans des relations de sympathie, sans le ressentir comme une contrainte, plus celles-ci peuvent apparaître comme authentiques et bilatérales. Du coup, leur fidélisation s’en trouve facilitée en même temps que la relation de domination liée à leur position vis-à-vis des employeurs tend à devenir moins sensible, dissimulée par un sentiment de réciprocité à l’origine de l’enchantement des relations. A l’inverse, plus l’entretien de ces relations apparaît comme une injonction à laquelle il faut se soumettre, moins il devient possible de croire en la réalité d’une sympathie, ou au minimum d’une empathie, authentique et désintéressée. Dans ces conditions, la domination exercée par les cadres ne peut être dissimulée et en devient moins supportable. Ce qui en retour n’incline pas à les trouver sympathiques ou à se lier avec eux et compromet donc les chances de stabilisation et de poursuite de la carrière.
Un capital professionnel spécifique constitué d’une somme de qualifications, de savoir-faire propres au secteur constitue le second type de ressources indispensables. En effet, la deuxième condition de maintien dans la carrière et d’optimisation de celle-ci (se stabiliser sans être dépendant, sécuriser une mobilité souvent subie, parvenir à un volume de travail suffisant, gagner en autonomie et en responsabilités), réside dans la capacité à répondre aux besoins de flexibilité fonctionnelle des entreprises, qu’il s’agisse de faire du recueil d’informations, d’encadrer des équipes ou d’assumer différentes tâches de bureau.
Des salariés polyvalents, flexibles et mobiles
Comme on l’a déjà souligné, pour travailler régulièrement et durablement, les vacataires doivent parvenir à équilibrer deux nécessités contradictoires : se fidéliser et limiter leur dépendance à un nombre trop restreint d’employeurs. Une façon d’y parvenir est de se construire une réputation de polyvalence et de fiabilité auprès de différents employeurs afin d’être favorisé lors de la distribution du travail. Comme sur d’autres marchés du travail où les salariés circulent entre les entreprises, l’expérience acquise par la mobilité est considérée comme qualifiante [15] et un curriculum vitae qui atteste une capacité à réaliser tous les types de missions constitue une ressource importante pour maintenir ou améliorer sa position et minimiser les effets d’un rapport de force très favorable aux employeurs.
Premier degré de diversification fonctionnelle, la capacité à s’adapter aux différents modes de recueil d’information accroît les chances de stabilisation auprès des employeurs. L’activité de ces derniers est rarement nulle, mais ils ne réalisent pas forcément tous types d’enquêtes simultanément. Il arrive souvent qu’une entreprise effectuant des enquêtes dans la rue, à domicile et par téléphone ne puisse proposer sur certaines périodes qu’un seul type de mission. Pour un vacataire, le fait de pouvoir réaliser n’importe lequel d’entre eux devient alors un atout pour augmenter son volume de travail tout en évitant de disperser son activité auprès d’un nombre trop important d’entreprises. Dans le même temps, cela constitue également un atout pour trouver de nouveaux employeurs, ces derniers étant plus intéressés par des vacataires immédiatement opérationnels sur tous types de missions que par des vacataires trop spécialisés.
L’autre moyen permettant de stabiliser les relations avec les employeurs et de parvenir à obtenir du travail en continu sur des périodes relativement longues (en comparaison avec les contrats d’enquêtes qui dépassent rarement cinq jours), est d’être opérationnel aussi bien pour le travail de terrain que pour des tâches de bureau. En effet, le temps d’une étude excède celui du recueil d’informations. Il comprend également celui, en amont, de sa préparation et, en aval, celui du traitement, temps sur lesquels il est d’usage d’employer des vacataires. Ceux qui sont susceptibles d’être affectés à la mise en place des études (photocopies, préparation des dossiers et du matériel…) ainsi qu’à certaines phases de la mise en forme et du traitement des données (saisie, analyse et codification des questions ouvertes) peuvent ainsi obtenir des jours de travail supplémentaires. Ces mêmes vacataires ont également plus de facilité à se placer auprès de nouveaux employeurs. D’une part parce qu’ils peuvent postuler sur différents postes et profiter de plus d’opportunités d’emploi. D’autre part parce que les employeurs apprécient de disposer de vacataires pouvant être mobilisés au gré de leurs besoins que ce soit sur le terrain ou dans les bureaux.
Contrairement aux métiers du spectacle où la poursuite de la carrière suppose de se concentrer autour de points forts correspondant à une vocation [16], pour les vacataires des entreprises de sondage, le fait de détenir certaines qualifications plus spécifiques, plus pointues et relativement rares (maîtrise de langues étrangères, réalisation d’entretiens qualitatifs, analyse des questions ouvertes, encadrement d’équipe, mise en place complète et suivi d’études, mise en forme et analyse de données statistiques) n’implique pas forcément ce resserrement. En effet, si la détention de ces qualifications constitue une ressource importante, notamment pour équilibrer les exigences de stabilisation et de mobilité, aucune n’est suffisante en elle-même. Comme les petits artisans qui doivent maîtriser plusieurs métiers, il faut donc justifier d’expériences diversifiées, du point de vue des tâches comme de celui des niveaux de qualification, d’autonomie ou de responsabilité.
Utilité du capital professionnel et valeur du travail
Ce capital de qualifications qui se révèle indispensable pour répondre aux exigences de mobilité interne, l’est tout autant pour faire face à l’obligation de mobilité externe. Par ailleurs, en fonction de son volume, ce capital devient un moyen de contrebalancer les exigences relationnelles et comportementales dans la mesure où il limite la dépendance vis-à-vis des employeurs : plus il est important, plus les enjeux de l’implication relationnelle sont minimisés, puisque les risques liés à la rupture avec un employeur régulier sont réduits.
Dans la mesure où le propre de l’efficacité du capital professionnel est de permettre une circulation entre les postes de manière à maintenir une certaine continuité de l’activité, plus un vacataire en est doté et plus il a de chances de circuler sur l’échelle des postes en termes de responsabilité, d’autorité, d’autonomie, de prestige, mais également de rémunération, que ce soit entre différentes entreprises ou au sein de l’une d’entre elles. Autrement dit, la valeur du capital professionnel n’est pas reconnue en tant que telle : la rémunération dépend uniquement de la tâche effectuée et non du degré réel de qualification de celui qui l’effectue. Un vacataire à qui on confierait le remplacement d’un cadre peut ainsi se retrouver au plus bas de l’échelle des salaires quand il fait de la saisie, car tous les vacataires sont rémunérés au même tarif quand ils occupent un même poste et sont payés différemment selon le poste qu’ils occupent. En termes de rémunération, la valeur reconnue au salarié ne lui est donc pas attachée, elle n’est jamais fixée, elle fluctue et peut être remise en cause à tout moment.
Bien que la diversité et le niveau des qualifications soient une condition d’accès aux postes les mieux rémunérés et les plus autonomes, on voit que le principal enjeu de l’accumulation de ce capital n’est pas l’amélioration durable de la position dans les entreprises, mais la continuité des revenus. Il s’agit essentiellement de se maintenir dans l’emploi par l’accroissement des chances de placement à n’importe quel poste et dans n’importe quelle entreprise. Ce n’est qu’en seconde instance que ce capital détermine les chances des vacataires d’améliorer leurs conditions de travail et de rémunération, soit par mobilité interne, soit par mobilité externe, sachant par ailleurs que rien n’est acquis puisque tout peut être remis en cause du jour au lendemain.
L’alternative entre placement interne et placement externe amène à la troisième condition que doivent remplir les vacataires pour sécuriser, maintenir ou améliorer leur situation : l’accumulation et la valorisation des ressources ainsi que la poursuite de la carrière impliquent des choix souvent irréversibles entre la loyauté envers un employeur régulier et la défection pour en rejoindre un autre proposant de meilleures conditions (en termes de volume de travail, d’autonomie, de responsabilités, d’autorité, de niveau de rémunération, de pénibilité, etc.), mais auprès duquel la fidélisation reste, au départ, incertaine. La limitation des risques inhérents à ces choix repose essentiellement sur des calculs permanents ou plus exactement sur un sens du placement généré par des conditions d’emploi où chaque salarié devient gestionnaire de ses possibilités d’accès au travail, de son « employabilité [17]. De cette façon et à leur corps défendant, les vacataires des entreprises de sondages incarnent le modèle d’agent social promu par la théorie du capital humain, agent entrepreneur de lui-même et « étant à lui-même son propre capital » [18].
Homo vacatarius = homo œconomicus ?
Il ne s’agit pas d’affirmer ici que les vacataires seraient une incarnation pure d’homo œconomicus, des individus atomisés, détachés de tout collectif et dont toute l’activité serait uniquement orientée vers la maximisation de leurs intérêts économiques. En revanche, cette perspective doit être envisagée tant leurs conditions d’emploi imposent une pratique gestionnaire quasi entrepreneuriale des qualifications et du temps. Ensuite, il ne suffit pas de rejeter les représentations de l’activité sociale issues de l’économie néoclassique en arguant qu’elles ne sont que de pures fictions ou qu’elles sont moralement inacceptables pour annuler leurs effets pratiques et symboliques.
En s’institutionnalisant, le néolibéralisme est devenu le référent qui informe la plupart des politiques gouvernementales depuis plusieurs décennies. Plus globalement et comme arme au service d’un projet de transformation politique, il constitue un discours omniprésent qui impose une vision du monde social et les pratiques qui entrent en adéquation avec celle-ci. On ne peut plus faire comme si les agents n’en étaient pas affectés. Le développement d’un « individualisme de marché » obtenu par soustraction aux collectifs [19], en rend bien compte. A une représentation d’une société de classes, se substitue celle d’une collection d’individus responsables de leurs entreprises, à la recherche de la maximisation de leurs intérêts, objectif pour lequel ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Si l’ensemble de la réalité sociale ne correspond pas à cette représentation, on ne peut cependant nier que cette dernière produit des effets et que ceux-ci sont d’autant plus forts que le contexte dans lequel les agents évoluent s’en approche, comme c’est le cas des vacataires et, plus généralement, de tous ceux qui évoluent sur des marchés du travail précaire qui, comme le dit l’une d’entre eux, doivent « toujours se gérer ».
Affirmer que les vacataires sont placés dans une position où ils doivent agir comme des individus gestionnaires d’eux-mêmes et que de cela dépend leur réussite ne signifie ni que cette faculté serait universellement distribuée ni qu’ils agiraient en toute conscience à la façon d’agents rationnels. Pour autant, l’identification des critères qui président à la sélection des missions, la gestion de leurs relations avec les cadres ou le récit qu’ils font de leurs pratiques de recherche d’emploi révèlent des évaluations permanentes de la rentabilité de leurs placements.
Des choix raisonnables plus que rationnels
Les conditions d’emplois imposent donc aux vacataires d’être, individuellement, des gestionnaires de leur valeur et de leur volume d’activité, celui-ci dépendant étroitement de celle-là. Le sens du placement dont ils peuvent faire preuve, susceptible de varier d’un agent à un autre, est plus la manifestation d’un sens pratique que le résultat d’une visée explicitement calculatrice. Il reste que les contraintes qui pèsent sur tout agent entrant dans cet espace professionnel et cherchant à s’y maintenir impliquent qu’il doit se livrer à des estimations constantes des conséquences de chacune de ses décisions. Pour se maintenir, améliorer leur position et rendre celle-ci moins incertaine, les vacataires doivent être suffisamment avertis des atouts dont il faut disposer ou des erreurs à ne pas commettre et agir en connaissance de cause : développer leur polyvalence ; évaluer les employeurs avec lesquels il est rentable de faire parfois des concessions, notamment parce qu’ils présentent des opportunités d’accès à des postes plus intéressants, et ceux avec qui il est inutile d’en faire parce qu’il n’y a rien à en attendre ou parce que les conditions qu’ils proposent n’incitent pas à la fidélisation ; déterminer avec lesquels ils peuvent se permettre de ne pas rendre un travail complet, ou d’abandonner un poste sans prendre le risque d’une dégradation de leur situation ; régler leur attitude avec les cadres en fonction de l’intérêt qu’il peut y avoir à entretenir de bonnes relations avec eux et à faire bonne impression ; etc. Les vacataires se trouvent placés dans l’obligation constante de chercher et d’échanger entre eux des informations sur l’état du marché, de mettre en place des plans et d’effectuer des choix tactiques, lesquels sont d’autant plus contraints que leurs ressources professionnelles sont faibles. Mais, les paramètres pris en compte sont loin d’être uniquement économiques, l’ambiance de travail et la qualité des relations avec les cadres pouvant notamment peser fortement dans les décisions. De plus, la mise en place de ces plans s’inscrit rarement dans une visée stratégique. Bien que la sécurisation de la carrière dépende de l’accumulation et la diversification des ressources, les conditions d’emploi, ainsi que les perspectives de stabilisation et de promotion, ne permettent pas vraiment de projection à long terme. D’une part, il n’y a que dans de rares cas qu’un vacataire peut s’imaginer ou souhaiter faire carrière dans une entreprise, que ce soit en y gardant sa place – ce qui est assez improbable – ou en devenant salarié en Contrat à Durée Indéterminée (CDI). D’autre part, la valeur des ressources n’est jamais établie une fois pour toutes, notamment dans les cas de mobilité vers de nouveaux employeurs, puisque qu’elle n’est pas systématiquement reconnue et qu’elle doit être prouvée. Enfin, mêmes si elles révèlent des tactiques, les actions sont plus réactives que réflexives : les vacataires sont plus souvent des gestionnaires raisonnables et contraints de l’être que des gestionnaires rationnels conscients qui bénéficieraient d’une information pure et complète, poseraient instantanément et librement leurs fins en dehors de tout attachement collectif et agiraient en projetant précisément les résultats de leurs évaluations. C’est par la force des choses, en fonction des opportunités qui se présentent à eux, par un apprentissage implicite fait de tâtonnements et d’échecs, au fur et à mesure des expériences accumulées, plus que par une démarche volontaire et rationnelle, qu’ils diversifient leurs expériences, se forment aux différents postes et accroissent les ressources sur lesquelles reposent leurs chances d’accès à l’emploi et de maintien de leur situation professionnelle.
Bien que les entreprises de sondage aient besoin de disposer d’une main-d’œuvre un tant soit peu fidélisée et loyale sur laquelle elles peuvent compter, la sécurisation de la situation et de la trajectoire professionnelles des vacataires qu’elles emploient repose uniquement sur une « sécurité d’employabilité » [20] qu’ils doivent construire par eux-mêmes. L’analyse de leur condition et des pratiques qu’ils doivent mettre en œuvre pour s’y maintenir montre ce qu’implique concrètement la dérégulation du marché du travail. Elle induit une forme salariale que l’on peut définir comme un salariat libéral. Un salariat où la mobilisation et le gouvernement des individus ne sont pas obtenus en réduisant leur liberté et leur incertitude par l’inscription dans un cadre de règles et de garanties collectives, mais au contraire en accroissant leur liberté (formelle) et leur incertitude (réelle) par l’absence d’un tel cadre. Un salariat qui par bien des aspects s’apparente à la situation des travailleurs indépendants, un salariat où les risques du marché sont reportés sur des salariés individuellement responsables de leur emploi, où il faut apprendre à entretenir des relations de type commercial avec ses employeurs et leurs représentants. Dans ces conditions, la force des choses accule les agents à se gérer, à devenir eux-mêmes une petite entreprise qu’ils doivent s’efforcer de rendre pérenne par leur dynamisme, leur conformité à des standards comportementaux, la gestion d’un capital professionnel, des prises de risques et la qualité au moins apparente de leurs prestations. C’est à ce prix que certains parviennent à se placer favorablement et à faire leur salaire, lequel s’apparente dès lors à un chiffre d’affaire. Au même titre que la remise en cause du système de protection sociale à laquelle elle est liée [21], la dérégulation des relations salariales apparaît ainsi comme un point d’appui déterminant dans l’avènement d’un régime de gouvernementalité néolibérale où les techniques de domination qui s’exercent sur les agents les mènent à faire du marché l’opérateur principal de leurs conduites.
[1] Préparation du matériel d’enquête, passation des questionnaires, réalisation d’entretiens, encadrement des équipes d’enquêteurs, saisie des données, rédaction des plans de codes pour les questions ouvertes, codage, parfois remplacement des cadres de terrain.
[2] Ces CDD dits d’usage peuvent être quotidiens (voire ne couvrir que quelques heures par jour) et dépassent rarement une semaine.
[3] De l’ordre de deux ou trois.
[4] D’après les chiffres du cabinet IDC et en s’appuyant sur nos propres observations, on peut estimer que les femmes représentent à peu près les deux-tiers des personnels d’enquête.
[5] Caveng R., « La liberté des vacataires en instituts de sonadage », Interrogations¸n°4, 2007, p. 59-77.
[6] Pilmis O., « Compétences professionnelles et compétences para-professionnelles sur le marché du travail : les journalistes pigistes et le “placement de sujet” », Formation et emploi, n°99, 2007, p. 75-87 ; Villette M., « Vendre et se vendre. Note sur une attitude « libérale » devant la vie », Regards sociologiques, n°21, 2001, p. 87-98.
[7] Le tutoiement est de rigueur et la bise fait partie du registre des rituels de salutation.
[8] « Sympathique », « volontaire », « désagréable », « trop critique », « pénible », « chipoteur », « trop mou », « lunatique », etc.
[9] Faguer J.-P., Le « relationnel » : diversification du monde des services et des formes d’auto-exploitation, HDR sous la direction de J.-C. Combessie, Université Paris 8, 1997.
[10] Goffman E., La mise en scène de la vie quotidienne. La présentation de soi, Paris, Minuit, 1973, p. 61-62.
[11] C’est notamment le cas des étudiants, des jeunes diplômés en attente d’insertion, des intermittents du spectacle ou des personnes d’origine moyenne ou supérieure ayant connu un déclassement important, soit par rapport à leurs parents, soit en cours de carrière suite à une rupture biographique comme un licenciement, un divorce ou une longue maladie.
[12] Certaines entreprises emploient quelques chefs d’équipe qui disposent de leur propre réseau d’enquêteurs. Quand elles lancent une étude, il leur suffit de contacter un chef d’équipe qui se charge ensuite du recrutement des enquêteurs.
[13] Comme y invite lui-même Goffman quand il admet que l’analogie dramaturgique qu’il a poussée dans ses extrêmes limites « relevait en partie d’un artifice théorique ». (Goffman E., La mise en scène de la vie quotidienne, op. cit., p. 240)
[14] A la différence des personnages de théâtre à qui « rien de réel et d’effectif’ » ne peut arriver (Ibid.).
[15] Reynaud E., « Aux marges du salariat : les professionnels autonomes », in Vatin F., Le salariat. Théorie, histoire et formes, Paris, La Dispute, 2007, p. 299-309.
[16] Menger P.-M., « Rationalité et incertitude de la vie d’artiste », Année sociologique, n°39, 1989, p. 134 et 138.
[17] Comme c’est désormais le cas dans bien d’autres secteurs. Voir Boltanski L., Chiapello E., Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 1999, p. 144-145 ; Durand J.-P., La chaîne invisible, Paris, Le Seuil, 2004, p. 115-116.
[18] Foucault M., Naissance de la biopolitique, Paris, Gallimard-Le Seuil, 2004, p. 232.
[19] Castel R., Les métamorphoses de la question sociale, Paris, Fayard, 1995, p. 751.
[20] Gautie J., « Flexicurité et/ou sécurité : la France en quête d’un modèle », Cahiers français, n°330, 2006, p. 92.
[21] Corsani A., Lazzarato M., Intermittents et précaires, Paris, Amsterdam, 2008.
Caveng Rémy, « Faire carrière dans la précarité. Soumission, compétences relationnelles, capital professionnel et sens du placement chez les vacataires des entreprises de sondage », dans revue ¿ Interrogations ?, N°12 - Quoi de neuf dans le salariat ?, juin 2011 [en ligne], https://revue-interrogations.org/Faire-carriere-dans-la-precarite (Consulté le 13 décembre 2024).