Dans son ouvrage, L’Argumentation dans le discours (2012), Ruth Amossy rappelle l’importance de l’auditoire dans le discours argumentatif : « on parle toujours pour et en fonction de quelqu’un ». Cette assertion valide l’idée que toute communication est par essence destinée et vise à agir sur son public. À travers les théories relevant de l’analyse du discours, en l’occurrence celles de l’énonciation, nous tenterons de (dé)montrer dans les discours politiques gabonais qu’à côté d’un auditoire identifié se profile un destinataire indirect, qui a plus d’importance encore que ceux qui figurent dans l’adresse.
Mots-clés : discours politique, trope communicationnel, destinataire, surdestinataire, Gabon.
In its work, The Argumentation in the speech (2012), Ruth Amossy points out the importance of the audience in the argumentative speech : “one always speaks for and according to somebody”. This assertion validates the idea that any communication is essentially intended and aims to act on its public. Thanks to the French discourse analysis theory, especially that of énonciation, we will try to show how Gabonese political discourse has, besides an identified audience, an indirect recipient which is yet more important than the one appearing in the address.
Keywords : political discourse, trope communication, recipient, super recipient, Gabon.
Il est désormais commun d’admettre qu’il n’y a de discours que pour autrui, ce qui fait dire notamment à Ruth Amossy (2012 : 50) qu’« on parle toujours pour et en fonction de quelqu’un ». La construction de l’allocutaire est ainsi constitutive de tout discours. L’efficacité discursive exige dès lors que l’énonciateur s’adapte à son public, attestant de l’importance décisive du pôle de réception. Dans cette perspective, nous nous proposons, dans cet article, d’analyser les productions discursives de la sphère politique gabonaise, nous interrogeant sur le public de ces discours, avec pour hypothèse qu’au-delà d’un public identifié se pose l’existence d’un « destinataire second ou indirect » (Charaudeau, Maingueneau, 2002 : 168). Cette préoccupation trouve sens d’autant plus que les discours politiques gabonais, désormais DPG, sont marqués par la forte prégnance d’un tiers (Ndoba Makaya, 2013) alors qu’il apparaît que celui-ci est – le plus souvent – absent de la scène d’allocution. En effet, le véritable « quelqu’un » – dont parle Ruth Amossy supra– auxquelles DPG s’adressent, est-il celui que l’on pense être a priori , sachant que tous les destinataires ne sont pas toujours visibles, le discours pouvant s’adresser à un tiers virtuel ou absent ? Autrement dit, à qui s’adressent in fine les énonciateurs des DPG ? Le corpus de référence est constitué de discours [1] (majoritairement écrits) de ministres, députés, sénateurs et autres personnalités politiques. En clair, il s’agit de discours produits par des hommes et des femmes politiques (Le Bart, 1998), au sens où (en ce qui nous concerne) ils appartiennent à « l’instance politique » [2] et à son « double antagoniste » [3] (Charaudeau, 2005). La période concernée va de 1990, année qui correspond à l’avènement de la démocratie [4] – après le sommet franco-africain de la Baule [5] et la grève des étudiants de l’UOB [6] à la même époque –, jusqu’à la disparition du président Omar Bongo en 2009, après qu’il a passé plus de quarante ans au pouvoir. Ce travail s’inscrit dans le champ de l’analyse du discours, discipline « carrefour » (Maingueneau, 2009) dont l’objet, pour Dominique Maingueneau :
« […] n’est donc ni les fonctionnements textuels, ni la situation de communication, mais ce qui les noue à travers un dispositif d’énonciation qui relève à la fois du verbal et de l’institutionnel. […] Qu’on entre dans le discours par le biais de son inscription sociale ou par celui des fonctionnements linguistiques, on est de toute façon amené à retrouver l’autre versant. » (Maingueneau, 2014 : 43-44)
L’étude donc des DPG en relation avec la société dont ils sont issus, se fera à travers différents concepts émanant de l’énonciation, de disciplines telles que la rhétorique, l’analyse des conversations, etc., l’analyse du discours étant le lieu où s’interpénètrent diverses disciplines. Pour tenter de répondre à la question qui focalise notre analyse, notre argumentaire se fera en deux principales parties. La première servira à poser un cadre conceptuel traitant les notions de tiers, de trope communicationnel et de surdestinataire, cependant que la deuxième, aidée de ces outils théoriques, examinera les DPG en essayant de démontrer comment ces derniers instancient ce tiers que nous soupçonnons également avoir un rôle prépondérant. Ce rôle éminent que tente d’expliciter l’analyse qui va suivre permettra de concevoir, par la suite, le tiers en question comme étant un « surdestinataire » (Bakhtine, 1984), dès lors qu’il surplombe le destinataire immédiat. Nous noterons, de surcroît, que ce surdestinataire, dans les DPG, s’articule à une autre notion : celle d’ « hyperénonciateur » [7] (Maingueneau, 2004). La notion de ‘public’ se rapportant à l’instance de réception, nous faisons le choix de ne pas traiter ici la question relative à l’hyperénonciateur, concept qui concerne davantage le pôle de production. Seuls quelques aspects, liés par exemple au discours d’autorité, seront évoqués afin d’illustrer la corrélation entre surdestinataire et hyperénonciateur dans les DPG. Avant d’en venir à l’objet de notre étude proprement dit, il nous apparaît essentiel d’opérer un choix terminologique tant le terme ‘public’ ne nous parait pas suffisamment adéquat, car trop flou à notre sens, pour rendre compte de la situation que nous nous proposons de décrire.
Cette partie se propose d’aborder les notions de tiers (ou troisième), trope communicationnel et surdestinataire. Auparavant, comme mentionné plus haut, nous avons souhaité discuter de la pertinence de la notion de public. Cette dernière reste en effet attachée à l’instance de réception d’un acte de communication. Chaïm Perelman et Lucie Olbrechts-Tyteca (1970 : 25) affirment qu’il s’agit de « l’ensemble de ceux sur lesquels l’orateur veut influer par son argumentation ». Il est à préciser toutefois que pour les spécialistes de l’argumentation le terme rhétorique le plus retenu pour caractériser l’instance de réception est celui d’auditoire. En plus des vocables ‘public’ et ‘auditoire’, il y a celui d’‘allocutaire’, terme employé, tout comme celui de ‘destinataire’, « pour désigner le sujet auquel s’adresse le locuteur, à l’écrit comme à l’oral » (Maingueneau, 2009 : 17). D’une part, le destinataire désigne le récepteur externe à l’acte d’énonciation du sujet parlant (cas du lecteur d’un roman), et d’autre part, il réfère à une entité perçue comme un ‘sujet idéal’, interne à l’acte d’énonciation. Catherine Kerbrat-Orecchioni, quant à elle, apporte la précision suivante :
« Le destinataire proprement dit, ou allocutaire (qui peut être singulier ou pluriel, nominal ou anonyme, réel ou fictif), se définit par le fait qu’il est explicitement considéré par l’émetteur L (l’emploi du pronom de seconde personne et/ou la direction du regard en témoignent) comme son partenaire dans la relation d’allocution, et que partant les opérations d’encodage sont partiellement déterminées par l’image que L s’en construit . » (Kerbrat-Orecchioni, 2002 : 26).
La complexité du terme destinataire vient de ce qu’il procède de l’adressé explicite, révélé par un certain nombre d’indicateurs intrinsèques à l’énoncé, tu, vous, ou extérieurs (regard, gestes…) de même qu’il peut désigner des destinataires qualifiés d’indirects, n’étant pas concernés explicitement par le discours bien que pouvant être ‘témoins’ de celui-ci. Le destinataire peut alors être l’instance à qui on s’adresse de manière explicite comme de manière implicite. Pour les interactionnistes à l’instar de Erving Goffman (1987), l’allocutaire (ou destinataire) n’est pas automatiquement celui ou celle qui est indiqué(e) en tant que tel dans le discours. La nécessité de distinguer les « participants » à l’acte de communication s’impose dans la mesure où il est essentiel de dissocier les « destinataires directs » ou « allocutaires », encore appelés « participants ratifiés », tel que l’entend Erving Goffman (1987), – en ce sens qu’ils sont désignés dans l’adresse – des « destinataires indirects », non désignés par l’énonciateur, qui pourtant peuvent être prévus – ou non – par celui-ci. Par conséquent, ces indications ne nous permettent pas d’employer indifféremment les termes ‘destinataire’, ‘allocutaire’, ‘auditoire’ et ‘public’. Ruth Amossy (2012 : 51) reconnaît d’ailleurs à cet effet le terme ‘public’ comme étant « plus général », à la différence des vocables tels que ‘destinataire’ et ‘allocutaire’, qui relèvent davantage de termes spécifiques à la linguistique. Il ressort en outre que le mot ‘public’, du fait de son caractère général et uniforme, ne rend pas compte de manière précise des spécificités de l’instance de réception pour ce qui est, notamment, de désigner le principal destinataire en cas d’adresse collective. Par ailleurs, le terme ‘public’ reste assez globalisant pour dépeindre une situation de trope communicationnel qui est une adresse feinte – nous y reviendrons –, laquelle situation s’actualise dans les DPG. Dans cette perspective, il nous est difficile de réunir, sous l’appellation ‘public’, les destinataires directs qui figurent dans l’adresse autant que les destinataires indirects (qui n’y figurent pas). On observera, pour finir, que les dictionnaires dirigés respectivement par Catherine Détrie, Paul Siblot et Bernard Verine (2001) ainsi que par Patrick Charaudeau et Dominique Maingueneau (2002) ne consacrent aucune occurrence faisant explicitement référence au ‘public’. Fort de ce qui précède, on ne s’étonnera pas que le vocable ‘public’ soit délaissé au profit d’autres. C’est pourquoi lui seront préférés les termes ‘auditoire’ et (surtout) ‘destinataire’ (qu’ils soient directs ou indirects) pour parler de ceux à qui s’adresse – explicitement ou implicitement – l’énonciateur, tandis que le terme ‘allocutaire’ sera employé pour indiquer exclusivement ceux qui sont clairement désignés dans l’adresse. Ce choix terminologique trouve son sens notamment à travers la notion de trope communicationnel, étant donné qu’elle remet en cause le principe d’une communication humaine qui serait principalement dyadique. En d’autres termes, toute communication se déroule toujours en présence d’un tiers. À ce propos, on se souviendra que l’une des critiques du schéma de la communication de Roman Jakobson (1963) par Catherine Kerbrat-Orecchioni (2002) porte sur des situations d’allocutions singulières. Il est ainsi reproché à ce dernier de ne tenir compte que de la communication entre deux individus, ne faisant pas mention de nombreux cas qui, loin de se limiter à un ‘tête-à-tête’, intègrent plusieurs émetteurs ou récepteurs. La communication théâtrale en est une illustration. En effet, si les différents personnages s’adressent à d’autres acteurs de la pièce avec lesquels ils interagissent, il n’en demeure pas moins que ces derniers orientent également leurs discours, à un autre niveau, au public-destinataire. Dans le même ordre d’idées, Patrick Charaudeau (2004) se réfère à une émission de télévision, Apostrophes [8], en vue d’accréditer l’existence d’un tiers. Aussi dit-il à ce sujet :
« On peut donc faire l’hypothèse que tout locuteur de cette situation sait qu’il est vu et écouté par ce tiers, et que même l’enjeu de l’échange est davantage tourné vers celui-ci que vers son interlocuteur, ou vers celui-ci via son interlocuteur. […] Tout contrat de communication se structure autour d’un ’dispositif communicationnel’ qui détermine par avance l’identité des partenaires, du point de vue de leurs statuts sociaux et des rôles locutifs qu’ils doivent exercer […] le dispositif se caractérise, de façon explicite, par un rapport de triangularité entre trois types de partenaires. » (Charaudeau, 2004 : 20-22)
Cet exemple de débats (télévisés ou radiophoniques) est assez intéressant lorsqu’il s’agit de personnalités politiques. Si l’on prend comme modèle des pays ayant une longue tradition démocratique, les différents débateurs – il en est ainsi de l’élection présidentielle – s’adressent l’un à l’autre mais il est évident que les véritables destinataires, ceux/celles qu’ils tentent de convaincre, sont les futurs électeurs dans le but de conquérir (ou conserver) le pouvoir. Pour ce qui est de l’un des dispositifs [9] dont parle Patrick Charaudeau (celui dit de « scène »), notre curiosité vient de ce que deux des trois partenaires sont physiquement présents, ce qui n’est pas toujours le cas du troisième qui peut être « présent-absent ». Ce troisième est pour nous le il, attaché à un « effet d’exclusion » en tant qu’absent d’une relation interchangeable entre je et tu. Il est étonnant de relever que cette triangularité telle qu’elle fonctionne dans ces mêmes sociétés démocratiques, occidentales, dans le cas présent, n’est pas tout à fait semblable à celle qui s’illustre dans les DPG. Si François Hollande et Nicolas Sarkozy, lors du débat du second tour des présidentielles de 2012, s’adressent directement l’un à l’autre de même qu’aux journalistes avec lesquels ils interagissent, il ne fait aucun doute que les électeurs constituent ce « tiers » dont ils recherchent l’adhésion. La désormais célèbre anaphore de François Hollande, « Moi, président… », est une critique formulée à l’égard du président - candidat Sarkozy, en même temps qu’il s’agit d’un message adressé aux Français, message selon lequel il sera l’exact opposé de Sarkozy, c’est-à-dire un président « normal », une sorte de citoyen ‘lambda’ aux antipodes d’un Sarkozy tonitruant qualifié de « bling bling ».
S’agissant, précisément, des DPG, nous assistons à un déplacement de ces instances. Le rapport de triangularité, suscité, se modifie au point que le tiers est différent de celui auquel on s’attend (le peuple). Cela trouve sans doute un début d’explication dans le fait que le Gabon n’a pas une longue tradition du suffrage universel, l’ensemble des pouvoirs ayant longtemps été aux mains d’un seul homme. Pour commencer nos investigations, voyons donc l’extrait suivant :
(1) « Monsieur le Premier Ministre ;
Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement ;
Excellences Mesdames, Messieurs les Chefs de missions diplomatiques et Représentants des Organisations Internationales ;
Mesdames et Messieurs les membres des Organisations de la Société Civile ;
Distingués invités ;
Mesdames et Messieurs.
La rencontre qui va, deux jours durant, cristalliser notre réflexion, participe de l’engagement et de la détermination de Son Excellence El Hadj Omar BONGO ONDIMBA, Président de la République, Chef de l’État, à mettre en œuvre dans notre pays, de véritables stratégies sectorielles […].
Pour terminer, je voudrais dire, Mesdames et Messieurs les séminaristes que le Chef de l’État, Son Excellence El Hadj Omar BONGO ONDIMBA appelle à un changement de mentalité dans notre société. Il va de soi que cette invite éclairera vos contributions pour que, de vos conclusions germent les prémices d’une nouvelle ère, celle de la Bonne Gouvernance. » [10]
Il est question là d’un fragment du discours d’ouverture du ministre Martin Mabala, au cours de travaux organisés par son ministère, ayant pour objet la mise en place de stratégies visant à réduire la pauvreté. Il y a dans cet extrait un énonciateur, je, d’une part, et ses allocutaires, vous, désignés par ailleurs par les termes d’adresse, (lesquels ont une valeur déictique visant à indiquer les allocutaires) employés en ouverture (et parfois en clôture) du discours, d’autre part. Dans cette configuration, on décèle la présence d’un il, absent de la scène d’énonciation. Il s’agit, dans le cas d’espèce, du chef de l’État, Omar Bongo. Les appellatifs [11] référant à ce dernier mentionnent le président gabonais en qualité de délocuté : celui dont il est parlé, extérieur à la relation d’allocution qui comprend le ministre et ses allocutaires respectifs désignés supra. Martin Mabala prend soin d’indiquer que cette réunion est la résultante d’une volonté politique, celle du président Omar Bongo qui entend insister davantage sur la bonne gouvernance, indispensable au développement auquel aspirent de plus en plus les populations. Cette situation de délocuté (qui est récurrente) suscite notre intérêt d’autant plus qu’il arrive, comme le précise Catherine Kerbrat-Orecchioni :
« que celui/celle que les marqueurs verbaux désignent clairement comme étant le/la destinataire principal(e) soit traité(e) linguistiquement à la troisième personne » (Kerbrat-Orecchioni, 2010 : 13).
Soit le cas suivant :
(2) « Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement ; Mesdames et Messieurs les responsables des partis de la Majorité ; Distingués invités ; Chers compatriotes congressistes ; Mesdames et Messieurs […]. Les dernières élections en date nous ont certes laissé un goût amer au regard des événements de Mouila, mais elles ont apporté un éclairage nouveau quant à la sagesse du Président OMAR BONGO ONDIMBA dont la décision d’élever le Président du PSD [12] et notre député, respectivement à la dignité de Grand Officier de l’Étoile Équatoriale et de Grand Officier du Mérite Gabonais avait été accueillie avec enthousiasme par les militantes et militants de notre parti. Cette marque d’estime de la part du Chef de l’État et cette grande sagesse chez cet homme de dialogue et de paix ont décidé les responsables du PSD à signer la Charte de la Majorité Présidentielle en vue d’asseoir le Développement de notre pays. » [13]
À l’image du ministre Martin Mabala précédemment, on note que Pierre Claver Maganga Moussavou parle d’Omar Bongo en tant que délocuté distinct des allocutaires mentionnés dans l’adresse. Dans son allocution devant les membres de son parti réunis en congrès, il trouve ainsi le moyen de parler d’Omar Bongo en usant de termes élogieux. Ce qui est somme toute surprenant vu que Pierre Claver Maganga Moussavou est un des opposants les plus emblématiques. Le congrès (d’un parti politique par exemple) est un moment solennel qui réunit les instances dirigeantes de cette organisation dans l’intention de réfléchir sur la vie du parti de manière générale ; ses règles, sa ligne, etc. Il est quelque peu étrange qu’à cette ‘messe’ consacrée au parti, qui plus est de l’opposition, son chef prenne la parole pour ‘encenser’ le président de la République en place, issu de la majorité du moment. Ainsi, les qualités du président gabonais sont citées comme modèles, laissant penser qu’il s’agit d’un tiers en position de médiateur, se situant au-dessus de la mêlée et se souciant du bien de tous, tout en œuvrant pour la démocratie. Pierre Claver Maganga Moussavou envoie un message à son auditoire pour justifier l’engagement de sa personne (et du parti) auprès du président Omar Bongo et donc de la majorité dite présidentielle. Il n’en demeure pas moins que ce message est aussi adressé à Omar Bongo, exprimant sa reconnaissance et son soutien, bien que faisant partie de l’opposition. Cette indirection induit un trope communicationnel. Ainsi que le fait remarquer Ruth Amossy :
« l’usage de la troisième personne pour désigner l’auditoire constitue un effet d’indirection, qui peut relever de ce que Catherine Kerbrat-Orecchioni appelle un “trope communicationnel” : on parle à quelqu’un en feignant de s’adresser à quelqu’un d’autre. » (Amossy, 2012 : 62).
Selon Catherine Kerbrat-Orecchioni (1990), il est justement question de trope communicationnel lorsque l’allocutaire désigné comme tel dans l’adresse se trouve au final être un destinataire secondaire, le statut de « véritable destinataire » revenant, à l’inverse, au destinataire indirect.
L’auteur de L’Énonciation (2002) fait observer que :
« L’émetteur peut se soucier en outre de la présence dans le circuit de la communication de ’destinataires indirects’ qui, sans être intégrés à la relation d’allocution proprement dite, fonctionnent comme ’témoins’ de l’échange verbal, et l’influencent parfois de façon décisive. » (Kerbrat-Orecchioni, 2002 : 27).
En nous aidant de cette lecture orecchionienne, nous observerons infra qu’une situation analogue se donne à lire dans le cadre des DPG. L’allocutaire « officiel, explicitement considéré » par l’énonciateur est le peuple de manière générale [14], c’est-à-dire ceux sur qui s’exercent les actes de pouvoir, tandis que l’allocutaire ou destinataire indirect est pour nous le chef gabonais. L’implication d’un allocutaire indirect ne remettant pas en cause l’adresse directe, le renversement se fait à un niveau tropique. Cependant, au-delà d’une personne stricto sensu le tiers ou le troisième (destinataire indirect), en vertu du rapport de triangularité qui sous-tend la communication, peut avoir un sens divers ainsi que le souligne Élisabeth Volckrick (2007 : 77) : « La question du tiers est complexe : elle a rapport avec le langage, le symbolique, l’Autre, la Référence, la Loi, le Père. Le concept de tiers implique une dimension de transcendance, d’extériorité. ». Le tiers est ici révélé comme une entité supérieure à qui on s’adresse, une représentation transcendante à laquelle on a recours. D’où la problématique du surdestinataire.
« L’auteur d’un énoncé, de façon plus ou moins consciente, présuppose un sur-destinataire supérieur (le troisième) dont la compréhension responsive absolument exacte est présupposée soit dans un lointain métaphysique, soit dans un temps historique éloigné […]. Aux époques variées, à la faveur d’une perception du monde variée, ce sur-destinataire […] prend une identité idéologique concrète variable (Dieu, la vérité absolue, le jugement de la conscience humaine impartiale, le peuple, le jugement de l’histoire, les sciences, etc.). […] Tout dialogue se déroule, dirait-on, en présence du troisième, invisible, doté d’une compréhension responsive, et qui se situe au-dessus de tous les participants du dialogue (les partenaires). » (Bakhtine, 1984 : 337).
La conception bakhtinienne du surdestinataire dévoile un rôle proche de celui d’arbitre. Au milieu de voix qui s’inscriraient dans un rapport dialogique parfois conflictuel, le surdestinataire en tant que tiers serait alors convoqué ou plus exactement sollicité, parce que « doté d’une compréhension responsive » et par conséquent suffisamment juste et irréprochable. On comprend que le surdestinataire est ce tiers hautement supérieur (dont parle Élisabeth Volckrick supra) en lieu et place du destinataire immédiat, faisant office de parfait juge. À côté de cette conception bakhtinienne du surdestinataire, il en existe une autre, en particulier, chez Sophie Moirand (1988). S’appuyant sur des discours scientifiques, cette dernière y voit beaucoup plus un représentant idéal du groupe auquel on appartient – ou souhaite appartenir – . Autrement dit, à un surdestinataire transcendant venu d’ailleurs, Sophie Moirand oppose un surdestinataire (plus proche) idéal. Au regard de ce qui précède, il semble qu’il n’y ait pas là matière à alimenter une querelle du fait que l’une et l’autre conception ne sont guère fondamentalement différentes, au point même que Dominique Maingueneau (2005) les juge « parfaitement compatibles ». Pour Nam-Seong Lee (2003) le surdestinataire est sollicité :
« pour soutenir son jugement. En deuxième lieu, la représentation du surdestinataire par le locuteur est différente selon l’évaluation du locuteur et l’époque donnée. Enfin, le statut du surdestinataire est supérieur à tous les sujets parlants, et donc à l’égard de la force du dire, il se trouve premier à l’inverse de son titre “tiers”. » (Lee, 2003 : 69).
Ces propos témoignent d’une triangularité du discours où le tiers-surdestinataire se situe effectivement au-dessus des participants. Qu’en est-il des DPG ?
Le discours de Pierre Claver Maganga Moussavou (2) que nous avons vu plus haut illustre ce rôle de médiateur, de troisième supérieur, en la personne d’Omar Bongo. Ce dernier apparaît telle une personne ‘juste’ au regard de sa « grande sagesse ». Nous pouvons également nous en apercevoir à partir de l’extrait ci-après :
(3) « Je m’interdis donc toute promesse démagogique. Car comme le dit, le Président de la république, Chef de l’État Son Excellence, EL HADJ OMAR BONGO ONDIMBA [15], Je cite :’’il ne s’agit pas de promettre l’impossible, mais de faire le possible, et même davantage, en fonction des moyens disponibles’’ fin de citation. » [16]
C’est dans le cadre d’un meeting de campagne aux élections législatives qu’a été prononcé ce discours. À ce moment, son auteur, Vincent de Paul Gondjout, est candidat pour le compte du parti au pouvoir dans un arrondissement de la capitale (Libreville). On peut dire que gagner des élections à Libreville [17] n’est pas toujours chose aisée pour le PDG, en raison de l’implantation des partis de l’opposition. Libreville, comme Port-Gentil (la capitale économique), a souvent été le lieu d’expression des différentes grognes sociales (parfois virulentes) qui ont marqué le pays depuis la baisse des recettes pétrolières et le retour du multipartisme en 1990. De plus, le caractère multiethnique de ces villes ne joue pas toujours en faveur de ceux et celles qui espèrent s’y faire élire. De nombreux candidats (parfois peu connus) s’appuient alors sur le président Omar Bongo dans l’espoir d’obtenir les suffrages des populations. Ainsi, l’aspect typographique que nous relevons (à la lecture du discours du candidat Vincent de Paul Gondjout) nous paraît être un trait du trope communicationnel. On relève clairement une particularité lorsqu’il est fait mention d’Omar Bongo (qu’il s’agisse de son nom propre ou de sa fonction). Écrire en lettres capitales peut être interprété comme une forme de politesse, signe de respect vis-à-vis du président gabonais et aussi de l’institution qu’il représente. Indépendamment de l’action consistant à marquer une certaine considération en cela qu’il s’agit d’évoquer un nom propre (OMAR BONGO), il ressort que les lettres capitales ont ici une valeur relationnelle – essentiellement verticale – au même titre que les honorifiques [18], tant les rapports sociaux en Afrique et particulièrement au Gabon sont fortement influencés par l’âge, le statut social, entre autres, des participants de la scène d’allocution. Quand ils ne sont pas en lettres capitales, les référents au président gabonais sont matérialisés en gras pour marquer une certaine insistance sur un élément manifestement important [19]. Le ton – valant aussi bien pour l’écrit que pour l’oral – est plus prononcé, plus grave, plus solennel, voire révérencieux. Il est question pour ces énonciateurs de retenir (plus que d’autres) le nom d’Omar Bongo, de le mettre en évidence et donc en valeur, d’attirer l’attention sur lui – comme sur eux-mêmes [20]– et d’établir (ou de maintenir) de la sorte une certaine hiérarchie. La stratégie du candidat Vincent de Paul Gondjout repose sur l’élaboration d’une image qui soit fonction du président Omar Bongo. Dans notre exemple, l’énonciateur citant fait appel à un discours rapporté pour soutenir ses dires. Discours rapporté dont l’énonciateur est Omar Bongo. Or, note Charaudeau, « dans le discours rapporté, celui dont on rapporte les propos est toujours en position de tiers » (2004 : 27-28). Aussi Vincent de Paul Gondjout s’efface-t-il [21] derrière un discours cité auquel il a recours. Cette mise en retrait s’observe, entre autres, au niveau du graphisme : les propos de l’énonciateur ne sont pas en gras, a contrario ceux d’Omar Bongo, qu’il cite, le sont. Cela revient pour l’énonciateur à conforter ses propres dires en citant les paroles d’une personne qui fait référence. L’emploi de l’adverbe « comme » concourt à établir une comparaison, mieux, une ressemblance entre Vincent de Paul Gondjout et Omar Bongo dans l’esprit des électeurs qui sont invités à associer l’un à l’autre. Le candidat Vincent de Paul Gondjout a alors pour astuce de se présenter aux yeux des citoyens comme un chantre de la vérité et de l’efficacité : celui qui fera plus que tenir ses engagements. Le verbe interdire vient confirmer que les promesses non tenues sont monnaie courante qui plus est en période électorale. L’argument consistant à ne promettre que ce qui peut l’être et de s’y tenir montre une démarcation de Vincent de Paul Gondjout – vis-à-vis de ses adversaires – qui entend respecter là une exigence d’Omar Bongo qui de facto est l’exemple à suivre. Il est « la Référence », au sens d’Élisabeth Volckrick supra. Cette parole sacralisée d’Omar Bongo résonne comme le signe d’une supériorité du chef à l’égard du candidat PDG. La figure du président gabonais est ainsi sollicitée comme garant en tant qu’autorité légitimante. Plus Omar Bongo est cité, plus le citant donne le sentiment d’être intimement lié au président gabonais, d’avoir à son tour un brin d’autorité et donc de crédibilité : il n’y a pas de raison que ce qu’ils (les énonciateurs des DPG) avancent ne soit pas fondé étant donné qu’Omar Bongo, lui-même, l’a dit. L’énonciateur citant se met alors en retrait face à un discours rapporté/d’autorité dont l’entière responsabilité est dévolue à l’énonciateur du discours cité. Le discours citant s’appuie en conséquence sur une figure importante. Le statut social, le pouvoir politique reconnu à Omar Bongo en font un hyperénonciateur [22]. Les énonciateurs des discours citant dans le cadre des DPG adoptent par là même une posture de sous-énonciateurs [23], légitimant, valorisant et exaltant Omar Bongo attendu qu’ils choisissent de s’exprimer avec et/ou sous les mots de celui-ci, rappelant que la communication est régie par des rapports d’influence (Bourdieu, 1982) et que ce principe « assigne au destinataire une certaine place d’infériorité ou de supériorité, de soumission ou d’adhésion » (Charaudeau, 2009 : 23). Cette modestie (ou semblant de modestie) énonciative est une stratégie argumentative qui consiste autant à mentionner les propos du président gabonais pour des questions rhétoriques qu’à être tout simplement bien vu par ce dernier : être en retrait, c’est-à-dire discret, pour attirer positivement l’attention du chef et ainsi mieux exister. Laurence Rosier (2008 : 42) décrit cette démarche comme étant « une posture de sous-énonciation dont le producteur peut espérer tirer des bénéfices ». Dans cette optique,nous citerons un extrait de l’interview accordée par Louis Gaston Mayila après sa démission du gouvernement. Cet entretien est l’occasion pour ce dernier de s’expliquer et de donner, à la presse et au peuple, les raisons de son départ :
(4) « Souvenez-vous, lorsque j’ai créé le PUP [24]. Je l’ai animé pendant quinze ans, et le slogan : ‟Mayila a dit Bongo doit gagnerˮ, c’est moi. Alors, mon père [25] et moi, nous nous sommes retrouvés et il a dit qu’il n’y avait pas de différence idéologique entre nous, Donc, je pouvais venir animer le PDG. Comme c’était le père, j’avais accepté sans rechigner. » [26]
Louis Gaston Mayila explique combien Omar Bongo est, en tant que père, un être transcendant. Plus que son père, il est celui de la nation (le père). Dans le même ordre, considérons l’exemple que voici :
(5) « À la très Haute Attention du Grand Camarade Président Fondateur, nous rappelons qu’en mai 2004, lors de l’historique rentrée politique de l’U.J.P.D.G, le Bureau National, la jeunesse militante et l’ensemble des jeunes présents à la Cité de la Démocratie avaient déjà de façon unanime appelé solennellement le Grand Camarade Président Fondateur, Son Excellence EL HADJ OMAR BONGO ONDIMBA à être leur candidat à la prochaine élection présidentielle. » [27]
Roger Ékomi Ndong organise un point de presse au cours duquel l’auditoire est invité à entendre une déclaration du bureau national du PDG, relative à la nomination d’un des leurs au gouvernement. L’examen de ce passage permet de constater que Roger Ékomi Ndong, au début de l’extrait, oriente explicitement son énoncé à l’endroit d’Omar Bongo, ceci, à la troisième personne de politesse : « À la très Haute Attention du Grand Camarade Président Fondateur ». Toutefois, les termes d’adresse, en ouverture du discours, ne font guère allusion au président gabonais comme on peut le constater :
(6) « Camarades Jeunes : militantes, militants et Sympathisants du Parti Démocratique Gabonais ; Mesdames et Monsieur les Journalistes ; Mesdames et Messieurs ».
Loin d’être, dans l’exemple (5), le délocuté, Omar Bongo est celui à qui s’adresse directement l’énonciateur. Roger Ékomi Ndong opère alors ce qu’il convient d’appeler un renversement hiérarchique par rapport au début de son discours, plaçant Omar Bongo comme principal destinataire. Ce qui motive le schéma (fig. 1) suivant :
Le commentaire que nous inspire le discours de Roger Ékomi Ndong, notamment, est que les énonciateurs des DPG s’adressent aux différents allocutaires qui procèdent de l’instance citoyenne et de l’instance médiatique. La flèche, qui symbolise les discours, part des énonciateurs des DPG en direction des instances suscitées. Toutefois, plutôt que de s’y arrêter (ou d’effectuer le sens inverse, l’énonciation étant une co-énonciation), ces discours remontent vers le tiers, destinataire indirect. On en conclut que les destinataires immédiats sont relégués à un rôle secondaire. Les destinataires ratifiés (directs) sont en réalité des destinataires prétextes, des ‘faire-valoir’ qui valident une théâtralisation dont la marque de fabrique est une somme de dithyrambes adressée rituellement et conjointement au chef de l’État, quel que soit l’objet du discours. Les DPG ne s’adressent ainsi que superficiellement à l’auditoire qui est dévoilé dans l’adresse, le destinataire réel étant le président Omar Bongo. Un autre exemple qui permet d’étayer cette hypothèse est celui relatif aux noms d’adresse associés à Omar Bongo. Autant les politiques gabonais ont un usage discursif qui a pour but de marquer leurs discours des dires du président gabonais – en témoigne l’exemple (3) –, autant il est question de citer celui-ci de façon presque ostentatoire, tel qu’observé dans l’exemple (1) : « Son Excellence El Hadj Omar BONGO ONDIMBA, Président de la République, Chef de l’État ». Ces noms d’adresse dont on ne démentira pas l’automaticité, renforcent l’idée d’une allocution à la troisième personne. Cette habitude, ce ‘maniérisme’, crée une sorte d’écho au président gabonais de sorte qu’il s’agit de l’interpeller, de s’adresser à lui. Cela n’est pas sans rappeler les louanges adressées aux empereurs à l’époque gréco-romaine. Par ailleurs, les énonciateurs des DPG veillent à remercier (systématiquement) le président gabonais et cherchent à signifier à ce dernier leur ‘attachement’. Un attachement inébranlable et une fidélité sans faille, au point d’apparaître comme une question vitale. Le ton laudatif très souvent employé relève du discours épidictique, démontrant que c’est à Omar Bongo que sont destinées ces paroles en tant que destinataire indirect. C’est à lui que s’adressent ces marques de déférence qui témoignent d’un dévouement sans limites. À travers leurs discours, les politiques gabonais valident en conséquence leur allégeance à l’égard d’Omar Bongo. Ainsi, la répétition des différents syntagmes nominaux permet aux énonciateurs (consciemment ou non) d’asséner subrepticement Omar Bongo – autant que son idéologie [28]– aux populations. L’information qui est donnée consiste à entériner l’idée que le président gabonais est un être exceptionnel. Se contenter de le dire pourrait ne pas être suffisant pour que cela soit entendu de façon impérissable. C’est alors que la nécessité d’étaler inlassablement le nom du chef, et l’ensemble de ses attributs, obéit à une démarche qu’on dirait psychologisante avec pour but d’inculquer aux populations la grandeur d’Omar Bongo de sorte que cela soit gravé dans du marbre. Une fois bien imprimés dans les mémoires des politiques autant que dans celles des populations, les termes d’adresse relevant du président gabonais créent un besoin d’être constamment renouvelés.
L’action visant à répéter revêt quelque peu un caractère mélodique au regard de l’abondance des titres : « Son Excellence », « Chef de l’État », « Président de la République », « Président Fondateur », « Grand Camarade », etc., lesquels font penser à une litanie. Ce procédé dénote de la fonction incantatoire de ces appellatifs, les énonciateurs des DPG invitant/implorant Omar Bongo en tant qu’être supérieur [29]. Le contexte historico-politique gabonais symbolisé par un Omar Bongo tout-puissant [30] influe sur le choix des termes d’adresse. Ceux-ci, en plus de leur valeur déictique, sont chargés sémantiquement. En accord avec Catherine Kerbrat-Orecchioni, nous partageons l’idée selon laquelle : « parmi les facteurs impliqués dans leur sélection il convient de mentionner les savoirs que le locuteur possède sur l’allocutaire. » (2010 : 23). Ce chapelet d’appellatifs caractéristiques du président gabonais est une invite qui a plusieurs objectifs : reconnaître et confirmer Omar Bongo en tant que chef ; rappeler et manifester leur appartenance à la communauté ; implorer le pardon, la bienveillance afin de trouver grâce et, s’assurer de l’adhésion du peuple, certains de le convaincre une fois Omar Bongo évoqué/invoqué. La sphère politique gabonaise ‘exige’, de cette manière, qu’il importe de bien savoir comment nommer et comment s’adresser à Omar Bongo, un peu comme s’il s’agissait de bien ‘savoir ses prières’. On voit bien que le président gabonais est un tiers, ce troisième participant autour duquel se construisent les DPG. Cependant, plus qu’un simple tiers, ce dernier ressort comme un être idéal ayant réponse à tout, capable de résoudre les problèmes les plus complexes. Omar Bongo est présenté comme un être extraordinaire, l’incarnation de la sagesse et de la paix. La référence à Omar Bongo, supposé détenir la vérité absolue, contribue à dissiper et à anticiper toute divergence. Le président gabonais occupe une ‘position transcendante’, raison pour laquelle il est placé, comme mentionné dans le schéma précédent, à un niveau supérieur, surplombant la relation énonciateur(s)-allocutaire(s). L’exemple ci-dessous en est une illustration :
(7) « Cette distinction qui honore le Gabon et les gabonais est à mettre à l’actif du Président de la République, Chef de l’État, qui avait donné en 2003 des instructions fermes au gouvernement de l’époque, pour qu’il soumette le dossier de la Lopé Okanda [31] au comité du patrimoine mondial, pour inscription aux fins de sa protection et de sa sauvegarde pour les générations futures […] les membres du comité du patrimoine mondial ont certes tenu compte des critères techniques d’appréciation des dossiers, mais surtout de la stabilité légendaire du Gabon, et le culte de la paix, incarné par Omar Bongo Ondimba, sans omettre son grand intérêt pour la culture et la biodiversité. » [32]
La ministre s’adresse à des personnalités politiques et publiques, au corps diplomatique, aux journalistes ainsi qu’à la population gabonaise, en l’occurrence, celle venue assister à la cérémonie consacrée à l’inscription du site de la Lopé Okanda au patrimoine mondial de l’Unesco [33]. Ils constituent à eux tous l’auditoire de la ministre. L’emploi de l’adverbe certes montre que la ministre concède une partie de ce succès aux critères techniques. Critères sur lesquels l’énonciateur se garde bien d’insister, restreignant et minimisant l’impact qu’ils auraient eu sur la décision finale ainsi que l’atteste la conjonction mais. Ce dernier vient, on ne peut plus clairement, relativiser la pertinence de ces aspects techniques, éléments non négligeables qu’exige pourtant pareille décision. Blandine Maroundou laisse penser de cette manière que cette inscription au patrimoine de l’humanité est davantage le fait du seul président gabonais, remerciant ipso facto ce dernier sans lequel cette cérémonie – et partant l’événement célébré – n’aurait pas eu lieu. L’argumentaire de Blandine Maroundou repose sur deux points essentiels. Le premier résulte de ce que le Gabon est un pays stable à la différence de nombre de ses voisins africains, notamment de la sous-région, cependant que le second est lui imputable, selon les mots mêmes de la ministre, au culte de la paix :
(8) « Le choix porté sur notre pays pour abriter la force devant sécuriser le processus électoral en République Démocratique du Congo tient, sans nul doute, à plusieurs facteurs. Le premier étant sans conteste la Paix et la Stabilité dont jouit le Gabon, grâce à la politique sage et clairvoyante du Président de la République, Son Excellence El Hadj Omar BONGO ONDIMBA. » [34]
Il ressort que stabilité et paix sont effectivement deux conditions étroitement liées ; en témoigne l’emploi de la conjonction et : « la stabilité légendaire du Gabon, et le culte de la paix ». Ces deux aspects sont mis au crédit du président gabonais qui, aux dires de la ministre, en est ‘l’incarnation’. Cette allégorie confirme le président Omar Bongo comme étant un être extraordinaire au sens bakhtinien. Ce statut supérieur à tous les participants à l’acte d’allocution fait d’Omar Bongo un surdestinataire tel que défini par Bakthine supra. Qui donc peut oser s’attaquer à la paix si ce n’est l’ennemi de la nation, animé d’intentions les plus obscures ? Omar Bongo a/est la réponse la plus parfaite qui soit. On se souviendra du slogan ayant marqué les élections présidentielles de 2005 : « Omar Bongo nza fé ? » [35], lancé par Jean Eyéghé Ndong, alors directeur de campagne du président-candidat Omar Bongo. En le peignant comme le garant, l’incarnation de la paix, le seul choix qui vaille, il est question pour les politiques gabonais de rechercher l’unanimité. Prenons exemple sur un autre discours qui, là aussi, vient ratifier l’argument d’un Omar Bongo transcendant :
(9) « le Premier ministre, Chef du gouvernement a tenu à exprimer, au nom du peuple gabonais, à celui du Gouvernement et au sien propre, sa profonde et déférente gratitude pour la part active et inestimable que le Président de la République, Chef de l’État a prise dans ce succès. Cet accord n’a été possible que grâce à son implication personnelle […] sans aucune intervention extérieure de quelque nature que ce soit. Le Premier ministre a tenu à saluer la présence effective au siège du fonds monétaire international du Président de la République où sa longue et fructueuse expérience des affaires de l’État de même que son auréole internationale ont permis de vaincre les dernières résistances […]. Ce résultat vient confirmer et rappeler le lien fort et quasi charnel que le Président de la République entretient avec le Gabon […]. Le Président de la République, qui avait eu la sagesse et la justesse, en sa qualité de bâtisseur, d’annoncer à l’élection présidentielle de 1998 que les années à venir seront difficiles, vient de démontrer à ceux qui en doutaient encore la preuve de sa capacité à gérer et à relever les défis […]. Le Président de la République a toujours prôné une politique de bon voisinage […]. C’est pour cette raison que le Chef de l’État n’a de cesse d’assurer les médiations pour alléger les fardeaux de la fatalité qui accablent certains États frères afin d’y restaurer la paix. ».
Le ministre René Ndémézo Obiang, dans son compte rendu du conseil des ministres, fait état de la visite du président Omar Bongo aux États-Unis d’Amérique. Visite qui s’est soldée par l’obtention auprès du Fonds Monétaire International (FMI) d’un crédit. Aussi le gouvernement se félicite-t-il de son obtention et tient-il à partager ce ‘succès’ avec l’ensemble de la population gabonaise, une façon de montrer que ceux qui ont la charge de les gouverner sont à la hauteur et obtiennent des résultats. Au-delà du gouvernement, c’est à Omar Bongo, insiste le porte-parole du gouvernement, que reviennent seuls tous les mérites. La locution prépositive « grâce à », qui a vocation à exprimer un rôle positif, vient démontrer que nul autre qu’Omar Bongo ne saurait revendiquer la signature de cet important accord : « sans aucune intervention extérieure de quelque nature que ce soit ». Cette précision supplémentaire ignore ou minore un élément non négligeable. En effet, la notion même d’accord inclut la présence d’au moins deux parties distinctes. Or, en indiquant que l’accord en question est imputable à Omar Bongo sans que celui-ci ait eu besoin d’une quelconque aide (interne ou externe) quelle qu’en soit la nature, cela revient à dire qu’Omar Bongo a été à même de conclure cet arrangement par sa seule volonté, ce qui en fait un être doté d’une compréhension responsive au pouvoir quasi divin. De ce point de vue, la négociation est perçue comme une formalité et la partie gabonaise, ainsi que le dit le ministre René Ndémézo Obiang, n’hésite pas à employer le verbe « vaincre » ; assimilant ces négociations à un combat contre l’organisme international et dont Omar Bongo est sorti vainqueur, véhiculant par là même l’image d’un sauveur. La lecture du texte permet de noter également qu’Omar Bongo, bien que président d’un jeune et petit État africain, jouit d’une notoriété dépassant les frontières du Gabon. Les propos hyperboliques tels qu’ « auréole », « inestimable », « légendaire », « magistralement »,etc., de même que le morphème « surtout » employé au discours (7) relèvent d’intensificateurs [36] qui ont pour objectif de magnifier Omar Bongo, et son action, y compris au-delà des simples frontières gabonaises :
(10) « Nous sollicitons l’ouverture d’un dialogue direct, avec le Père de la Nation, le chef de l’État ; Nous avons observé l’homme et sa politique depuis des années, il nous a convaincus qu’il était le seul capable dans notre pays qui met en pratique la devise Dialogue, Tolérance Paix, et il demeure que c’est encore lui, qui trouve des solutions durables et concertées à chaque situation qui survient dans notre pays et au-delà. » [37]
Nous sommes face à un extrait du discours de Théophile Mapangou, discours prononcé dans le cadre du lancement d’une association œuvrant pour le développement de la province de l’Ogooué Ivindo. Il a été découvert dans cette dernière un gisement de fer dont l’importance en ferait le chantier du Gabon du XXIe siècle. La question de son exploitation se pose d’autant plus que l’activité minière aurait un impact considérable sur l’environnement. Partisans et opposants à ce projet s’affrontent en attendant que la décision finale soit prise par le président gabonais. Théophile Mapangou tente de convaincre l’auditoire des retombées économiques du projet pour la province. Sa stratégie est essentiellement fondée sur la personne d’Omar Bongo, à qui revient l’ultime décision. Ce dernier est alors présenté comme un homme providentiel. Théophile Mapangou ne précise pas à quoi réfère précisément l’adverbe « au-delà », ne donnant – sans doute volontairement – aucune limite. Il laisse subodorer que l’action du président gabonais est quasi infinie, irradiant de sa personne le reste du monde [38]. Le président, perçu comme le « seul » à même de trouver une solution, est décrit tel un messie. Cela participe d’une figure christique qui a vocation à décharger des péchés aux fins de donner le repos.
Nous nous sommes attelé à démontrer dans cet article que les DPG s’adressent à un tiers autre que les allocutaires désignés. Ces discours sont continuellement traversés par la personne d’Omar Bongo dont on fait constamment l’éloge et dont on rapporte quasi automatiquement les dires. Cette prégnance révèle que le président gabonais est ainsi instancié comme étant le destinataire à la fois indirect et principal. Dans l’imaginaire collectif gabonais, Omar Bongo est celui qui peut faire et défaire les destins, le seul capable de résoudre les problèmes. Il est le recours suprême. Cette forte dépendance d’un pays tout entier à son chef, ce lien « quasi charnel » pour reprendre les propos mêmes du ministre René Ndémézo Obiang est un élément caractéristique de l’être gabonais. Tout observateur de l’histoire de ce pays d’Afrique centrale se rend compte en effet que le Gabon se confond à Omar Bongo qui, à la différence de certains États voisins (M’Bokolo, 2009), aura su préserver ce pays de conflits armés, instaurant une certaine stabilité au point que sa disparition récente « en prend presque un parfum de fin du monde au Gabon mais aussi en Afrique et en France, où il avait su tisser des liens solides » (Bernault, Tonda, 2009). Ainsi, Omar Bongo sert de « Référence » aux énonciateurs des DPG. Il est ce « Tiers », ce « grand Autre » (Charaudeau, Montes : 2004). Le président Omar Bongo est devenu au fil du temps un lieu partagé des Gabonais, celui sur qui se fondent ces derniers. Ceux-ci se reconnaissent à travers lui. Ils s’aiment (ou se haïssent) autour de sa personne.
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[1] Il s’agit de discours dont nous avons pu obtenir la trace écrite auprès de proches collaborateurs des auteurs concernés.
[2] Pour Patrick Charaudeau (2005), les relations de pouvoir qui régissent l’univers politique obéissent à un dispositif. Le dispositif est à entendre comme un « contexte » déterminé, un agencement organisé de ceux-là mêmes qui procèdent de la relation de pouvoir. Les instances auxquelles il est fait référence sont l’ « instance politique », l’« instance adversaire », l’« instance citoyenne » et l’« instance médiatique ». Patrick Charaudeau dénombre trois lieux de fabrication du discours politique : « le lieu de gouvernance », « le lieu d’opinion » et celui dit « de médiation ».
L’instance politique et l’instance adversaire (son double antagoniste) appartiennent au lieu de gouvernance, cependant que les deux dernières (instance citoyenne et instance médiatique) répondent respectivement aux lieux d’opinion et de médiation.
[3] Il s’agit de l’instance adversaire : l’opposition.
[4] Certains observateurs, tel que l’indique Grégoire Biyogo (2008), préfèrent plutôt parler de retour de la démocratie, l’apparition du pluralisme politique remontant à la période d’avant l’indépendance obtenue en 1960.
[5] Commune française ayant abrité la 16e conférence des Chefs d’État d’Afrique (francophone pour la plupart) et de France. Le président français de l’époque, François Mitterrand, invite alors ses homologues africains à amorcer (voire accélérer) un processus de démocratisation consécutif à la chute du mur de Berlin.
[6] Université Omar Bongo.
[7] Dominique Maingueneau (2004) parle d’hyperénonciateur en référence à des énoncés autonomes et mémorisables sans auteurs spécifiés. Ces énoncés appartiennent à un thesaurus qui fonde la communauté : « le locuteur montrant par là qu’il n’est que le porte-parole contingent d’une Parole venue d’ailleurs, en droit assumable par n’importe quel membre de la communauté » (ibid. : 123).
[8] Émission littéraire de télévision française France 2 animée par Bernard Pivot de 1975 à 1990.
[9] Pour Patrick Charaudeau (2004), toute communication obéit à un dispositif communicationnel, un fonctionnement auquel se plient les différents partenaires et qui les caractérise à travers les statuts sociaux et les fonctions qu’ils ont à remplir. Il y a parmi les quatre dispositifs énoncés celui dit de médiation. Il s’agit d’un dispositif qui appelle trois partenaires, tous physiquement présents (contrairement au dispositif de scène mentionné plus haut) et dont l’un joue le rôle de médiateur. Selon les situations, ce tiers peut avoir plusieurs rôles, en l’occurrence, celui d’intercesseur qui consiste à apporter une solution d’apaisement face à une situation conflictuelle dans laquelle se trouvent les deux autres partenaires.
[10] Martin Mabala, ministre en charge de la lutte contre la pauvreté, le 4 août 2005. Discours prononcé lors du séminaire atelier de restitution et de validation du processus participatif du document de stratégies de croissance et de la réduction de la pauvreté (dscrp).
[11] Les appellatifs relèvent de la désignation d’une personne dans le discours, selon un emploi allocutif, délocutif ou même locutif (Kerbrat-Orecchioni, 2010).
[12] Parti Social Démocrate.
[13] Discours de Pierre Claver Maganga Moussavou, président du PSD, le 4 septembre 2005. Discours prononcé lors du 4e congrès ordinaire de ce parti. Le PSD, dès sa création au sortir de la conférence nationale en 1990 qui réinstaure le multipartisme au Gabon, se réclame de l’opposition radicale. Opposant au président gabonais, on relève toutefois plusieurs entrées de Pierre Claver Maganga Moussavou au gouvernement, notamment en 2004, lorsque sa formation politique fait le choix d’intégrer la majorité. Ce qui permet d’indiquer (à quelques rares exceptions près) que les opposants au Gabon sont des transfuges du parti au pouvoir. Nombreux parmi ces leaders politiques, se revendiquent tantôt de l’opposition, tantôt de la majorité présidentielle (ou républicaine, c’est selon) en fonction de leur entrée ou non au gouvernement (sans que cela ait nécessité d’avoir une majorité au parlement).
[14] On peut y associer l’instance de médiation (les journalistes).
[15] Ce n’est pas nous qui mettons en gras et cela est valable pour l’ensemble des discours cités qui présentent les mêmes caractéristiques.
[16] Discours prononcé par Vincent de Paul Gondjout, candidat PDG (Parti Démocratique Gabonais, parti au pouvoir), du 1er siège du 3e arrondissement de Libreville. Discours d’ouverture de campagne pour les législatives de décembre 2006.
[17] Cela a trop souvent été le cas dans certaines régions reculées du pays.
[18] Les honorifiques procèdent des termes d’adresse. Ils consistent à « exalter » son interlocuteur, peuvent être renforcés par des formes dites « humiliatives », au moyen desquelles le locuteur se rabaisse, pour creuser plus profondément encore le fossé hiérarchique qui le sépare de son partenaire d’interaction » (Kerbrat-Orecchioni, 1990 : 26).
[19] Il s’agit de discours dont nous avons pu obtenir la trace écrite auprès de proches collaborateurs des auteurs concernés et différents journalistes.
[20] Cela pose la question de l’ethos des énonciateurs des DPG, problématique faisant l’objet d’une étude (en cours) que nous menons. L’ethos est une notion définie comme étant l’image que construit l’énonciateur (de sa propre personne) dans son discours. Cette construction tient compte également de l’image qu’il se fait de son partenaire de la communication y compris celle qu’il suppose que le destinataire se fait de lui.
[21] La question d’un effacement énonciatif (au sens où l’énonciateur ‘objectivise’ son dire tout en brouillant les marques de sa présence) est examinée chez Didier Ndoba Makaya (2015).
[22] Le point de vue (PDV) d’Omar Bongo étant reconnu par les énonciateurs comme un PDV surplombant.
[23] Les sous-énonciateurs participent d’un PDV dominé.
[24] PUP (Parti de l’Unité du Peuple), créé en 1991. Le PUP est une formation politique se réclamant de l’opposition à sa création. Le parti intègrera en 1993 la majorité présidentielle. Ses allées et venues, entre l’opposition et le parti au pouvoir, seront davantage liées aux rapports entre Omar Bongo et Louis Gaston Mayila que le fruit d’une véritable alternance démocratique née des urnes.
[25] « Père » est un des appellatifs désignant Omar Bongo. L’assimilation de Bongo à un père procède d’un accroissement du fossé hiérarchique déjà existant. Louis Gaston Mayila se rabaisse davantage pour que dans le même temps soit élevé (encore plus haut) le président. Il y a de la part du président du PUP une volonté de ‘s’infantiliser’ en marquant son obéissance et sa ‘soumission’ face à une figure paternelle qui fait office de Loi, de Référence.
[26] Louis Gaston Mayila, interviewé par l’agence de presse gabonews, le 22 juillet 2007.
[27] Roger Ékomi Ndong, premier secrétaire du Bureau National de l’UJPDG (Union des Jeunes du Parti Démocratique Gabonais). Déclaration faite en 2005 suite à la nomination au gouvernement de Philippe Nzengue Mayila.
[28] Les termes majeurs abordés lors des différentes campagnes électorales sont difficilement associés à des doctrines telles que le libéralisme, le socialisme, etc. Tout porte à croire que la question de l’idéologie se pose en ce que la politique au Gabon a trop souvent été (encore aujourd’hui) liée aux questions de personnes, de régions ou de groupes ethniques. Le président Omar Bongo (2001 : 143) parle lui-même de « candidats ethniques » en faisant référence, en l’occurrence, aux élections présidentielles de 1998.
[29] Cela fait échos, dans une moindre mesure, certes, à l’interpellation de Jacques Chirac par François Mitterrand à travers l’appellationMonsieur le premier ministre, lors du débat télévisé de 1988. On s’accorde à reconnaître « le rapport de domination » [entretenu par Mitterrand] à travers les termes d’adresse (Vion 2000 : 199).
[30] Nous pensons aux propos métaphoriques d’Omar Bongo qui, comme l’indique Mélanie Soiron (2009 : 154), se plaisait à rappeler combien il était en mesure de faire d’un chien un ministre.
[31] Un des parcs nationaux que compte le Gabon.
[32] Discours de Blandine Maroundou, ministre de la culture, le 11 août 2007. Ce discours est relatif à l’inscription du site de la Lopé Okanda au patrimoine mondial de l’Unesco.
[33] United Nations Educational Scientific and Cultural Organization (Organisation des Nations Unies pour la science et la culture).
[34] René Ndémézo Obiang, ministre de la communication, porte-parole du gouvernement, le 4 juin 2004, communiqué final du conseil des ministres.
[35] Langue fang (une des langues locales du Gabon). Cela peut se traduire comme suit : « Qui d’autre que Bongo ? » Par cette interrogation (voire affirmation), il s’agit d’invalider la légitimité des autres candidats à pouvoir diriger le Gabon.
[36] Les intensificateurs ont rapport avec la notion d’intensité. Notion qui « se rapporte à ce qui est mesurable ou du moins quantifiable, en termes de degrés sur une échelle quantitative à laquelle réfère le sens conceptuel de certaines expressions. » (Perrin, 2015).
[37] Discours prononcé à Libreville le 23 septembre 2006 dans le cadre du lancement du MO.DO.I (Mouvement pour le développement de l’Ogooué Ivindo). L’Ogooué Ivindo est une des 9 provinces que compte le Gabon.
[38] Le président gabonais a en effet très souvent été médiateur dans la plupart des conflits en Afrique. On peut citer la guerre civile en République du Congo (1998-1999),celle de l’Angola (1975-2002), le conflit tchado-lybien (1965-1972), l’apartheid en Afrique du Sud (1948-1991), etc.
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