A une époque où les avancées des biotechnologies ne cessent de transformer les données du vivant, la chirurgie esthétique apparaît comme un moyen d’améliorer le corps en dépassant ses limites propres. Toutefois, la recherche de l’excellence physique et la promesse de réussite (sociale, sexuelle…) qui la sous-tend butent sur une normativité implicite : le dispositif chirurgical distribue des valeurs de genre (masculin et féminin) surimposées qui mordent à même la chair. Dans le champ critique contemporain, le concept de performativité rend bien compte d’un tel mécanisme d’assujettissement et de façonnement du corps, tout en dessinant la possibilité d’une re-configuration créative de sa réalité. Les opérations chirurgicales-performances d’Orlan témoignent précisément d’une mise en question performative des idéaux du corps performant. Déjouant le fantasme de perfection et de désirabilité, elle soumet son visage à un devenir-monstre qui interroge les conditions d’intelligibilité du féminin et de l’humain.
Mots-clefs : Performativité - Chirurgie esthétique - Art contemporain - Corps - Genre
From cosmetic surgery to Orlan : Efficient or performed body ?
At a time when progressing biotechnology keeps transforming the data of life, cosmetic surgery seems to be a way to improve the body beyond its own limits. Nevertheless, when being in search for physical excellence and longing for the social or sexual success it implies, we meet with a tacit normativity : cosmetic surgery is one of the sites in which the imperative standards of gender (masculine and feminine) inscribe and impress themselves on flesh. In the critical contemporary field, the concept of performativity can explain the mechanism which brings the body into subjection and shapes it, but also the possibility for corporeality to be re-configured in a creative way. In fact Orlan’s surgical operations-performances show a performative way to question the ideals of the efficient body. To foil the fantasy of perfection and desirability, she gets a monster-becoming face ; so her work puts the problem of the conditions which make it intelligible to be considered as a woman and a human being.
Keywords : Performativity - Cosmetic surgery - Contemporary art - Body - Gender
« Prendre le parti de la chair ! » [1] … Tel est le mot d’ordre auquel Bernard Andrieu nous invite à consentir sans réserve à une époque où le développement des biotechnologies, les avancées de la médecine, ou l’envolée de l’ingénierie génétique, s’ils nous laissent parfois incrédules, nous poussent à croire que tout est possible, et d’abord et surtout le meilleur. Le corps vivant est au centre de ces changements, et c’est son devenir-hybride, c’est-à-dire le surgissement de l’hétérogène au sein de son unité propre, qu’il nous faudrait assumer : « Un corps à soi est la possibilité de se construire une identité en utilisant les progrès technoscientifiques qui transforment les données naturelles. L’hybridation consiste ici à introduire dans son corps des produits, des outils, des machines qui donnent une nouvelle identité : l’identité hybridée n’est plus l’identité naturelle que nous avons héritée de nos parents… Ce corps d’identité est composite, mélangé et hybridé comme en témoignent les piercings, les prothèses, les implants, les rôles sociaux, les genres et postures… Mais ces hybrides […] font désormais partie de la représentation d’un corps amélioré, choisi et individuel » [2]. Parmi ces pratiques d’hybridation, la chirurgie esthétique tient une place importante : elle propose des implants et autres infiltrations pour modifier de manière provisoire ou définitive l’image et l’éprouvé corporels, et s’inscrit par là dans une démarche apparemment délibérée de perfectionnement du corps. Par sa plasticité matérielle, le corps actualiserait de nouvelles possibilités dans la recherche de l’excellence physique ou dans la promesse d’une séduction décuplée. Toutefois, un tel optimisme bute rapidement sur le constat d’après lequel ce choix d’auto-façonnement s’enlève sur fond de possibilités normatives, liées à un dispositif de pouvoir qui s’infiltre dans les ramifications les plus intimes de nos vies, tout particulièrement lorsqu’il s’agit des identités sexuées ou de genre. Si la chirurgie esthétique laisse attendre un dépassement des limites du corps propre, elle reconduit une forme d’essentialisme en alignant l’apparence physique sur des canons de beauté socialement recevables et qui font mordre sur la chair des idéaux de genre surimposés. A bien des égards, elle s’insère dans les « pratiques disciplinaires » dont Foucault repère les effets d’assujettissement dans l’ordre des pouvoirs et des discours. Dans le sillage de Foucault, Judith Butler rend compte de ces modes de production du corps et forge à cet effet le concept de performativité corporelle dont l’originalité est de jouer sur deux versants : il indique à la fois le mécanisme des pratiques signifiantes de la norme et la possibilité d’une re-codification de la réalité ainsi produite à travers certaines stratégies corporelles. Parmi celles-ci, il en est une qui est en passe de devenir paradigmatique dans l’univers des mutations contemporaines du corps : il s’agit du travail d’Orlan, connue pour ses opérations chirurgicales-performances. En offrant son visage à des interventions plastiques qui le reconfigurent suivant des modalités inattendues, à la limite de la laideur ou de l’étrange, elle interroge les conditions d’intelligibilité du féminin et déplace ses prémisses politiques. Déjouant le fantasme de perfection et de désirabilité, elle détourne la pratique chirurgicale pour en faire surgir l’impensé et ouvrir sur un monde de devenirs et d’identités nomades, détachés de la perspective d’un dépassement unifiant. En faisant jouer ensemble le sens ordinaire de la performance comme indice de réussite ou d’efficacité, le concept théorico-politique de performativité, et le registre artistique de la performance comme mode d’expression qui constitue son propre référent, il s’agira de mettre à l’épreuve les fondements et les idéaux normatifs du corps performant.
Les productions pornographiques abondent en publicités qui vantent des produits permettant d’accroître la taille du pénis. Jouant de l’imaginaire de la performance sexuelle - qui se logerait dans un morceau de chair érectile - ces publicités entretiennent le marché des fantasmes masculins et écoulent ainsi onguents et appareils divers. De la même manière, des hommes sollicitent la médecine et la chirurgie pour allonger leur pénis. Cette quête de la taille “nécessaire” du sexe trouve son corollaire dans les opérations visant à offrir aux femmes une “belle” poitrine, c’est-à-dire une poitrine correspondant aux mensurations jugées idéales pour être une “belle femme”. Dans les deux cas, il s’agit de coller aux imaginaires stéréotypés qui distribuent les valeurs érotiques du genre (le masculin et le féminin) en fonction des mensurations physiques. Les injonctions sociales sont constantes et se diffusent aussi bien par les médias, que par les commentaires les plus communs ou les plaisanteries les plus habituelles. Même si, pour les hommes, les mensurations requises pour adhérer à l’idéal viril risquent de rester loin des regards permettant de jauger cette adéquation, ce qui importe est l’idée qu’on puisse agir sur son sexe pour le transformer en vue d’en accroître les performances. Pour les femmes, l’opération de la poitrine s’inscrit dans une exigence de paraître, et s’accorde avec le fait que le paysage visuel occidental est dominé par l’idéalisation esthétique d’une certaine version du féminin. Il est frappant de voir à quel point l’expression seule d’une beauté plastique qui soit conforme aux standards véhiculés par la mode, promet l’accès aux plus hautes sphères de la renommée et de la désirabilité sociale, au-delà même des contingences du talent et de la créativité. Dans une ambiance entreprenariale vouée à engendrer la compétition, ou, du moins, une concurrence à la consommation, l’image du corps de la femme représente l’un des plus gros marchés. Cernés par la promotion incessante de “stars” à la silhouette filiforme, ou par des publicités jouant volontiers sur l’ambiguïté androgyne, nous subissons l’emprise d’un idéal esthétique fondé sur la minceur et l’épurement des lignes ; l’exhibition médiatique de corps neutres, presque spectraux, fournit un modèle obligatoire qui contraste singulièrement avec le corps charnel de la norme pornographique… Dans ce contexte, un nombre croissant de femmes se livrent au bistouri à la recherche d’un corps plus accompli.
Si le recours de plus en plus fréquent à la chirurgie esthétique est porteur d’une promesse de réussite, c’est en référence à un ordre représentatif du corps associant le Bien, le Beau et le Vrai, dans une sorte de métaphysique néo-libérale indexée sur les conditions du marché : vrai sexe, beau corps, et bon sujet, telle est la formule qui légitime l’exploit chirurgical consistant à aligner son corps sur des mesures idéales dans l’espoir d’une réalisation suprême de soi. Confirmer l’assignation de la femme au féminin, c’est-à-dire certifier par l’expression de la beauté plastique qu’une femme appartient en bonne et due forme au genre qui lui est imparti, c’est souscrire, fût-ce malgré soi, à un ordre binaire des sexes répartissant la valeur (Suis-je bien ce que j’ai à être ? Suis-je digne de ce que je me sens devoir être ?) sur des images consacrées. Pourtant, une telle démarche est souvent ressentie comme un acte d’auto-détermination lié au seul souci narcissique et individuel de dépasser les limites du corps propre en vue du meilleur. Ce qui renvoie à une conception du sujet comme agent autonome de ses initiatives : en s’appuyant sur des dispositifs technologiques, il instrumentalise ses prédicats et son environnement immédiat afin de renforcer son pouvoir et d’atteindre une sensation plus intense de perfection ou de liberté. Comment, dès lors, ne pas espérer exercer à plein les possibilités de la séduction, que ce soit dans le champ de la réussite sociale ou dans les aspects les plus intimes de la sphère privée (performance sexuelle) ? Tout le paradoxe est bien dans le double constat d’un souci de libération personnelle, d’un accroissement de sa puissance d’agir, et de la multiplication corrélative de signifiants ou d’images transcendants, porteurs de valeurs normatives, mais inaperçues comme telles : comment comprendre que le désir de devenir plus que ce que l’on est tout en réalisant son être le plus essentiel (son identité de genre) se déploie sur fond d’une stricte injonction à se conformer à des codes socialement recevables ? Il convient ici - afin d’éviter les opinions hâtives et superficielles - de revenir sur l’arrière-plan épistémique de dispositifs tels que celui gouvernant la pratique chirurgicale. Il existe dans le champ contemporain un concept de “performance” qui se démarque de son sens trivial de réussite remarquable ou de chiffrage de l’efficacité. Connexe à celui de “performativité”, il est utilisé dans le cadre d’une rupture avec toute ontologie substantialiste et d’une critique des mécanismes de production des normes de subjectivation. Traversé d’équivoques et de tensions, il pourrait conduire à bouleverser les données de l’équation du “corps performant” en pointant, en lieu et place de la promesse de bénéfice narcissique et de gain de perfection, une sorte de reste opaque ou de point déficitaire propre à troubler (trouer ?) l’imaginaire admis du corps.
Dans Trouble dans le genre - Pour un féminisme de la subversion, publié aux Etats-Unis en 1990, et en France en 2005, la philosophe américaine Judith Butler sollicite le concept-clef de performativité : l’enjeu est de tracer les linéaments d’un projet critique post-féministe qui s’appuie sur une conception originale de la subversion [3]. Pour ce faire, elle tente d’élaborer une théorie du genre performatif qui prenne en compte les acquis de la généalogie foucaldienne du corps assujetti pour les combiner avec une réflexion héritée de la linguistique. En dessinant progressivement un lien entre certaines « inscriptions corporelles » [4] et quelque chose comme une « subversion performative » [5], J. Butler entend s’en servir de levier pour saper les énoncés présumés normatifs pesant sur nos corps. Dès Surveiller et punir. Naissance de la prison [6], Foucault met en cause le discours de l’intériorisation qui relève du régime disciplinaire de l’assujettissement des criminels. Les châtiments infligés aux prisonniers - par exemple, le fait de marquer leur peau au fer rouge - ne vise pas vraiment à réprimer leurs désirs, à leur faire pour ainsi dire “intérioriser” la loi sur le mode de la punition, mais à « inscrire la loi prohibitive dans leur corps, comme si elle constituait leur essence même, leur donnait leur style et leur nécessité » [7]. Par un processus d’incorporation, la loi devient pour les prisonniers l’essence de ce qui constitue leur soi, leur vérité et la loi de leur désir. Le paradoxe vient du fait que « la loi est à la fois tout à fait apparente et tout à fait cachée, car elle ne semble jamais extérieure aux corps qu’elle assujettit et subjective. Foucault écrit : “Il ne faudrait pas dire que l’âme est une illusion, ou un effet idéologique. Mais bien qu’elle existe, qu’elle a une réalité, qu’elle est produite en permanence autour, à la surface, à l’intérieur du corps par le fonctionnement d’un pouvoir qui s’exerce sur ceux qu’on punit” » [8]. Si “l’âme”, ou ce qu’on désigne globalement sous le terme de “vérité intérieure”, n’est rien d’autre qu’une signification de surface qui met en cause la distinction entre intérieur et extérieur en figurant l’espace psychique sur le corps comme une inscription sociale qui voudrait gommer les traces de sa production, pourquoi, demande Butler, ne pas appliquer cette analyse à la notion même de “genre” comme vérité essentielle du sexe et point archimédique de l’identité ? « Le fait de re-décrire les processus intra-psychiques, écrit-elle, comme une politique de la surface du corps implique de re-décrire le genre comme la production disciplinaire de figures fantasmatiques par le jeu de la présence et de l’absence sur la surface du corps, la construction du corps genré à travers une série d’exclusions et de dénis, d’absences signifiantes » [9]. L’idée centrale est que le genre résulte de la réitération d’actes, de gestes, et de certains effets de « stylisation corporelle », dans un régime disciplinaire de production des comportements qui suggère, en stabilisant tel ou tel type de marquage à la surface même des corps, quelque chose comme une substance intérieure invisible, mais censée fonctionner comme un principe organisateur de l’identité.
Un tel processus est pensé sous l’horizon de sa performativité. S’inspirant de la définition linguistique du performatif - ou de l’acte de langage - au sens d’une énonciation qui effectue quelque chose en constituant simultanément l’acte qu’elle exprime, et qui est susceptible de réussite ou d’échec (“Je le promets”, “Je le jure”, etc…), J. Butler étend cette catégorie, d’abord réduite à une classe spécifique d’énoncés, à l’ensemble des énoncés de la langue. Élargi au fonctionnement intrinsèque du langage, le performatif est ensuite pensé dans un cadre liant les actes de langage avec les actions matérielles : J. Butler se demande dans quelle mesure la performativité du discours peut engager les opérations physiques sur un mode qui ne soit ni référentiel ni sémantique, et au-delà de l’ordre binaire des valeurs de vérité. Enfin, elle extrait de la structure même du performatif ce qui se rattache à l’idée de transformation, et suggère qu’une telle modification est susceptible d’inaugurer de nouvelles configurations de la réalité. Il va de soi qu’un tel geste jette le trouble sur ce qu’on entend précisément par “réalité”, et sur la conception de la réalité du corps qui en découle. Ce qui est en jeu ici, c’est le rapport entre les régimes discursifs de pouvoir et le corps en tant que surface indéfinie de réitérations de certains “effets”. L’ordre politique véhiculé par le langage et les pratiques disciplinaires - telles que, par exemple, le dispositif de savoir-pouvoir qui oriente la pratique chirurgicale - régule le corps de manière performative en lui faisant accomplir ce qui est énoncé à travers une série d’actes et de gestes répétés qui dessinent en creux et après-coup la figure d’une indicible intériorité dans laquelle la vérité du genre trouverait naturellement sa place. C’est dans la déconstruction de cette illusion rétrospective que réside l’intérêt de recourir au modèle élargi du performatif et aux caractéristiques qui lui sont associées, au premier rang desquelles on peut compter la garantie de son “échec” intrinsèque : l’acte de langage, montre Butler, échoue toujours à accomplir totalement ce qu’il est censé désigner sur le mode d’une référence positive ; son efficacité va de pair avec la production d’un “reste” inassimilable, recueilli dans le corps, et qui ouvre la voie à de possibles modifications. Dès lors, dire que le genre nous est assigné par un réseau d’événements contingents (mais répétables) qui conduisent à imposer des effets signifiants, appelle deux conséquences : le “genre” en tant que tel peut être qualifié de performatif, mais sa performativité, dans son principe même, est vouée à l’échec, et pourrait donner lieu à des stratégies subversives de recodification dont le corps, en tant que surface malléable et politiquement perméable, serait le vecteur privilégié.
C’est ouvrir la voie à une théorie du genre comme « imitation sans original », qui repose en grande partie sur l’efficacité avec laquelle la performance artistique de la drag queen, comme transformation du corps qui représente les normes hétérosexuelles dans un contexte “gay”, permet à J. Butler de dévoiler le caractère imitatif du genre. Le drag subvertit la distinction entre l’intériorité psychique et l’extérieur physique ainsi que le modèle selon lequel il y aurait une expression naturelle du genre, qui correspondrait à une “vraie” identité, car il « déstabilise […] les significations de genre dans le discours du vrai et du faux » [10], retrouvant par là la force spécifique du performatif. L’exemple de la drag produit des effets de brouillage dans les couples conceptuels qu’il met en jeu : apparence/essence, masculin/féminin. C’est qu’il y a dans ces pratiques un espace ouvert entre le sexe défini comme masculin et la performance de la féminité. Parce que la drag queen occupe cet espace paradoxal qui se situe entre le sexe anatomique et le genre joué, elle fait apparaître l’imitation, la re-citation des codes de signification du genre comme des mécanismes de production de la vérité du sexe : « En imitant le genre, dit J. Butler, la drag queen révèle implicitement la structure imitative du genre lui-même - ainsi que sa contingence » [11]. Pour J. Butler, la performance drag queen est subversive parce qu’elle dénaturalise et dépsychologise le lien normatif entre “sexe” et “genre”, en laissant apparaître les mécanisme culturels qui produisent la cohérence de l’identité hétérosexuelle. Quand elle définit le genre comme performatif, elle implique qu’il n’a pas de statut ontologique en dehors des différentes répétitions, pour ainsi dire “théâtrales”, qui constituent sa réalité. Ainsi, la performance de la drag queen permet à J. Butler de conclure que « l’identité originale à partir de laquelle le genre se construit est une imitation sans original » [12], dans laquelle les positions de genre (masculine et féminine) qu’on croit naturelles sont le résultat de performances soumises à des régulations, des itérations et des sanctions constantes. Or cette répétition requiert précisément l’impossibilité pour l’acte performatif d’épuiser la signification que le corps est censé accomplir ; les injonctions conventionnelles de genre, par leur conventionnalité même, sont voués à se répéter pour “styliser” d’une manière particulière le corps individuel en donnant l’illusion d’une identité interne, mais sans jamais produire ce corps comme un référent intégral, au sens de ce qui incarnerait exactement ce qui est énoncé (“c’est un garçon”, “c’est une fille”). La série des productions performatives renverrait indéfiniment ses simulacres à une origine qui échappe, et le “corps” serait précisément la surface où se joue et se rejoue cet échec constitutif. Tout l’intérêt est que la possibilité de l’échec équivaut dans son mouvement même à une possibilité de modification qui pourrait déjouer la stratégie visant à maintenir le genre à l’intérieur de son cadre binaire. Ainsi, écrit J Butler, « [i]l convient précisément de chercher les possibilités de transformer le genre dans le rapport arbitraire entre de tels actes, dans l’échec possible de la répétition, toute déformation ou toute répétition parodique montrant combien l’effet fantasmatique de l’identité durable est une construction politiquement vulnérable » [13].
S’il fallait spécifier et approfondir une telle performativité corporelle, ce serait sans doute chez Orlan qu’on trouverait l’un des exemples les plus frappants. Connue comme l’initiatrice de “l’art charnel”, Orlan a réalisé une série d’opérations-performances dans lesquelles des interventions de chirurgie plastique sur son propre visage sont filmées et photographiées. Elle conçoit ces événements comme une façon d’inscrire le corps modifié sur la scène sociale et politique. De fait, ils conduisent à mettre en tension le champ sémantique de la performance : face à l’idéal d’excellence physique et de conformité de genre véhiculé par une idéologie spontanée du “corps performant”, idéologie productrice de restriction et d’exclusion, elle fait jouer la répétition performative pour dessiner de nouvelles possibilités de subjectivation, dans un court-circuit saisissant entre les énoncés politiques et le vécu charnel - ce qui pousse à leur limite radicale les perspectives proposées par J. Butler. Corps perforé, corps performé (c’est-à-dire mis en acte de façon performative), le corps d’Orlan, dans ses avatars mêmes, fait surgir une tache obscure au sein des représentations dominantes qui mordent à même la chair, un point d’exception interne à l’ordre positif des images du corps et à l’universalité idéologique qu’elles postulent. Ce faisant, elle interroge les ambiguïtés de la recherche contemporaine de perfection, et reformule les conditions mêmes d’intelligibilité du féminin et de l’humain.
En 1989, Orlan reçoit le livre La robe, de la psychanalyste lacanienne Eugénie Lemoine-Luccioni, qui lui consacre un chapitre entier ; frappée par le chapitre intitulé : « La seconde peau », Orlan y trouve ces lignes qu’elle réutilisera dans le contexte de ses performances, en en déjouant le sens restrictif : « La peau est décevante […]. Dans la vie on n’a que sa peau […]. Il y a maldonne dans les rapports humains parce que l’on n’est jamais ce que l’on a […]. J’ai une peau d’ange mais je suis un chacal […], une peau de crocodile mais je suis un toutou, une peau de noire mais je suis un blanc, une peau de femme, mais je suis un homme ; je n’ai jamais la peau de ce que je suis » [14]. A la lecture de ce texte, Orlan dit avoir aperçu que « la psychanalyse était l’alliée de la religion pour ce qui concerne l’impossibilité d’attaquer le corps, qu’il y avait à cet endroit un interdit où religion et psychanalyse s’accordaient très bien. Donc la psychanalyse commençait à m’irriter, parce qu’elle rejoignait des positions qui m’ennuyaient particulièrement » [15]. D’après Orlan, ce texte défend l’idée selon laquelle on ne peut pas toucher à son corps sans s’exposer à de graves dommages et à un risque de désintégration subjective. L’enjeu, pour elle, est alors de parvenir, « […] en prenant des précautions infinies (…) [à] mettre en place cette chose-là sans perdre [s]a sérénité, sans qu’il y ait de problème, en essayant de trouver les solutions pour qu’il y ait le moins de douleur possible » [16], et ce dans le droit fil de son « interrogation du statut du corps dans notre société et particulièrement du corps des femmes » [17]. Le processus embrasse donc dans un même mouvement les conditions de la vie psychique et celle de l’ordre socio-symbolique existant. S’intéressant aux nouvelles possibilités qu’offre la chirurgie esthétique, Orlan parvient à convaincre des praticiens d’intervenir sur son visage pour le réinventer, dans des performances chirurgicales conçues comme de véritables fêtes, mettant à l’honneur la chair et bannissant la douleur. En voulant modifier les lignes territoriales de la peau, toujours “décevante” car ne pouvant jamais enfermer ni configurer pleinement une essence “vraie”, Orlan affirme faire « a woman-to-woman transsexualism » [18] : cette expression paradoxale laisse d’abord entendre qu’il est possible de rectifier l’image externe de soi à partir d’une perception interne du corps (“je ne suis pas la femme que je suis” ; “j‘ai un autre visage”), mais surtout que le fossé entre ces deux images ne saurait se laisser totalement combler, qu’on n’a jamais vraiment le corps de son sexe, et par conséquent qu’il n’y a pas d’identité féminine donnée ou normative, mais une indétermination fondamentale qui ouvre une chaîne potentiellement indéfinie de transformations, dont la chirurgie est ici le vecteur performatif en subvertissant la distinction entre intérieur et extérieur, semblant et original, etc…. Elle dit ainsi : « Mon travail n’est pas dirigé contre la chirurgie esthétique, mais contre les standards de la beauté, contre les diktats de l’idéologie dominante qui s’impriment toujours davantage sur la chair féminine … et masculine » [19].
Là où il y a performance, au sens artistique, c’est précisément dans l’implication directe du corps comme objet et agent de l’œuvre ; dans un interview avec Hans Ulrich Obrist, Orlan affirme la chose suivante : « La matière de travail, la surface d’inscription que j’avais sous la main était le corps qu’il fallait que je me réapproprie parce que j’en étais en quelque sorte dépossédée par l’idéologie dominante qui m’empêchait de vivre ma vie de femme et ma vie d’artiste comme j’avais envie de vivre. J’ai pensé que travailler directement avec la représentation de mon corps, y compris la représentation publique de mon corps, était beaucoup plus intéressant, plus problématique et plus efficace politiquement, surtout à cette époque, plutôt que de me dissimuler derrière la toile et la peinture » [20]. Le recours à la chirurgie est ambigu : en se rebellant contre le contexte socio-symbolique enveloppé par les « pratiques disciplinaires » - pour reprendre le vocabulaire foucaldien - de la religion et la psychanalyse, Orlan réagit précisément contre un tabou - celui portant sur l’intégrité du corps - que lève précisément la chirurgie esthétique en promettant de dépasser les limites du corps propre…Mais la chirurgie est épinglée là où elle reconduit un idéal de complétude et une normativité implicite qui amputent la transformation corporelle de son plein pouvoir de signification. Un autre problème, connexe, tient à la façon dont certains critiques voient dans le travail d’Orlan l’expression d’une toute puissance narcissique liée au déni de toute différence organisatrice. Dans son article : « Body-art. Etre soi-même sa propre œuvre d’art », la psychanalyste Erica Francese dit à propos d’Orlan que « le créateur, cherchant à devenir cet objet idéal placé au-dessus du manque et de la castration, tend à incarner le déni » [21] ; « Expression du narcisissime qui cherche à dépasser les limite imposées par la chair à la toute puissance du psychisme, le body-art proclame la création d’un être supérieur situé au-delà de la différence des sexes et des générations » [22]. Or le culte du narcissisme est précisément l’un des traits, portés par le dispositif chirurgical, dont Orlan tente de déjouer les présupposés en faisant surgir leurs contradictions et leur envers.
De ce remodelage antinaturaliste du corps, Séduction contre séduction (1992-1993), puis Omniprésence I (1992) et 2 (1993) proposent la restitution photographique ; la performance se reflète et se continue dans l’image. La première œuvre, explique Dominique Baqué, « dialectise visuellement deux cibachromes encadrés présentant la même image en miroir : clichés pris lors de différentes opérations-performances, retravaillés en vidéo au moyen d’effets spéciaux, photographiés sur écran et délivrant, en plans très rapprochés, des fragments du visage d’Orlan livré au bistouri » [23]. De toute évidence, la structure en miroir fait signe vers la logique du même et de l’autre : elle déjoue la logique de l’identité en diffractant l’image corporelle du moi en une gamme de différences qui demeurent pourtant dans une relation de voisinage ; ce n’est jamais le même visage, et pourtant il n’y a là rien de radicalement nouveau, rien non plus qui permette d’isoler une actualisation de ce visage comme étant plus originale/originelle que les autres. Se déploie une zone d’indiscernabilité sans référent privilégié, sous-tendue par la répétition du motif de la croix, qui fait écho au travail effectué pendant vingt ans par l’artiste sur l’iconographie religieuse, et à la souffrance de la crucifixion divine. Les deux cibachromes sont par ailleurs séparés, mais aussi reliés, par une image de plus petit format : entre-deux qui figure Orlan dans une position glamour et faussement provocante, parodiant sur un mode sarcastique les codes imposés de l’apparence et de la séduction féminine. Il s’agit ici d’opposer la féminité désirable au corps abject en créant des déplacements incessants entre ces pôles.
Exposé sous la forme d’une immense fresque photographique, Omniprésence 1 et 2 opèrent une dialectique entre le haut et le bas. On peut voir que « [s]ur chaque plaque de la partie inférieure, Orlan fait retour aux modèles féminins promus par la peinture occidentale (dont la Vénus de Botticeli, figure archétypale de la beauté) en hybridant, selon le procédé du morphing, son propre visage et les icônes picturales ». En proposant des « autoportraits faits par la machine-computer » [24], Orlan déforme les contours de son visage suivant une logique de connexions hétérogènes, ouvrant des lignes de fuite qui défigurent/reconfigurent le corps féminin - le corps du “féminin”. S’il y a performativité, c’est bien dans la prolifération de semblants qui ne se caractérisent pas tant par leur référent que par l’acte qui les fait surgir comme autant de traces d’une vérité absente ; ce qui revient à brouiller sans cesse l’idéal d’excellence physique porté par l’image. D’autre part, « [s]ur chaque plaque de la partie supérieure, depuis la date inaugurale de l’opération jusqu’au portrait officiel qui clôt la série, le regardeur assiste à la lente recomposition, à la progressive reconfiguration d’un visage tuméfié, bandé de pansements chirurgicaux, yeux rougis, peau bleuie, jaunie ou violacée » [25]. Tel est le “reste” obscène de la modification chirurgicale, ce qu’il ne faut jamais montrer, car le monde social ne saurait accepter la vision de la laideur ou de l’informe. Or ce sont précisément ces états refoulé du corps qu’Orlan choisit de faire accéder à la visibilité de la représentation. Dans toutes les photographies, le sourire d’Orlan, redessiné au scalpel, ouvre sur les indicibles secrets de la chair (peau décollée, glaires, sang), détournant sur un mode ironique les enjeux de la chirurgie esthétique, et la normalité dont elle est porteuse, notamment pour ce qui est de produire la chair masculine et féminine suivant des idéaux stéréotypés. Si le dispositif de la chirurgie modèle le corps, c’est au prix d’un excédent opaque, inaperçu comme tel ; l’idéal de “performance” comme accomplissement de la beauté se légitime et se consolide en recouvrant ce point aveugle. Tout l’intérêt des jeux imitatifs d’Orlan est de mettre à l’épreuve la forme transcendante de l’idéal en faisant jouer ce point qui le sous-tend.
Prolongeant ce travail sur sa propre chair, Orlan réalise la série des Self-Hybridations à l’aide des technologies numériques de traitement de l’image. Elle travaille par morphing sur son image et des portraits d’art ethnique, africains ou mexicains, voire asiatiques. Les visages y configurent une nouvelle fois, et provisoirement, un corps mutant, subvertissant les catégories du beau et du laid, du normal et du pathologique. Ce sont des visages en devenir, puisqu’Orlan, mettant en perspective les canons de la beauté occidentale avec ceux de cultures radicalement autres, mélange, au moyen d’une palette graphique extrêmement sophistiquée, son propre visage avec masques et statuaires dits “primitifs”. Ce travail suggère qu’il n’est rien de moins naturel qu’un corps dans la mesure où il est façonné par des paradigmes culturels, et se propose de questionner la norme en “hybridant” - au sens de croiser deux choses différentes ou de composer ensemble des éléments disparates - des actualisations de la figure humaine - et féminine - qui semblent à première vue tout à fait hétérogènes : en associant à son visage le nez postiche du roi Pascal, le strabisme “fabriqué” dès l’enfance par la mise en place d’une boule de terre ou de cire entre les deux yeux du nourrisson, la déformation concertée du crâne au moyen d’attelles de bois chez les garçons ou les filles, etc…Orlan fait travailler, pour reprendre ses termes, la « machine corps » avec la « machine ordinateur » pour unir des éléments hétéroclites. Si ces photographies ont parfois été interprétées naïvement par le public comme le résultat de ses interventions chirurgicales, Orlan reconnaît encourager elle-même la confusion entre les registres techniques : « J’ai toujours cherché à brouiller les cartes, à transformer le réel en virtuel et vice-versa » [26]. Elle associe aussi les matériaux les plus archaïques tels que le sang, le corps, le sperme, aux références à l’histoire de l’art et aux technologies de pointe. Elle l’explique comme une volonté de conjonction de l’hétérogène : « Dans mon œuvre, le « et » est récurrent : le passé et le présent ; le public et le privé ; le réputé beau et le réputé laid ; le naturel et l’artificiel ; les transmissions faites par satellite et les dessins faits avec mes doigts et mon sang pendant les opérations chirurgicales » [27]. Une question, dès lors, s’impose : quel sens y a-t-il à vouloir dépasser le donné corporel au nom de normes esthétiques en vue d’accomplir des prouesses de séduction, quand le donné se révèle être toujours déjà façonné et que les normes de perfection physique perdent leur légitimité au contact de l’étrange et du non-authentique ?
Là où les opérations-performances d’Orlan jettent le trouble, c’est qu’elles interrogent les ambiguïtés du corps moderne à la pointe extrême de sa (dé)réalisation. D’une façon qu’il ne semble pas impropre de qualifier de performative, les pratiques alternatives et altérantes de son propre visage ramènent le corps au processus même de sa transformation : il s’agit d’une réactivation continue de ses ressources de base, élaborée sous la forme de ré-incarnations multiples. Chez Orlan, l’image est acte, et la représentation entraîne immédiatement la chair, dans une sorte d’énonciation corporelle qui réactualise sans cesse ses présupposés. La production d’identités mouvantes ne procède pas d’un pouvoir absolu de création, qui pourrait ainsi faire table rase des conventions sexuées ou des genres, mais s’appuie précisément sur les valeurs esthétiques dominantes et les canons de la beauté féminine pour en déplacer continuellement les limites et faire proliférer de nouvelles configurations. Dans cette optique, le recours à la chirurgie esthétique est paradoxal et se noue précisément autour des équivoques du thème de la performance. Utiliser les possibilités de la chirurgie plastique revient bien à souscrire à l’idée selon laquelle le corps n’est pas une entité fixe, enfermée dans les limites d’une indépassable intégrité. Toutefois, le dispositif chirurgical véhicule des idéaux tacites qui subordonnent la réussite sexuelle et/ou sociale, le pouvoir de séduction, la vérité de l’identité, etc… à un ordre des sexes nouant à même la chair la légitimité du “genre” et la valeur de l’individu. Ce que promet la chirurgie plastique, c’est de produire un individu plus réussi, en passe d’accroître son potentiel d’action dans les sphères privée et publique, et d’améliorer les conditions de sa reconnaissance. Le prix à payer est le maintien et la reproduction de paramètres idéologiques dictant un idéal d’excellence physique que nous intériorisons dans les ramifications les plus intimes de nos vies - selon des modalités maintes fois décrites par Foucault ou Butler. Tout le paradoxe réside dans le fait que la transformation du corps est ressaisie sous l’horizon d’un idéal de complétude et de conformité. C’est ce processus que déjoue Orlan en détournant ses effets attendus ; usant du registre de la parodie, elle cite les canons de la beauté féminine pour rappeler leur ancrage culturel et les hybrider avec un “devenir-monstre” de son visage. Elle fait du corps une élaboration, une prothèse spatiale susceptible de déplacer les prémisses politiques de l’être humain. Elle met en scène l’échec des mécanismes itératifs du pouvoir à accomplir un corps idéalement genré, pris dans une perfection “hyperhumaine” ; toute incorporation suppose un point aveugle irréductible à une politique d’intégration, un surplus opaque qu’elle laisse poindre en exhibant le réel de la chair, dans sa dimension informe et obscène. Si le travail d’Orlan est si contemporain, c’est bien que la performance désigne chez elle un mode paradoxal de subjectivation : les processus d’altération et d’hybridation de l’identité féminine ouvrent une série indéfiniment ouverte de dissémination des traits corporels, qui passe par la dénaturalisation et une certaine dématérialisation de ce corps, en remettant sans cesse en jeu les présupposés et les déterminations qui fondent sa possibilité même, mais sans viser un quelconque dépassement ni une quelconque vérité.
● Baqué Dominique, Mauvais genre(s) - érotisme, pornographie, art contemporain, Paris, éd. du Regard, 2002
● Busca Joëlle, Les visages d’Orlan - Pour une relecture du post-humain, Bruxelles, éd. de La Lettre volée, 2002
● Butler Judith, Trouble dans le genre - Pour un féminisme de la subversion, titre original : Gender Trouble, Feminism and the Politics of Subversion [1990], trad. de l’anglais par Cynthia Kraus, préface de Eric Fassin, Paris, éd. La Découverte, 2005
● Butler Judith, Le pouvoir des mots - politique du performatif, titre original : Excitable speech - A politics of the performative, trad. de l’anglais par Charlotte Nordmann, éd. Amsterdam, 2004
● Foucault Michel, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, éd. Gallimard, 1975
● Francese Erica, « Body-art. Etre soi-même sa propre œuvre d’art », in La perversion dans l’art et la littérature, Alberto Eiguer (dir.), Paris, IN PRESS EDITIONS, coll. Explorations psychanalytiques, 2007, pp. 187-209
● Le Breton David, L’Adieu au corps, Paris, Métailié, 1999
● Orlan, « Initiation aux mystères d’Orlan », conversation avec Jacques Alain-Miller dans le magazine international lacanien, Le Nouvel Âne, Paris, éd. NAVARIN, n°8, février 2008, pp. 8-12
● Orlan, « Orlan conférence », De l’art charnel au baiser de l’artiste, Paris, Jean-Michel Place, 1997
● Orlan, « Intervention », 1995, repris en anglais dans The Ends of performance, trad. par Tanya Augsburg et Michel A. Moos, éd. Peggy Phelan and Jill Lane, New York : New York University Press, 1998, pp. 315-327
[1] B. Andrieu, « Prendre le parti de la chair », Chimères, n°65, été 2007, pp. 91-100
[2] Ibid., pp. 97-98
[3] J. Butler, Trouble dans le genre - Pour un féminisme de la subversion, titre original : Gender Trouble, Feminism and the Politics of Subversion [1990], trad. de l’anglais par Cynthia Kraus, préface de Eric Fassin, Paris, éditions La Découverte, 2005
[4] Ibid., p. 248
[5] Ibid.
[6] M. Foucault, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, éditions Gallimard, 1975
[7] J. Butler, « Inscriptions corporelles, subversions performatives », op. cit., p. 257
[8] M. Foucault, Surveiller et punir, p.34, cité par J. Butler, op.cit., p. 257
[9] J. Butler, op. cit., p. 258
[10] Ibid., p. 260
[11] Ibid., p. 261
[12] Ibid.
[13] Ibid.
[14] E. Lemoine-Luccioni, citée par Orlan dans « Orlan conférence », De l’art charnel au baiser de l’artiste, Paris, Jean-Michel Place, 1997, p. 37
[15] Orlan , « Initiation aux mystères d’Orlan », conversation avec Jacques Alain-Miller dans le magazine international lacanien, Le Nouvel Âne, Paris, éditions NAVARIN, n°8, février 2008, p. 11
[16] Ibid.
[17] Ibid.
[18] Orlan, « Intervention », 1995, repris en anglais dans The Ends of performance, trad. par Tanya Augsburg et Michel A. Moos, éd. Peggy Phelan and Jill Lane, New York : New York University Press, 1998, pp. 315-327
[19] Ibid., c’est nous qui traduisons
[20] Orlan, citée par Erica Francese dans « Body-art. Etre soi-même sa propre œuvre d’art », in La perversion dans l’art et la littérature, Alberto Eiguer (dir.), Paris, IN PRESS EDITIONS, coll. Explorations psychanalytiques, 2007, pp. 187-209
[21] E. Francese, art. cit., p. 208
[22] Ibid.
[23] D. Baqué, Mauvais genre(s) - érotisme, pornographie, art contemporain, Paris, éd. du Regard, 2002, p. 176
[24] Ibid., p. 177
[25] Ibid., p. 178
[26] Orlan, citée par E. Francese, art. cit., p. 207
[27] Ibid.
Brunet-Georget Jacques, « De la chirurgie esthétique à Orlan : Corps performant ou corps performé ? », dans revue ¿ Interrogations ?, N°7. Le corps performant, décembre 2008 [en ligne], https://revue-interrogations.org/De-la-chirurgie-esthetique-a-Orlan (Consulté le 21 novembre 2024).