Note de recherche sur le façonnement des individus contemporains dans les coulisses de la vie sociale
Notre travail sur les rapports entre solitudes et socialisations conduit à enquêter en France, et aux Etats-Unis, dans des zones rurales, et dans des zones urbaines, sur les expériences de solitude et l’espace des ‘luttes contre l’isolement’. Le présent texte vise à rendre compte du projet de connaissance sur lesquelles se fondent ces opérations empiriques. Ce projet souligne qu’à l’heure de l’ « individu hypermoderne » (Castel, 2009), plus la « société des individus » (Elias, 1991) est assurée de son existence, plus ces derniers sont en même temps sommés d’être autonomes (Albertson Fineman, 2005) et classés et évalués selon leur capacité à « se connecter les uns aux autres » pour « ne pas demeurer isolés » (Boltanski, Chiapello, 1999). Comme nous proposons de le montrer, les injonctions à l’adhésion à ces normes en apparence contradictoires – autonomie vs lien social– génèrent des inscriptions dans les coulisses de la vie sociale, c’est-à-dire des expériences de coupure physique, d’interactions et d’échanges verbaux avec autrui contribuant à façonner des individus plus extérieurs que leurs contemporains aux jeux sociaux de la sociabilité, de la famille nucléaire, de la relation affective, de la relation conjugale et de la relation sexuelle. Selon le point de vue ici développé, cette extériorité peut aussi bien être significative d’une capacité à combiner individualité et (sentiment d’) autonomie (Klinenberg, 2012) que traduire les difficultés que pose l’individuation à ceux qui manquent d’attaches et de protections (Castel, 1999). Autrement dit, les solitudes contemporaines seraient, dans les différentes classes sociales, territoires et sociétés nationales, pour certains individus, une marque d’ajustement aux normes sociales dominantes, tandis qu’elle constituerait, pour d’autres, une expression de désajustement social.
Ce projet est attentif aux notions de sens commun de solitude et d’isolement, à l’histoire de leur préhension sociologique et, à partir de ces considérations sociales et scientifiques, aux forces sociales qui génèrent les solitudes et produisent des effets sur les personnes connaissant des expériences de ‘retrait social’. Il s’agit de concevoir un objet fondé d’une part sur la critique de ces notions et de leurs usages par les pouvoirs publics (qui construisent un ‘problème social’) et la sphère commerciale (qui définit des régulations économiques de ce ‘problème’) et, d’autre part, sur la préhension sociologique de ces phénomènes. Ces analyses sont nécessaires pour proposer, ensuite, une définition renouvelée de la solitude sous l’angle problématique des processus socialisateurs, la socialisation étant entendue ici, à la suite des apports théoriques de Pierre Bourdieu, Bernard Lahire et Muriel Darmon [1], comme l’ensemble des effets que produisent sur les individus leurs expériences de participation à la vie sociale et, en l’occurrence, de participation suspendue ou interrompue à cette dernière. Certes, socialisation à la solitude et socialisation à l’individuation – l’individu entendu comme source autonome de pensée et d’action (Durkheim, 1893) –, ne sont pas synonymes. Cependant, notre hypothèse est que l’inscription dans les coulisses de la vie sociale est révélatrice des manières d’appartenir à la « société des individus ». En traduisant empiriquement le postulat selon lequel la socialisation des ‘retirés’ n’est intelligible qu’à la lumière des processus socialisateurs que connaissent ceux qui ne le sont pas, ce projet entend contribuer à la connaissance des conditions contemporaines de l’intégration sociale.
Comme le montre Georges Minois dans son essai sur la « solitude et les solitaires » (Minois, 2013), ce contexte n’est intelligible que replacé dans le temps long de l’histoire : pour cet auteur, les solitudes contemporaines puisent une bonne part de leur légitimité sociale dans le 19ème siècle, période d’épanouissement de l’individualisme et du libéralisme, « siècle de l’homme seul » (Minois, 2013 : 359). Dès lors il y a un défi indissociablement théorique et méthodologique à relever : montrer qu’appréhendées comme effet de socialisation et production de socialisation (Lahire, 1998), ces solitudes constituent à la fois un objet révélateur de processus de portée générale sur la « société des individus » et un objet saisissable empiriquement. Puisque celui-ci interroge jusqu’où il est possible de penser sociologiquement ce que pense, fait et est un individu physiquement coupé de tout autre individu, il s’agit d’un ‘objet limite’ pour les sciences sociales.
Le projet considère les représentations collectives et les évocations artistiques et médiatiques de la solitude, mais aussi la présence de ce mot au cœur de dispositifs publics et marchands. Cette démarche permet d’identifier les enjeux sociaux, politiques et économiques de ces descriptions et de ces ‘problématisations’ de la solitude et, partant, l’intérêt de leur déconstruction sociologique. Elle permet aussi, à travers les dispositifs et les offres commerciales qui visent à contrer ou, au contraire, à favoriser ces dernières, d’entrer dans la diversité des formes de solitude en termes d’expériences sociales (Lahire, 2013).
Comme le souligne Georges Minois, la solitude est un thème classique des arts (Minois, 2013). Dans ces expressions, la solitude est souvent présentée sous un angle romantique, par exemple lorsqu’elle met en scène des personnes revendiquant d’avoir fait le ‘choix’ de rompre physiquement avec leur(s) réseau(x) de relations sociales – il peut leur rester alors, principalement, les contacts dits « virtuels » permis par Internet et ses messageries et ‘réseaux sociaux’ spécifiques (Lethiais, Roudaut, 2010 : 39). Ces figures – le bohémien, l’ermite, le sage mystique ou l’écrivain – ont, pourrait-on dire, les moyens de se couper avec profit de la vie sociale (Stump, 1997, p. xii). Au contraire, pour le clochard retranché dans les bois et l’‘asocial du village’, lesquels constitueraient le pendant dramatique de ces figures, cette coupure est préjudiciable. Si des expériences concrètes de solitude informent ces représentations, les premières exercent également une influence sur les dispositifs publics et parapublics de traitement de l’isolement, ainsi que sur les offres commerciales de solitude ou de rupture avec la solitude.
Les conséquences mortelles de la canicule de l’été 2003 pour plus de dix mille personnes âgées ont attiré l’attention sur les enjeux sociaux et politiques de la solitude et de l’isolement. En effet, même si les individus décédés à cause de cette vague de chaleur n’étaient pas tous privés de contacts sociaux, il reste que cet événement a révélé l’existence de personnes parfois coupées aussi bien de leur voisinage et de leur famille que de l’aide sociale. A l’issue de la ‘catastrophe sanitaire’, les pouvoirs publics ont notamment mis en avant cette thématique à travers un rapport signé par Christine Boutin intitulé Pour sortir de l’isolement. Un nouveau projet de société. Le ‘problème’ est irréductible à la vieillesse : les travailleurs précaires, les handicapés, les malades, les célibataires, les ‘joueurs’ et les ‘drogués’ sont aussi désignés comme étant en proie à des formes d’isolement. A la fin de l’année 2010, un collectif d’associations baptisé Pas de solitude dans une France confraternelle, créé par la Société de Saint Vincent-de-Paul, exprimait cette considération pour l’hétérogénéité des ‘isolés’ [2]. Le pendant commercial de ces initiatives s’exprime au travers des produits supposés offrir des possibilités de rupture avec la solitude ou l’isolement. La vogue ‘urbaine’ du speed-dating [3] et le développement, en milieu rural, des bals pour célibataires,sont exemplaires de ces dynamiques. Plus rares, d’autres produits proposent d’offrir une solitude propice à l’ ‘épanouissement personnel’ [4].
Même s’ils ne sont pas guidés par des définitions de l’isolement et de la solitude similaires, ces investissements sont néanmoins significatifs de l’identification de problèmes pour la société nationale, de difficultés pour ses membres liés à des situations d’isolement ou de solitude et d’aspirations, chez les individus, à se couper du monde à des fins de ‘ressourcement’ [5] ou, encore, de création artistique. Véhiculant des définitions implicites de la solitude, ces formes d’action publique et ces pratiques de consommation, de même que ces activités artistiques qualifiables d’expériences ‘élitistes’ et ‘lettrées’ de la solitude [6], invisibilisent des pans entiers du phénomène. Par conséquent, ces actions diverses appellent à la (re)découverte des situations et des conditions de solitude pas nécessairement appréhendées comme telles, à l’étude des expériences ‘ordinaires’, moins ‘médiatiques’, ‘commerciales’ et ‘lettrées’, de la solitude. En mettant en lumière des injonctions normatives contradictoires (autonomie vs lien social), ces situations et conditions suggèrent en outre qu’aborder sociologiquement la solitude suppose de la problématiser en termes de socialisation : comment est-on conduit vers la solitude ? Comment apprend-on à mettre à profit l’isolement ? Sous cet angle, une série de travaux majeurs des sciences sociales permettent de construire une définition et une approche renouvelées de la solitude.
Si le thème de la solitude est développé par des sociologues depuis la fin du XIXe siècle, c’est, initialement, le plus souvent de manière implicite. Avec sa réflexion sur la notion de solitude, Georg Simmel fait exception et inaugure une problématisation de l’isolement comme fenêtre sur les coulisses de la vie sociale. En effet, pour ce dernier, la multiplication des relations interpersonnelles dans les sociétés modernes favorise la liberté individuelle en même temps qu’elle engendre un esseulement précipitant « l’homme moderne » dans une existence privée « de but dernier » (Simmel, 1987 : 454). Selon Simmel, les mises en coulisses favorisées par la « modernité » sont des expériences socialisatrices à part entière (Simmel, 1999). Sur cette thématique, Emile Durkheim fait aussi exception. Selon lui, l’esseulement engendré par le processus d’individuation peut être bénéfique aux individus afin que ces derniers, une fois qu’ils reviennent à la société, soient dans de bonnes dispositions pour y participer (Durkheim, 1970 : 270).
Avec ses travaux sur les hommes célibataires des villages du Béarn au XXe siècle, Pierre Bourdieu contribue également à constituer la solitude en objet sociologique en restituant les destins sociaux des « immariables » dans le cadre de l’unification à l’échelle nationale du marché des biens symboliques : celle-ci expose à la vie seule « ceux qui avaient partie liée avec le marché protégé des anciens échanges matrimoniaux contrôlés par les familles » (Bourdieu, 2002 : 12-13). Par ailleurs, l’analyse, par Norbert Elias, de la relégation des mourants dans les coulisses de la vie sociale (Elias, 1982 : 80), puisque ceux qui sont appelés à vivre encore supportent difficilement leur compagnie, conduit à s’interroger sur la solitude des vivants, – les problèmes qu’ils posent sont-ils similaires à ceux que posent les mourants ? – c’est-à-dire des individus n’étant pas encore personnellement concernés par cette séquence de l’existence.
Parallèlement à ces développements européens, la tradition de l’étude de la solitude s’est construite aux Etats-Unis, à partir des années 1920, autour de la notion d’isolement social comme relégation. Initialement, celle-ci est mobilisée pour décrire la distance géographique qui sépare les espaces résidentiels des groupes dominés de ceux qu’investissent les groupes dominants (Klinenberg, 2002). Ensuite, les sociologues américains orientent largement leur attention vers l’échelle individuelle. Ils pointent alors un processus de déclin inexorable des sociabilités sous le poids de l’individualisme (Riesman, Glazer & Denney, 1950 ; Senett, 1975 ; Putnam, 1995). Développant une perspective aussi globale que leurs homologues étasuniens, différents chercheurs européens ont abordé la solitude afin d’interroger les structures sociales à l’échelle macrosociologique ou microsociologique. Ainsi Roelof Hortulanus, Anja Machielse et Ludwien Meeuwesen mettent au jour, à travers des enquêtes statistiques et par entretiens, la relation entre, d’un côté, une individualisation au sein des sociétés occidentales qui rend le maintien du capital social de plus en plus difficile et, de l’autre côté, le nombre grandissant de personnes « socialement isolées » (Hortulanus, Machielse, Meeuwesen, 2006). De leur côté, Marie-Noëlle Schurmans et Marie-Chantal Doucet analysent les représentations de l’« expérience solitaire » et le sentiment de solitude (Doucet, 2007 ; Schurmans, 2003).
L’approche que nous proposons de développer est différente de ces travaux : elle n’est pas centrée sur le sentiment et la représentation (Riesman, Glazer & Denney, 1950 ; Doucet, 2007 ; Schurmans, 2003), ni sur le problème social et ‘sociétal’ des solitudes (Hortulanus, Machielse, Meeuwesen, 2006 ; Putnam, 2000), mais sur les ressorts, l’expérience et la force socialisatrice de ces dernières dans une perspective processuelle. Autrement dit-il s’agit de combiner attention pour les formes concrètes des solitudes et examen des socialisations qui les produisent et qu’elles produisent. Ce décalage avec les autres travaux est aussi rendu possible par le choix de préférer l’usage du mot de solitude à celui du mot d’isolement.
A la suite de Simmel et d’Elias, ce choix d’utiliser le mot de solitude plutôt que celui d’isolement, prédominant dans les discours publics comme dans l’approche sociologique [7], permet de problématiser la réalité de la solitude en tant qu’expression privilégiée de l’individualisme et de ses normes contradictoires. Cette orientation est nécessaire pour appréhender la solitude comme une réalité sociale observable et, partant, pour éviter la dénégation de la dimension sociale de l’individu dont on dit qu’il est isolé. Le fait d’être en retrait de la vie sociale est le produit de relations sociales –la socialisation à la solitude– et non d’un ‘détachement’ ou d’une ‘sortie’ du lien social. Ces ‘retraits’ génèrent des effets socialisateurs.
Fondés sur des situations et des conditions potentiellement disparates, ces ‘retraits’ expérimentés par des femmes et des hommes, des ruraux et des urbains, ne sont pas moins hétérogènes. C’est pourquoi la solitude est abordée comme un ordre d’expériences éclaté – il est plus pertinent de parler de solitudes – et comme le résultat de divers processus socialisateurs conduisant à l’état de ‘retrait’ de la vie sociale. Les solitudes sont dans cette perspective caractérisées par un ‘déficit’ de contacts sociaux directs, ces derniers étant définis dans les termes suivants : une interaction entre au moins deux individus expérimentée en situation de coprésence physique dans un milieu d’interconnaissance donné. Parce qu’il n’y a de ‘déficit’ que par rapport à un niveau jugé acceptable – d’où l’emploi de guillemets –, le déficit de contacts sociaux directs renvoie à l’incorporation, à l’adhésion et à la non adhésion, par les individus, de modèles de sociabilité prédominants dans tel groupe, telle zone géographique et telle période historique – pour la période contemporaine, la massification de l’usage des ‘nouvelles télécommunications’ est, dans l’étude de ces dynamiques, à considérer (Cassili, 2010). En somme, les solitudes sont définies au point d’articulation entre un état objectif et une norme subjective. La considération pour les contraintes productrices de solitude permet de mettre à distance la dichotomie entre ‘solitude choisie’ et ‘solitude subie’ prégnante dans les discours de sens commun [8] ainsi que dans les productions scientifiques [9]. En effet, cette partition ne reflète pas la réalité puisque ce que chaque individu expérimente comme contact social et non contact social est lié à des forces sociales qui informent ses conduites, est social. Cet usage du monde est une des formes possibles d’expérience sociale.
La manière de se saisir empiriquement de ces expériences indissociables de représentations est nourrie en particulier de celle que Philip Slater a formulé, mais jamais mise en œuvre sur des terrains d’enquête, dans son ouvrage A la recherche de la solitude. Exprimant son désaccord avec ce qu’il perçoit chez David Riesman et ses co-auteurs comme une adhésion aveugle à l’individualisme (Slater, 1970), Slater articule à la question du sentiment de solitude ou d’isolement au contact des autres les dynamiques conduisant à ce que les situations et les conditions d’isolement et de solitude – mots qu’il utilise de manière indifférenciée – soient recherchées par les individus. Cet auteur souligne ce que, dans l’individualisme moderne, l’‘autonomisation’ et la ‘liberté’ engendrent comme dénégations de l’interdépendance des individus.
Slater offre ainsi un modèle d’analyse des solitudes dans les sociétés occidentales contemporaines qui place au cœur du questionnement les rapports entre la solitude au sens d’être seul physiquement et la solitude au sens de se sentir et de se voir seul (au monde), entre la ‘coupure physique’ et la ‘coupure mentale’ avec les ‘autres’. L’auteur pointe les facteurs historiques, géographiques, spatiaux, ethniques, sociaux, culturels et générationnels qu’il est nécessaire de considérer pour comprendre les faits et les sentiments de solitude. Cette analyse appelle à de nouvelles investigations historiques et sociologiques sur les différentes sociétés nationales, sur les classes sociales, sur les différents types de territoire (rural/urbain) et sur les différents univers professionnels, des investigations soucieuses des articulations entre solitudes enfantines et solitudes adultes, et solitudes passées et solitudes présentes. Ces investigations exigent également de prendre en compte les intrications entre contexte social général et aspirations individuelles et familiales, entre économie générale de l’inscription spatiale des groupes sociaux et installation résidentielle, entre état global des relations entre hommes et femmes et statut dans la sphère domestique et, enfin, entre ségrégation ethnique sur un territoire national et couleur de peau des personnes dans les environnements sociaux immédiats.
En somme, à rebours des théories générales de la ‘modernité’, l’observation empirique permet de mettre au jour comment les situations de solitude n’équivalent pas à une rupture avec le monde social, ni cognitive, ni physique : le ‘retrait social’ est bien, au contraire, une forme spécifique d’expérience, de relation et de connexion sociales. L’observation permet également de montrer que les solitudes sont socialisatrices. A partir de l’hypothèse selon laquelle les socialisations ne sont pas seulement constituées par des contacts sociaux mais aussi par des non contacts sociaux (historiquement et socialement construits), il s’agit alors d’étudier la manière dont ceux-ci façonnent les individus et de contribuer, ainsi, à la compréhension des ressources nécessaires pour savoir être un individu dans la « société des individus ». Ce questionnement impose d’élaborer des protocoles d’enquête originaux traduisant empiriquement la diversité sociale des ressorts, des formes et des effets des solitudes. Pour ce faire, les opérations doivent se conformer à deux exigences indissociables l’une de l’autre : considérer que les solitudes ne sont jamais un commencement, et garder à l’esprit qu’il n’y a de solitude que sociale.
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Appréhendées ici comme des produits de l’individuation, les solitudes sont instructives sur les effets de ce processus dans l’espace social des individus et dans le temps historique collectif au sein desquels se déroulent les trajectoires. Cette approche permet non seulement de replacer les ‘retirés’ dans les conditions de leurs solitudes mais aussi de souligner que celles-ci sont moins le fruit d’une rupture biographique produisant une ‘sortie’ du monde social que le résultat de dynamiques socialisatrices. Cette perspective ouvre sur une réflexion plus générale sur les conditions de l’intégration sociale des individus contemporains. Tel est en définitive l’un des intérêts majeurs d’étudier, à l’aune des forces de socialisation, les solitudes, ces dimensions de l’existence que peu d’entre nous n’ont pas expérimentées.
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[1] Voir, notamment, P. Bourdieu (1997), Méditations pascaliennes, Paris, Seuil ; M. Darmon (2005), La socialisation, Paris, Armand Colin ; B. Lahire (1998), L’homme pluriel. Les ressorts de l’action, Paris, Armand Colin.
[2] Le quotidien La Croix a rendu compte de cette actualité le 24 novembre 2010 en publiant le sondage Les français et la solitude commandité par la Société de Saint Vincent-de-Paul.
[3] Cet anglicisme signifie littéralement rencontre rapide.
[4] Voir, par exemple, cette offre diffusée sur Internet et nommée « Vivre pendant un mois sur une île déserte, c’est désormais possible ».
[5] Le Figaro, « Un patron s’exile 40 jours sur une île déserte », 17 septembre 2013.
[6] Pour une esquisse d’analyse de la solitude des écrivains, voir B. Lahire (2006), La condition littéraire. La double viedes écrivains, Paris, La Découverte. Sur un autre univers de ‘lettrés’, celui des éditeurs, et l’ancrage à la fois ‘juvénile’ et ’sanitaire’ de l’inclination de ces derniers à la solitude, voir H. Serry (2012), Sociologie de l’édition. De la fabrication d’un catalogue aux mutations d’un secteur des industries culturelles, Thèse d’HDR en Sociologie, Université Paris VIII.
[7] Voir, par exemple,J-L. Pan Ke Shon (1999), « Vivre seul, sentiment de solitude et isolement relationnel », Insee Première, n° 678.
[8] Voir, par exemple, le débat du 20 décembre 2012 intitulé « Subie ou choisie, la solitude fait débat ce matin dès 10h dans « Service Public » sur France Inter.
[9] Voir, par exemple, G. Minois op. cit. ; G. Macqueron (2009), Psychologie de la solitude, Paris, Odile Jacob ; M-C. Doucet, op. cit. ;M-N Schurmans, op. cit.
Bordiec Sylvain, « Les solitudes : expériences sociales et socialisatrices », dans revue ¿ Interrogations ?, N°24. Public, non-public : questions de méthodologie, juin 2017 [en ligne], https://revue-interrogations.org/Les-solitudes-experiences-sociales (Consulté le 21 novembre 2024).